L'annonce de la fermeture du site Alcatel-Lucent de Rennes a été accueillie avec "stupéfaction" par les salariés, selon le délégué du personnel CFDT Pierre Ketels, devant l'entrée du bâtiment où travaillent quelques 110 personnes. Les salariés rennais ont décidé de ne pas travailler aujourd'hui.
"On a des plans sociaux à répétition depuis 10 ans et on a l'impression de ne jamais pouvoir travailler sans avoir ce poids", a déclaré cet ingénieur en télécoms qui a déjà vécu en 2007 la fermeture du site de Cesson-Sévigné, près de Rennes. Mais "ce plan va être pire, avec des licenciements coercitifs. La France paie encore un très lourd tribut" avec 900 suppressions de poste sur les 10.000 annoncées dans le monde", a-t-il ajouté. Pour les salariés de Rennes, l'annonce de la fermeture du site est d'autant plus mal vécue que leur unité fabrique des produits pour la 3G et la 4G. "On est sur des produits de la nouvelle stratégie de la direction", a-t-il fait valoir.
Salariés écoeurés
Williams Tovar manager d'une équipe de développement, qui dit avoir appris la nouvelle à la télévision lundi soir, a réagi mardi matin: "je suis écoeuré, j'ai pas les mots". "On craignait que le site soit supprimé, on a toujours l'espoir que ça se fasse pas, c'est dur", a-t-il dit. Le site de Rennes est dédié à l'ingénierie, le développement télécom. Il emploie à plus de 90% des ingénieurs, selon la CFDT. La succession des 5 plans de suppressions d’emplois depuis 2006 n’a pas amélioré la situation financière du groupe. En quoi un 6ème plan améliorerait la situation? se demande la CGT. Au total, 113 salariés travaillent sur le site rennais.
"Rennes n'a plus la taille critique"
Sur les treize sites qu'Alcatel-Lucent possède en France, il compte en garder huit dont celui de Villarceaux en région parisienne "qui deviendra le premier centre de R & D d'Alcatel-Lucent en Europe", et celui de Lannion, "un des sites historiques du groupe", a indiqué le patron d'Alcatel-Lucent, Michel Combes au Monde. "Nous serons malheureusement amenés à fermer deux sites: l'un à Toulouse (Haute-Garonne) et l'autre à Rennes (Ille-et-Vilaine). Compte tenu des choix faits par le passé, ils n'ont plus la taille critique", a-t-il assuré. Ces deux sites "ne permettent ni de maintenir un niveau d'activité suffisant ni de donner aux collaborateurs des perspectives d'évolution correctes lorsque le développement d'une technologie s'arrête", a-t-il ajouté. Concernant les trois derniers sites, selon M. Combes, "des discussions sont engagées pour faciliter l'arrivée de partenaires industriels". Pour le site d'Orvault en Loire-Atlantique, l'équipementier projette de "créer un campus digital avec l'ouverture du site à de nouvelles activités et investisseurs afin d'y pérenniser l'emploi".
"La direction générale a la main lourde, très lourde" selon la CFDT
D'après la CFDT, selon leur activité, les salariés concernés se verraient proposer une mutation vers Villarceaux (91) ou Lannion (22), une mobilité interne ou externe viale PSE ou une cession à un repreneur. Le syndicat estime que "c’est précisément maintenant qu’un industriel des télécommunications doit se renforcer en Europe. Faute de quoi, les concurrents américains ou chinois prendront les places laissées vides". La CFE-CGC s'insurge contre un "véritable tsunami social"' même si elle dit pouvoir "comprendre la logique économique du groupe visant à se recentrer" et "en appelle au gouvernement pour infléchir" les décisions du groupe.
Une manifestation est prévue à Paris le 15 octobre, les salariés rennais s'y rendront.