Tanit : la misère en Somalie au coeur de la première journée de procès

Trois jeunes Somaliens, accusés de piraterie, pour la prise d'otage en avril 2009 sur la Tanit, voilier breton, comparaissent depuis ce lundi devant la Cour d'Assises de Rennes. Une première journée pour présenter les trois inculpés. La défense insiste sur la misère qui règne en Somalie.

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J'ai eu la malchance de naître en Somalie, si j'étais né en France, je serais quelqu'un d'autre, je serais médecin ou pilote


ce sont les mots de Mahmoud Abdi Mohammed, l'un des trois inculpés présents dans le boxe des accusés. Lors de cette première journée, la vie de ces trois hommes est présentée, détaillée, dans leur quotidien, leur enfance, leur difficulté à vivre de leur travail dans leur pays, la Somalie. Tous les trois décrits comme analphabètes, étaient pêcheurs, avec des périodes plus ou moins fastes. Ils pêchent la langouste ou du poisson, parfois pour l'exportation vers les Emirats. Mais quand la ressource se raréfie, il n'y a plus rien pour faire vivre les familles entières. Les avocats de la défense insistent sur cette misère, le pillage des eaux somaliennes par de gros bateaux de pêche étrangers, les déchets toxiques détruisant l'environnement.

Pour les parties civiles, on s'éloigne de la prise d'otage

Cette ligne de défense agace l'avocat des parties civiles, Maître Arnaud Colon de Franciosi : "La misère y'en a dans le monde entier, et il n'y a pas de piraterie partout", et pour lui on s'éloigne de l'affaire. Une position que rejoint Francis Lemaçon, le père de Florent, le skipper décédé lors de cette prise d'otage, par une balle des militaires français qui ont donné l'assaut pour les libérer. "Ce que j'attends, c'est l'expression de la vérité. Il faut raconter le voyage de Tanit." Il souhaite, avec ce procès pouvoir réhabiliter la mémoire de son fils, salie depuis la prise d'otage :

Florent est un marin confirmé, un vrai voyageur, passionné. C'était pas un aventureux, un aventurier, certes !



Deux des trois Somaliens sont incarcérés aujourd'hui, le troisième Mohamed Mahamoud a été libéré en juin 2009 et placé sous contrôle judiciaire. Il vit depuis au sein de la communauté Emmaüs de Rédené dans le Finistère. Des témoins vont se succéder pour rappeler ses efforts pour apprendre le français et pour s'insérer. La directrice de la communauté décrit à son arrivée "quelqu'un de timide, de renfermé. Il a retrouvé de la confiance. Le travail lui a permis de retrouvé de la dignité". Un autre témoin assure qu'aujourd'hui "il a pris conscience que pour nous les faits sont graves et pour lui j'ai le sentiment que ça l'est devenu aussi."
Mahmoud Abdi Mohamed dira même lui "Je ne savais pas qu'on me demandait de participer à un acte de piraterie", ce que Maître Arnaud Colon de Franciosi met en doute en rappelant que c'était tout de même la seconde fois et que les sommes qu'ils recevaient pour ce genre de travail étaient assez énormes.

La prise d'otages a lieu en avril 2009

Florent, Chloé et leur fils Colin avaient quitté Vannes fin juillet 2008 à bord du voilier de 12,50 m pour rejoindre Zanzibar, dans l'Océan indien. Au moment de leur capture par les pirates somaliens, deux autres équipiers se trouvent à bord. L'opération des commandos français pour libérer les otages se solde par la mort de deux pirates embarqués ainsi que par celle de Florent Lemaçon.
Les trois Somaliens, arrêtés par les forces françaises, comparaissent jusqu'à vendredi pour "détournement de navire par violence ou menace, arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire de plusieurs personnes commis en bande organisée".
 

Le reportage à Rennes (35) d'Adélaïde Castier et Vincent Bars


Interviews :
- Maître Arnaud Colon de Franciosi, Avocat des parties civiles
- Francis Lemaçon, Père de Florent Lemaçon
- Maître Ronan Appéré, Avocat de la défense


 

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