Pollution aux PFAS : "Les communes doivent porter une action collective" Jérôme Moroge, le maire de Pierre-Bénite

À Pierre Bénite, 2 usines fabriquent des PFAS, les fameux perfluorés (Arkema et Daikin Chemical). Nombre d'habitants de la commune, testés dans le cadre d'une enquète de France 3 Rhône-Alpes, se sont avérés contaminés aux polluants éternels. Le maire LR de Pierre Bénite, Jérôme Moroge, s'est exprimé quant à cette pollution, en plateau avec Paul Satis.

Il était de notoriété publique que des PFAS étaient déversés dans les eaux du Rhône à Pierre-Bénite. Une enquête, menée par Emilie Rosso et Vincent Diguat, journalistes de la rédaction de France3 Rhône-Alpes a révélé que les habitants étaient également touchés par cette pollution. 

Paul Satis : Avez-vous été surpris par ces résultats ? 

Jérôme Moroge : "Nous ne sommes pas vraiment surpris. Nous sommes embarqués depuis un certain nombre de mois, voire d'années, dans cette affaire des perfluorés. On sait maintenant qu'il y a eu des rejets très importants, notamment dans l'eau du Rhône. (NDLR : Les perfluorés passent dans le sang.) Une étude avait révélé que l'ensemble des Français ont des perfluorés dans le sang. J'aime bien le rappeler. La population mondiale a des perfluorés dans le sang. (NDLR : Les taux de contamination révélés au cours de l'enquête sont particulièrement élevés). C'est un indicateur de plus pour dire...Allons-y maintenant ! Il faut vraiment prendre les choses à bras-le-corps. L'État a trop traîné, ça fait 10, 20, 30 ans que nous sommes au courant, en tout cas que certains sont au courant. Il faut accélérer et trouver les responsabilités des uns et des autres."

Paul Satis : Y a-t-il un lien avec une recrudescence des cas de cancers à Pierre-Bénite qui a été établi ?

"On a mené une étude sur les maladies de longue durée, le taux d'hospitalisation, les cancers, le taux de mortalité et en réalité, nous sommes totalement dans la moyenne sur le même type de sociologie, c'est important. Il faut tirer la sonnette d'alarme, cependant sur le quartier le plus proche des usines, nous sommes sur les mêmes chiffres que sur les autres quartiers de ville en France."

Paul Satis : Y a-t-il une inertie des pouvoirs publics sur ces pollutions aux PFAS ?

" Clairement ! Ça fait 10, 15 ans, 20 ans qu'il y a des rapports qui sortent sur le bureau des différents ministères, des organismes d'État pour dire "attention, danger. Il y en a trop. Il pourrait y avoir des impacts sur la santé" et personne n'a bougé. Des mesures sont prises depuis le documentaire (de France 2), il y a quelques mois. Ça veut dire qu'on aurait pu le faire avant. Ça veut dire que l'industriel aurait pu, depuis des années déjà, limiter sa production et l'utilisation des perfluorés. Ça veut dire que l'Etat aurait pu forcer l'industriel à le faire depuis bien plus longtemps. Pourquoi avoir attendu finalement la mise en avant médiatique de cette histoire ? "

Paul Satis : Arkéma, Daikin Chemical sont des acteurs industriels importants, ce sont des emplois, ce sont des revenus induits pour la commune, peut-on se passer de ces industriels ? 

" Pour moi le plus important, c'est la santé. Après, bien sûr, il y a d'autres perspectives à avoir en tête, mais la priorité des priorités, c'est la santé des habitants. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la mairie de Pierre-Bénite a tout de suite porté plainte. Et j'espère bien pouvoir emmener avec moi l'ensemble des maires du sud de la métropole pour ce qu'on appelle une class action (action de groupe). Je pense que les communes doivent porter une action collective. Chaque fois que nous avons posé la question à l'industriel, il nous a été répondu qu'il n'y avait AUCUN perfluoré dans l'air. C'est pour cela que je dis : quelqu'un a menti et il faut porter ses responsabilités aujourd'hui. Qui dépollue ? Le pollueur, l'État, il me semble ! Et qui finance tout cela ? Demain, je veux que les habitants du sud de la métropole puissent consommer les œufs de leur poulailler."

La mairie demande à l’État une étude d’imprégnation des habitants du Sud Lyonnais à mettre en comparaison avec des habitants d'autres périmètres. 
L'édile déplore une fin de non-recevoir de la part de l’État. La métropole a décidé de lancer une grande étude qui prendra cependant 3 ans minimum. 
Pour le maire de Pierre-Bénite, la priorité est que chacun endosse ses responsabilités.

Enquêtes de région - Polluants éternels : un poison en héritage, présenté par Julien Le Coq, diffusé sur France 3 Auvergne-Rhône-Alpes ce mercredi 7 juin 2023.