Depuis ce dimanche 28 mai, le plafond annuel d'abattage des loups est atteint. Les éleveurs n'ont désormais plus le droit de tirer en cas d'attaque. Jusqu'à fin juin. D'ici là les moutons vont monter aux alpages. Nicolas Hulot le nouveau Ministre de l'Ecologie relèvera-t-il le plafond ?
Les éleveurs sont inquiets : dans la Drôme, ils sont 120 à posséder un droit au "tir de défense", qui leur permet de tuer un loup en cas d'attaque sur leurs troupeaux. Mais ils doivent respecter un certain "plafond d'abattage" fixé nationalement pour l'année en cours.38 loups en 2016-2017. Or le 38ème et dernier loup a été abattu à Romeyer dans le Haut-Diois ce dimanche 28 mai.
Sans un arrêté du nouveau Ministre de l’Ecologie, Nicolas Hulot, pour relever ce plafond, les éleveurs ne peuvent donc plus utiliser leur "droit au tir"... jusque fin juin. Un mois seulement, mais les troupeaux montent traditionnellement en estive, dans les alpages, vers le 21 juin. C'est un gros réservoir de proies potentielles pour les loups. La période est très sensible.
Notamment en Savoie, et particulièrement en Maurienne. Nous y avons rencontré un éleveur, Maurice Girard, à St-Colomban-les-Villards. Il affirme que le loup lui a causé la perte de 166 bêtes en 2016.
Intervenants : Jacqueline Dupenloup, maire de St Colomban des Villards, Maurice Girard, éleveur de brebis
L'ASPAS, Association nationale pour la Protection des Animaux Sauvages, basée justement dans la Drôme, craint que Nicolas Hulot autorise une deuxième rehausse du plafond annuel.
Le 19 avril dernier, Ségolène Royal, alors Ministre de l'Environnement, avait pris un arrêté autorisant l'abattage de 2 loups supplémentaires jusqu'à fin juin, en plus des 36 spécimens déjà tués en neuf mois. Cet arrêté avait été contesté par les associations de défense du loup, dont l'ASPAS, One Voice, SFEPM, Ferus.
Et Ségolène Royal avait aussi préparé un deuxième arrêté, autorisant encore 2 abattages supplémentaires. "Nicolas Hulot n'a plus qu'à signer !" redoute Madline Reynaud, directrice de l'ASPAS.
Elle rappelle que dans le total "officiel" des 38 loups, ne sont pas pris en compte les animaux tués par collision avec un véhicule. Or, "souvent, en cas de collision, on peut retrouver à l'autopsie des traces de poison. Dans ce cas, c'est du braconnage ". L'ASPAS totalise de son côté, non pas 38 loups tués mais 47, pour cette saison en France. Dont 3 dans les Hautes-Alpes, 2 dans les Alpes de Haute-Provence, 1 dans la Drôme, 1 en Isère. Certains sont encore en cours d'autopsie, au Laboratoire Vétérinaire de Grenoble.
Les loups menacés d'extinction en France ?
L'association rappelle pourtant que l'expertise scientifique commandée par le Ministère, et publiée en mars dernier, conclut que les tirs de loups autorisés par l’Etat pourraient s'avérer trop nombreux pour maintenir une population stable ou en croissance.
On peut lire précisément dans le rapport : "La « cassure » observée dans la courbe d’évolution des effectifs correspond dans sa temporalité au changement de politique de gestion de l’espèce, une politique qui a vu depuis 3 ans le nombre réalisé de prélèvements dérogatoires passer de quelques individus à presque une quarantaine chaque année. Si cette politique devait entrainer une stabilité des effectifs, elle induirait l’impossibilité d’atteindre les objectifs de viabilité génétique à long terme au sein du seul territoire français."
« On est dans la zone critique, reconnaît Yvon Le Maho, écophysiologiste (Université de Strasbourg-CNRS), qui a présidé l’expertise collective. L'expert, cité par Le Monde, ajoute : "Si les données de 2017 confirment la stabilité de la population cela signifierait qu’on ne pourrait pas tuer davantage de loups, sauf à remettre en cause la viabilité de l’espèce. »
Une population de 300 loups
Selon les estimations de l'ONCFS, la population française de loups avoisine un total d'environ 300 individus ces dernières années. L'ONCFS a dressé une carte de répartition.
Parmi les 38 loups abattus depuis juin 2016, 14 l'ont été dans les Alpes-Maritimes, 7 en Savoie, 5 dans le Var, 4 dans les Alpes-de-Hautes-Provence, 4 dans la Drôme ainsi qu'en Isère et 1 dans les Hautes-Alpes, selon un décompte de la Direction régionale de l'Environnement d'Auvergne-Rhône-Alpes.
Au cours de la période 2016-2017, les départements ayant enregistré le plus de dégâts sont les Alpes-Maritimes (2.959 bêtes), la Savoie (1.780), les Alpes-de-Haute-Provence (1.193), le Var (928), les Hautes-Alpes (777) et l'Isère (709).