Après plus de 10 ans d'enquête, le non-lieu vient d'être rendu dans l'affaire du naufrage du chalutier breton, le Bugaled Breizh. Les parties civiles ont déjà précisé qu'ils font appel de cette décision et qu'ils vont lancer une procédure judiciaire en Grande-Bretagne.
Les familles des cinq victimes du chalutier breton le craignaient depuis plusieurs mois. Une ordonnance de non-lieu a été rendue ce mardi matin par les juges en charge du dossier du naufrage du Bugaled Breizh. Un réquisitoire de non-lieu avait été transmis le 25 mars dernier aux juges d'instruction par le parquet de Nantes.
Dans son ordonnance de non-lieu, le juge Robert Tchalian, tout en admettant qu'il n'est pas possible d'écarter définitivement l'hypothèse de la croche par un sous-marin, relève que cette hypothèse n'a pu être étayée par "des investigations multiples, complexes et minutieuses" et qu'en l'absence d'éléments véritablement nouveaux et suffisamment caractérisés, il n'y a plus lieu, désormais, de poursuivre l'enquête".
Les réactions à l'ordonnance de non-lieu :
- Michel Douce, armateur du Bugaled Breizh
- Robert Bougeon, Vice-Président de la Caisse des périls en mer du quartier du Guilvinec
Les parties civiles font appel
L'avocat de Michel Douce, l'armateur du chalutier, a tout de suite confirmé qu'il ferait très rapidement appel de cette décision. Pour Me Michel Kermarrec, "il y a collusion entre le parquet et l'instruction".Me Dominique Tricaud, l'avocat de Thierry Lemétayer, le fils du mécanicien du Bugaled, a qualifié la décision des deux juges nantais de "recul stupéfiant". Il a précisé qu'il ferait appel de cette décision de non-lieu devant la chambre d'instruction de la cour d'appel de Rennes dès mercredi.
"Cela fait plus de 6 ans que le juge d'instruction dit aux familles qu'il est établi que le naufrage a été causé par un sous-marin. Six ans plus tard, ils font un recul en arrière stupéfiant pour dire qu'on ne connaît pas la cause du naufrage", a regretté Me Tricaud, en estimant que cette décision est "une insulte à la mémoire des victimes".
Dominique Tricaud, invité du 19/20 de France 3 Bretagne a précisé que les parties civiles ont lancé une procédure judiciaire en Grande-Bretagne avec leurs avocat anglais.
10 ans d'enquête
Les familles des cinq victimes se battent depuis près de 10 ans pour connaître la vérité. Elles en sont convaincues : c'est un sous-marin qui a envoyé le bateau par le fond, accrochant son chalut alors qu'il était en pêche. Ce 15 janvier 2004, jour où le chalutier de Loctudy (29) coulait en 57 secondes, plusieurs submersibles croisaient pour un exercice de l'OTAN dans la zone de naufrage, entre le Cap Lizard et le Finistère.L'épave sera renflouée en juin 2004, 5 mois après le naufrage. Mais le volumineux dossier peine à aboutir, d'experts en nouveaux juges d'instruction. De l'hypothèse de la "croche" dans le fond sablonneux évoquée par un rapport du BEA-Mer, l'enquête s'est ensuite resserrée autour de la piste d'un sous-marin anglais le "Turbulent".
Depuis 10 ans, les familles des pêcheurs se battent contre des secrets d'Etat, mais les procédures judiciaires ne mènent nulle part. En octobre dernier, les juges nantais décident de mettre fin à l'enquête. Début janvier, les parties civiles demandent des actes complémentaires. Une requête refusée. Le non-lieu se profilait depuis plusieurs mois à grand pas et semblait inévitable. Rappelons que la décision de non-lieu correspond à l'abandon de l'action judiciaire en cours de procédure par le juge d'instruction. Elle est prise lorsque les éléments rassemblés par l'enquête ne justifient pas une action plus avant.
Retrouvez toutes les étapes et rebondissements importants de cette enquête dans cette frise chronologique :