Une décision récente de la Métropole de Lyon de limiter le trafic sur le pont de Vernaison (Rhône) à un seul sens de circulation -pour des raisons de sécurité- ne passe pas auprès des élus locaux, dont le maire de Vernaison Julien Vuillemard (DVD).
"Ce soir, c’est avec une grande surprise que nous avons appris par voie de presse que la Métropole avait pris de façon unilatérale et arbitraire la décision de passer le pont de Vernaison en sens unique dès le mois de juin 2021" débute le communiqué de presse publié par le maire (DVD) de Vernaison Julien Vuillemard, qui s'oppose à cette décision, avec plusieurs autres maires concernés.
De son côté, le président écologiste du Grand Lyon Bruno Bernard assume. Il estime que les élus ont bien été consultés : "la réaction des maires de Solaize, de Vernaison et de certains élus locaux est d’autant plus incompréhensible que ces mêmes élus ont été largement informés de la situation lors d’une première réunion, puis lors d’un comité de pilotage partenarial associant à la demande de la Métropole, toutes les parties prenantes du dossier (Préfet, services de l’État, SNCF Réseau, Région Auvergne Rhône-Alpes, Département du Rhône, communes et intercommunalités de part et d’autre du Rhône entre Lyon et Vienne)." réplique-t-il dans un autre communiqué.
Des ponts "mal entretenus" placés sous surveillance particulière
Au coeur de cette polémique, l'un des trois ponts les plus fragiles parmi les 735 ouvrages d’art – ponts, passerelles ou trémies – dont le Grand Lyon assume la responsabilité, sur l’ensemble de son territoire.
Avec le pont de Couzon-au-Mont-d'or, et de l'Ile Barbe, celui de Vernaison a été identifié comme un ouvrage particulièrement fragilisé par les années et le manque d'entretien.
Un retard que le vice-président chargé des transports attribue aux majorités précédentes : "Certains ouvrages comme le pont de Vernaison sont vieillissants et force est de constater que les mandats Collomb et Kimelfeld ont privilégié les chantiers nouveaux à l’entretien de l’existant. Il est primordial d’assurer leur surveillance et leur maintenance." explique Jean-Charles Kohlhaas.
Au total la Métropole explique que 186 ouvrages font l’objet une surveillance renforcée compte tenu de leur complexité et/ou de leur vétusté. "Ces dernières années ce patrimoine existant n’a pas fait l’objet du niveau d’investissement qu’il mérite. Depuis juillet 2020 l’exécutif de la Métropole met en place un plan de gestion à long terme, tout en donnant la priorité absolue aux enjeux de sécurité à court terme." détaille Jean-Charles Kohlhaas.
Une décision qui ne convient pas aux riverains
Malgré cette menace, les élus réunis autour du maire de Vernaison se disent insatisfaits par la mesure immédiate de restriction de la circulation sur "leur" pont. Ils n'y voient que des inconvénients. "La mise en place de ce sens unique imposerait chaque jour un détour de plus de 15 km vers Pierre Bénite ou Givors pour 6 000 à 7000 véhicules" expliquent-ils.
Ils énumèrent les conséquences fâcheuses liées à l'importance stratégique de cet axe : "Cela augmenterait le trafic sur les axes structurants de nos villes, déjà largement victimes d’embouteillages aux heures de pointes, supposerait pour les usagers une augmentation significative du temps passé dans les transports, une consommation supplémentaire de carburant pour répondre au détour et un changement notoire des trajets et habitudes du quotidien, et compliquerait le franchissement du Rhône par les véhicules des services publics (pompiers, forces de l’ordre)."
Ils ont donc décidé de se mobiliser, en sollicitant un arbitrage de l'Etat et de la Région. "Notre mobilisation ne cesse de grossir, sensibilisant maintenant les élus du plateau mornantais, à la vallée de l’Ozon, en passant par l’extrême Sud du département. Ceux-ci ont décidé d’apporter leur soutien à notre démarche afin de faire entendre raison à la Métropole" menacent-ils.
Estimant que l'exécutif métropolitain ne tient pas compte de leur avis, ils ont même lancé un sondage : sur 472 réponses, 96,5 % des votants sont défavorables au passage en sens unique du pont. Les élus locaux réclament plutôt "la reprise des études pour un nouveau franchissement sur le Rhône, plus adapté et multimodal (automobile, transports en commun, vélo et piéton)."
Limiter la circulation pour éviter un drame
De son côté, le Grand Lyon réplique que cette décision est la seule envisageable immédiatement pour éviter un drame. La mise en circulation à sens unique permettrait de répondre à la demande des experts, qui recommandent de limiter le trafic sur cet ouvrage.
"Le pont de Vernaison, construit en 1957, fait l’objet d’un dispositif de surveillance 24h/24h depuis le printemps 2019. Début 2020, il a bénéficié de travaux d’urgence concernant l’étanchéité des 4 chambres d’ancrage des haubans qui le soutiennent. Le pont est interdit aux poids-lourds depuis le 12 mars 2020. Cette interdiction a permis de ralentir la dégradation de la structure, mais elle reste mal respectée. De plus les épisodes de canicule qui se succèdent mettent à rude épreuve le système de câblages et d’ancrages. Une barre d’ancrage en particulier est déjà très fragilisée" résument les services techniques de la Métropole. Pour résumer, Jean-Charles Kohlhaas n'emploie pas de détours : "C'était soit la circulation à sens unique, soit la fermeture. On n'a pas le choix", nous a-t-il confié.
Un exemple parlant à Couzon-au-Mont-d'Or
L'actualité a failli appuyer de manière dramatique, il y a quelques jours, la crainte de la majorité écologiste. Le passage d'un poids-lourds beaucoup trop volumineux sur le pont de Couzon-au-Mont-d'Or, le 23 avril, entrainant de sérieux dégâts et sa fermeture temporaire à tous véhicules, a rappelé combien une absence de fermeté pouvait tourner au tragique.
"Nous sommes passés très près d’une catastrophe. Le passage d’un camion de 32 t a endommagé le pont de Couzon sur lequel seuls les véhicules de moins de 3,5 t étaient autorisés. Pour éviter tout accident et dans l’attente des conclusions des investigations techniques, nous avons dû fermer le pont en urgence " a alors réagit Fabien Bagnon, vice-président délégué à la Voirie et mobilités actives.
Pour l'heure, Bruno Bernard ne cède pas. Il souhaite clore la polémique en appelant "à la responsabilité de tous pour mettre en œuvre les solutions les plus pertinentes à court, moyen et long termes mais aussi pour garantir la sécurité du pont en toutes circonstances. Cela passe notamment par un contrôle de l’interdiction d’accès aux poids lourds, qui relève de la police nationale et des polices municipales." a conclu le président du Grand Lyon.