Les prud'hommes de Lyon, saisis par une infirmière réclamant le maintien de son salaire malgré son refus de se faire vacciner, ont considéré que le droit européen évoqué dans ses motivations ne pouvait s'appliquer au détriment du contexte sanitaire.
Une infirmière, salariée à temps partiel d'un centre de santé de la Mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN) à Lyon, a porté son affaire devant le conseil de prud'hommes. Elle avait vu son salaire suspendu dès le 4 novembre, en vertu de l'application de la loi du 5 août 2021 instaurant l'obligation vaccinale pour les soignants et la suspension de leur contrat de travail en cas de refus.
Elle invoque la législation européenne
Lors de l'audience en référé du 6 octobre, elle avait contesté les décisions de son employeur en demandant aux prud'hommes d'écarter cette loi pour cause "d'inconventionnalité au regard du droit européen", selon l'ordonnance rendue le 17 novembre.
Elle avait notamment invoqué, à l'appui, le Règlement du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021 ainsi que la Charte des droits fondamentaux européens qui aurait, selon elle, été bafouée par la loi française, en particulier sur le droit à l'intégrité physique et mentale et à l'interdiction de toute discrimination.
"But légitime et impérieux de la protection du droit d'autrui"
Mais, relève le conseil des prud'hommes, "une lecture attentive et exhaustive
du règlement cité montre que celui-ci n'entend pas consacrer une interdiction absolue de toute discrimination, et n'implique pas que la plaignante "serait en droit d'imposer sa liberté au risque de ne pas protéger ceux que sa fonction lui commande de protéger".
Selon la jurisprudence européenne, "l'ingérence dans les libertés individuelles
de l'obligation de vaccination est licite en ce qu'elle poursuit un but légitime
et impérieux de la protection du droit d'autrui", poursuivent les juges.
La loi française "visant la poursuite du but impérieux et légitime de la protection
de la santé d'autrui (...) n'est donc pas manifestement non conforme au droit européen", concluent-ils .Le conseil des prud'hommes engage par ailleurs la plaignante à se pourvoir au fond.
"A ma connaissance, c'est la première fois qu'un juge judiciaire, même en référé,
se penche sur la conformité au droit européen de la loi du 5 août", a expliqué
à l'AFP Philippe Lecat, avocat de la MGEN, saluant cette décision, tout en regrettant le "blocage" de cette "excellente infirmière".