Depuis mardi 1er septembre, les livreurs de Uber Eats à Genève sont désormais salariés. Une première mondiale. Des livreurs racontent comment leur quotidien pourrait changer.
Une première mondiale. A Genève, les livreurs qui travaillent pour Uber Eats ne sont plus des travailleurs indépendants, mais des salariés. Le message de la multinationale américaine est parvenu aux quelque 500 "coursiers partenaires", comme Uber Eats les appellent, le mardi 25 août. En réalité, ils sont depuis le 1er septembre, salariés de Chaskis, une entreprise mandatée par Uber.
"Ca m'arrange qu'on soit salariés : on a un salaire fixe, des congés payés et on est pris en charge en cas d'accident, confie Paul, qui travaille pour Uber depuis quelques mois. C'est un pas en avant. Et c'est plus juste comme ça." Ils sont désormais payés 20,65 francs suisses par heure. Certains estimaient leur revenu-horaire à quelque 13 francs suisses.
Le bras de fer a débuté en 2018, lorsque la société s'est installée en Suisse. "Il y avait une violation du droit du travail et du cadre légal en Suisse. La convention collective nationale de l'hotellerie et de la restauration garantit un contrat de travail. Ce n'était pas encore le cas du côté des plateformes", explique Umberto Bandiera, du syndicat Unia, à la manoeuvre lors des négociations.
"On n'est pas dans l'Etat de la jungle"
Le syndicat et les livreurs, "qui nous ont soutenu dans cette bataille", selon Bandiera, ont réussi à faire pencher les jurés tribunal cantonnal de Genève en leur faveur. "Les autorités genevoises ont pris au sérieux ces questions. On est dans un Etat de droit, pas dans l'Etat de la jungle", poursuit le syndicaliste. "C'est une grande avancée."
Julien fait également partie de ces 500 livreurs genevois, qui peut roder à proximité des restaurants à la recherche de courses. Il est plutôt satisfait de cette décision justice. "C'est une grosse satisfaction au niveau de la rétribution de l'heure. C'est déjà un gros pas en avant."
Mais le Suisse reste méfiant. "Après, il faut qu'ils respectent les règles jusqu'au bout et qu'ils s'engagent dans les faits pour rémunérer le travail à sa juste valeur, assurer une couverture sociale des livreurs. Je suis dans le doute." Des doutes partagés par Umberto Bandiera. "On reste loin du travail décent."
Un patron sans visage
D'autant que cette décision de justice n'intervient que dans le canton genevois. "Ici, c'est un laboratoire pour le reste du pays. La bataille est gagnée à Genève, ce n'est pas le cas dans les autres cantons", tempère Bandiera. Nous ne sommes pas parvenus à entrer en contact avec Uber.
L'algorithme d'Uber Eats, "ce patron sans visage" qui met la pression à Julien, Paul, et bon nombre de livreurs suisses et partout dans le monde, n'a en tout cas pas fini de les régir. Et ce, malgré ce nouveau statut.