À l'occasion de la journée internationale du droit à l'avortement, le Planning familial 69 revient sur les enjeux de l'accès à l'interruption volontaire de grossesse. Nous avons posé trois questions à Valérie Radix, militante de l'association.
L'année dernière, 234 300 interruptions volontaires de grossesse (IVG) ont été enregistrées en France, dont 218 400 en métropole. Une hausse par rapport aux deux années précédentes, marquées par la Covid. Pourtant, des entraves à ce droit fondamental persistent.
Les collectifs anti-IVG, qui ont mené des campagnes à Lyon, représentent-ils une menace au droit à l'avortement ?
C'est une menace en effet que l'on se doit de contrer. La métropole de Lyon a porté plainte puisque les autocollants anti-IVG étaient apposés sur des Vélo'v, et on espère que cela aboutira. Ces collectifs sont dangereux, car leurs campagnes sont stigmatisantes, culpabilisantes et révèlent leur pouvoir d'action, mais aussi leur pouvoir financier.
Ces groupes sont peu nombreux, mais ils appartiennent à des réseaux organisés au niveau international capables de récolter des fonds. Ce qui nous inquiète surtout, c'est la propagation d'un discours anti-avortement et des alliances entre courants hyper conservateurs et gouvernements populistes. On l'a vu aux États-Unis avec Trump pour qui supprimer l'accès à l'avortement n'était pas une priorité. Or, une loi qu’on croyait intégrée, entérinée (NDLR : Roe v. Wade) a finalement été révoquée dans plusieurs États.
Emmanuel Macron s'était prononcé le 8 mars 2023 en faveur de l'inscription de l'IVG dans la Constitution. Cela resterait une solution pour protéger ce droit ?
C'est une des réponses possibles, mais pour l'instant, elle est à l'état de promesse et nous n'avons aucune information sur l'avancée d'une constitutionnalisation de l'IVG. Nous demandons aussi à ce que ce droit soit inscrit dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui a toujours laissé la prérogative aux États membres. Or, il s'agit d'un droit fondamental.
Tout cela rendrait plus difficile les retours en arrière, mais il faut d'abord garantir les moyens pour permettre l'avortement pour tous. Au Planning familial, nous voulons supprimer la clause de conscience des médecins spécifique à l'IVG, car cela peut constituer un obstacle quand des médecins ou des anesthésistes refusent de pratiquer cet acte. En France, c'est minoritaire, mais on a noté des résistances lors du passage à 14 semaines par exemple.
Notez-vous des disparités territoriales ou des problèmes d'accès dans notre région ?
Garantir le droit à l'IVG passe surtout par l'arrêt des fermetures des centres, car c'est une première atteinte au droit pour les femmes qui rencontrent des difficultés à accéder à des rendez-vous ou à programmer une IVG en bloc opératoire. En ville, la prise en charge est bonne sauf en période de vacances. Cet été, trois semaines d'attente étaient parfois nécessaires pour avoir un rendez-vous à l'hôpital !
Globalement, l'accès aux soins en zone rurale est de plus en plus compliqué en France. Dans notre région, nous sommes moins affectés que dans le sud de la France, par exemple. Ceci dit, nous intervenons dans l'Ouest lyonnais en milieu rural et c'est en premier lieu l'accès à l'information qui s'avère compliqué. Demander une contraception à la pharmacie d'un petit village alors que tout le monde se connaît, cela peut être difficile pour les jeunes. Ils ne savent pas toujours que l'IVG médicamenteuse (pilule abortive) peut se demander via son médecin de ville ou sa sage-femme.
Ce 28 septembre, les collectifs et associations féministes ont appelé à se rassembler à 18h00 place de la Comédie à Lyon. Des groupes latino-américains ont été invités à participer pour témoigner des difficultés et des avancées du droit à l'avortement sur le continent.
En octobre, le Planning familial du Rhône organisera des rencontres autour des premiers militants pour le droit à l'IVG.