Face à la flambée du prix de l'énergie, les stations de ski, à l'arrivée de la saison hivernale, étudient plusieurs scénarii : l'augmentation du prix du forfait, la réduction des horaires d'ouverture, mais pas seulement.
"Les loisirs des uns, c'est le travail des autres, pas moins de 100 000 emplois. Et en montagne, l'électricité, ce n'est pas comme la moutarde, c'est une énergie stratégique, essentielle notamment aux remontées mécaniques." Voilà, en quelques mots, le tableau dressé par Laurent Reynaud, délégué général des Domaines skiables de France (DSF), invité du 12/13 de France 3 Alpes ce mardi 27 septembre.
Le congrès annuel de DSF s'ouvre jeudi prochain à Lyon, et l'ordre du jour, évidemment, est quasi exclusivement consacré au coût de l'énergie. "Nous ferons notre part de sobriété, mais nous espérons en contrepartie un blocage ou un plafonnement des prix, déclare Laurent Reynaud qui décrit l'enjeu économique de la situation. Il espère, "comme tous les citoyens et entreprises, un accompagnement pour franchir ce cap". Telle sera leur demande à la ministre du Tourisme qui est attendue vendredi à Lyon.
Au tout début du mois, plusieurs stations avaient tiré la sonnette d'alarme, redoutant de devoir remettre en question leur ouverture à la saison prochaine. A quelques mois du lancement de la saison, plusieurs d'entre elles s'interrogent : seront-elles en capacité d'ouvrir ?
En France, environ 70 % des stations de sports d'hiver renégocient leur contrat triennal avec les fournisseurs d'énergie cet automne. De fait, le prix du mégawattheure a quasiment été multiplié par 20. De l'ordre de 55 euros l'année dernière, le mégawattheure affiche désormais entre 800 et 1 000 euros
Car après la crise du Covid, l'année 2021 était la première saison de réouverture "à peu près normale", et voici se profiler une nouvelle année noire : "Tout le monde le sait, les prix vont flamber. Dans une industrie comme la nôtre, qui utilise 3 à 5 % d'énergie, c'est l'électricité qui fait tourner les remontées. Alors quand on passe du simple au triple, jusqu'à 10 voire 20 % du chiffre d'affaires, l'impact est brutal pour notre modèle économique et toutes nos entreprises, qu'elles soient grandes ou petites, publiques ou privées."
Pas de fermeture mais des solutions mises bout à bout
"C'était déjà l'un des éco-engagements que nous avions pris à Grenoble en 2020", avec une conduite plus économe des remontées, la mise à l'arrêt de celles qui sont redondantes, le ralentissement des remontées hors période de pointe. "Bref, une accumulation de mesures sans impact pour le client qui ne se rendra pas compte, par exemple, que le télésiège débrayable tourne à 4 mètres seconde et non plus 6 mètres seconde. Il s'agit d'un ensemble de petits changements qui doivent nous permettre de réaliser a minima 10 % d'économie", rassure Laurent Reynaud qui annonce que "ce cap difficile devrait se franchir sans fermeture, mais grâce à plusieurs solutions mises bout à bout".
A vrai dire comme en plaine, les opérateurs publics, les mairies, les gestionnaires des domaines skiables, n'auront guère le choix. Tout comme les commerçants ou les restaurateurs, sous peine de recevoir des factures vertigineuses qui les mettraient en péril, insiste Laurent Reynaud qui ajoute : "Même le client devra ne pas chauffer son logement à plus de 20 degrés, vacances ou pas vacances."
Aux Ménuires, en Savoie, la mairie elle aussi va veiller cet hiver à la "sobriété". "Cela fait déjà des années, assure à France 3 Alpes Charlène Giacometti, la directrice de l'office du tourisme, que l'on a réduit l'éclairage public la nuit. Mais l'on va réduire aussi, c'est acté, l'éclairage parfois trop opulent des illuminations de Noël, en tâchant de faire moins mais mieux".
D’autres mesures, comme l’arrêt du ski de nuit, sont aussi envisagées. "On va éviter le ski de nuit, c’est une certitude, et on va mettre en œuvre tous les moyens pour faire 10 à 20 % d’économies sur le fonctionnement habituel. On est capable de le faire", assurait à France 3 Alpes Jean-Luc Boch, président de l’Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM).
Une hausse des tarifs de forfaits de ski quasiment "inévitable"
Dans tous les massifs et dans toutes les stations, il faudra donc réduire la voilure, mais difficile de ne pas répercuter les coûts sur les tarifs des forfaits. Les barèmes ne sont pas encore fixés partout. Aux Ménuires, station qui enregistre un taux record de réservations (+40 % par rapport à l'an dernier), on affirme avoir fixé une limite : ne pas augmenter les tarifs de plus de 10 %. Ce qui ferait tout de même 30 euros de plus à payer par personne pour six jours. En famille, à plusieurs, la glisse s'annonce tout de même un peu plus salée.