An taol lagad en breton veut dire "coup d'oeil". C'est surtout une édition d'information en langue bretonne initiée par Fanch Broudic, il y a 30 ans déjà.
Trois questions à Fanch Broudic
Franch Broudic a été le rédacteur en Chef de An Toal lagad puis de la rédaction de France3 Iroise, avant de devenir responsable des émissions en langue bretonne de France 3 Bretagne.
Dans quel contexte est né le journal An Toal Lagad en 1981?
Le premier numéro d'An Taol-Lagad (Le coup d'œil) a été diffusé le 24 décembre 1982 : joli cadeau de Noël pour les bretonnants. Il existait déjà deux chroniques de 3 et 5 minutes dans la semaine. Mais là, c'est le premier vrai journal en langue bretonne, diffusé sous la forme d'un hebdo de 13 minutes à la suite du JT régional en français, à 19 heures 45 à ce moment-là, le vendredi soir.
La création d'An taol-lagad intervient dans le contexte de la libéralisation des ondes qui a suivi l'élection de François Mitterrand comme Président de la République en 1981. Avec la création de RBO à l'été 1982, la radio de service public s'était déjà séparée de FR3 pour devenir une station à part entière sur l'ouest-Bretagne. Une nouvelle dynamique s'était également imposée dans les rédactions des journaux télévisés régionaux. An Taol-Lagad témoignait à sa manière de cette ouverture au bénéfice de l'expression en langue bretonne, en donnant la possibilité aux bretonnants de commenter et de suivre l'actualité en leur langue à la télévision.
En 1992, An Toal Lagad devient un JT quotidien, qu'est-ce que cela a changé. Est-ce qu'il était facile de trouver tous les jours des locuteurs bretons pour l'actualité?
An taol-lagad devient quotidien un peu avant la création de France 3 Iroise en juillet 1992. Il adopte à partir de ce moment-là un format de 5 à 6 minutes. L'édition en langue bretonne de la mi-journée et celle en langue française du soir fonctionnent dès lors en symbiose. Mais au lieu de rendre compte des événements marquants de la semaine comme il le faisait en formule hebdomadaire, An taol-lagad doit désormais refléter l'actualité au jour le jour. Il n'y a pas à ce moment de difficulté particulière pour interviewer des bretonnants en différentes circonstances, que ce soit des agriculteurs ou des pêcheurs bien sûr, mais aussi des élus, des responsables économiques ou des syndicalistes.
Nous avons interviewé plusieurs centaines de personnes chaque année à ce moment-là pour An taol-lagad. L'évolution socio-linguistique de la Basse-Bretagne va cependant s'accélérer et, c'est vrai, le nombre de bretonnants va ensuite diminuer rapidement (mais il y en a encore pas mal !), et l'intérêt pour la langue bretonne se renforcer dans le même temps.
Quel souvenir fort vous reste-il d'An Toal Lagad?
Quand je revois le sommaire des premiers numéros d'An taol-lagad, je suis assez fier des sujets que nous avons traités pour le lancement de ce nouveau rendez-vous. En décembre 1982, on y parlait bien sûr de Noël, mais aussi des difficultés des éleveurs de moutons, des nouveaux aménagements du Cross Corsen, des ardoisières aujourd'hui disparues en centre Bretagne, des marins bretons secourant les Boat People… Sans oublier le portrait de Rafa, un algérien venu en compagnie de son père s'installer dans le sud Finistère et qui avait appris le breton au contact des paysans qu'il fréquentait.
J'ai aussi apprécié de pouvoir tourner quelques magazines - toujours en breton, bien sûr - en dehors de la région, par exemple sur les Bretons de la RATP, très nombreux à cette époque, avec les marins du dernier caboteur breton (basé à Paimpol), ou encore sur les vignerons d'origine bretonne installés en Bourgogne, en Champagne ou dans le Minervois.
D'ailleurs, je suis toujours en contact avec Jean Le Calvez, qui s'était installé dans la petite commune de La Caunette, près de Minerve, dans l'Hérault !