"Docteur, vous vous rendez compte qu'on nous a piqué notre adolescence". Le constat est clair, la crise du COVID est venue sérieusement compliquer le quotidien de toute une génération qui, normalement, devrait être insouciante, qui avait déjà vécu pas mal de moments difficiles avec les attentats, le réchauffement climatique, la pandémie et la guerre en Ukraine.
"Docteur, on nous a piqué notre adolescence !" C’est le credo de la génération COVID, qui a constaté avec amertume que la pandémie et le confinement sont venus s’opposer, point par point, aux enjeux de l’adolescence. L’isolement social, l’arrêt des activités de loisirs et l’excès d’utilisation des écrans ont remplacé les moments de convivialité indispensables pour traverser cette période de transition. Et tout ça pour protéger la génération de leurs parents et grands-parents, ces baby-boomers jugés écologiquement responsables de la pandémie… ! Une étude récente le confirme : plus de la moitié des jeunes de 16 à 25 ans sont inquiets face au changement climatique et 75 % pensent que l’avenir est effrayant.
La mission des adultes est d’aider les adolescents et les jeunes adultes à redonner du sens à leur vie. Le docteur Revol, pédopsychiatre, vous éclaire, et vous donne quelques clés.
"Ok, boomers", la riposte aux interdits
Et eux ont trouvé un avenir incertain avec un certain nombre de restrictions. Ils ont beau jeu de nous dire : "nous, les adolescents, on ne craignait rien ou peu de choses avec la COVID et c'est pour vous protéger, vous, les baby boomers, et nos parents qu'on nous a pris notre adolescence".
Pas étonnant qu'on voit fleurir en Amérique du Nord les "OK, Boomer", une phrase devenue virale et qui va nous atteindre quand on fait une remarque à un adolescent : "Tu ne devrais pas vivre comme ça, tu ne devrais pas boire comme ça, tu ne devrais pas faire-ci. Cette remarque à la fois laconique et ironique est une façon de dire à leurs ainés : vous nous donnez des leçons alors que - si on en est là - c'est votre faute. C'est vous qui n'avez pas pris soin de la planète en roulant à 180 km à l'heure sur l'autoroute, en balançant du plastique un peu partout.
Alors que faire ?
D'abord comprendre. Une étude du Lancet en 2021 est assez surprenante. Plus de 50 % des ados pensent que l'humanité est condamnée. Plus de 50 % des ados se posent la question d'avoir des enfants.
Puis dialoguer, les rassurer, trouver des stratégies pour redonner du sens à leur vie, pour leur donner envie d'avoir envie. Rétablir un dialogue et surtout répondre à leur demande implicite par rapport à tout ce qu'ils ont vécu d'incertitude. Est-ce qu'il y a un pilote dans l'avion ? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui dirige cette école, ce service hospitalier, ce pays ?
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Le Dr Olivier Revol,
Il a 64 ans et est l'auteur de nombreuses publications scientifiques, concernant la précocité intellectuelle, l'hyperactivité et les difficultés scolaires.
Il dirige un service de Neuro-psychiatrie de l’enfant au CHU de Lyon. Il enseigne à l’Université Lyon 1 et milite depuis 30 ans pour que chaque enfant, quelles que soient ses compétences, découvre à l'école le plaisir d'apprendre.
Il a publié trois ouvrages chez JC Lattès : "Même pas grave ! L'échec scolaire, ça se soigne" en 2006, "J’ai un ado, mais je me soigne" en 2010, et "On se calme" en 2013. Il a co-écrit en 2019 « Les Philocognitifs » chez Odile Jacob et "100 idées pour accompagner les enfants à Haut Potentiel (Tom Pousse)" en 2021.
Il aide les parents et les professionnels à comprendre les nouveaux codes des enfants et des adolescents, avec un intérêt particulier pour les fratries d’enfants différents.