La Bretagne pourrait se brancher sur l’éolien irlandais et se passer de la centrale à gaz prévue à Landivisiau (29). Le Préfet ne l’entend pas de cette oreille et a enjoint RTE, filiale d’EDF, de stopper son étude de faisabilité pour ne pas parasiter la construction de la centrale.
« Le lancement de telles études risque d’être perçu comme un mauvais signal pour l’avenir de la centrale de Landivisiau », écrit Patrick Strzoda à la présidence de RTE, filiale d’EDF, dans un courrier du 24 avril publié hier par Médiapart.
Traduction : le projet de RTE, de brancher la Bretagne sur le courant électrique issu des éoliennes irlandaises, court-circuite le projet de centrale à gaz à cycle combiné porté par Poweo-Direct Energie, et largement soutenu par l’Etat.
Alors l’Etat, représenté par le préfet, prend les devants : « Je souhaiterais a minima qu’aucune étude ne soit menée près des côtes avant les élections régionales. Un tel calendrier éviterait un télescopage avec l’enquête publique de la centrale. » Le lancement des études préliminaires sur le raccordement à l’éolien risquerait, selon la préfecture, de générer de la confusion dans la tête des bretons, déjà opposés à la construction de la centrale et actuellement sollicités dans le cadre d’une enquête publique. EDF n’a pas écouté les injonctions du préfet et a mené ses études de faisabilité l’été dernier.
"Un projet inutile"
Pour Alain Le Suavet, de l’association Gaspare, « le courrier du préfet est une forme de barrage à l’enquête publique ». Ce collectif anti-centrale a publié son propre scénario d’évolution du système énergétique, « beaucoup plus complet et précis que celui de l’Etat », selon Médiapart. Cette alternative au Pacte Électrique Breton, mis en place en 2010 par l’Etat et EDF et qui planifie la construction de la centrale, s’appuie principalement sur les interconnexions entre les réseaux européens d’énergies renouvelables. Selon ce rapport, la centrale ne serait pas nécessaire pour assumer les pics de consommation énergétique dans la région.Pour Yannick Jadot, eurodéputé EELV pour l’ouest de la France, interrogé par Médiapart « on est dans un projet totalement délirant, avec une triple incohérence : par rapport aux enjeux de la transition énergétique en Bretagne, par rapport au projet européen d’interconnexion des réseaux électriques et c’est aussi une énorme diversion d’argent public ». Au-delà des incidences sur le climat d'une centrale thermique à gaz, son implantation comporte également des risques environnementaux, notamment à cause de la construction d'un gazoduc de 111 km qui traverserait des zones humides.
Dans son courrier, le préfet reconnaît pourtant que les études préliminaires « montreraient l’intérêt économique d’une telle connexion, bénéfique pour l’alimentation électrique des deux pays et de leurs consommateurs. » Mais seulemeny si cela ne rend pas obsolète la centrale, dont le coût a été estimé à 800 millions d'euros sur 20 ans.