Après la colère exprimée par les agriculteurs ces derniers jours, la Mutualité sociale agricole (MSA), va lancer un numéro d'écoute pour les agriculteurs en détresse. Elle estime que "la vigilance s'impose" particulièrement pour les mois à venir compte tenu des difficultés de certaines filières.
La colère s'est exprimée ces dernières semaines, notamment dans les filières fruits, légumes et élevage bovin, face à des cours qui s'effondrent et des contraintes administratives et environnementales que les agriculteurs jugent trop pesantes. Les légumiers bretons ont notamment incendié un centre des impôts et de la MSA à Morlaix (Finistère). "Sur la fin 2014, la vigilance s'impose car on voit bien les difficultés", a expliqué Michel Brault, directeur général de la Caisse centrale de la MSA, lors d'une conférence de rentrée.
Bien qu'il soit difficile d'établir un "lien de cause à effet" entre une crise dans une filière et le suicide, "dès qu'on sent qu'une difficulté plus importante survient (économique, aléas climatiques), on envoie un courrier aux adhérents pour les inciter à parler", a poursuivi Gérard Pelhâte, président de la MSA.
Un numéro d'appel "agri'écoute
Et comme le suicide est la troisième cause de mortalité chez les agriculteurs après les cancers et les maladies cardiovasculaires, la MSA a décidé de mettre en place, dès le 13 octobre, Agri'écoute, un numéro d'appel pour les agriculteurs en difficulté au 09 69 39 29 19.
Ce dispositif complète le plan national d'action contre le suicide adopté en 2011. En 2013, les équipes de la MSA ont identifié 838 situations de fragilisation, contre 408 en 2012. L'augmentation d'une année sur l'autre n'est pas le signe d'une détresse accrue, mais est imputable au déploiement du dispositif à l'ensemble du territoire. Les "situations détectées" ont concerné à 75% des hommes et à 38% des 45-54 ans, la "tranche d'âge la plus représentée".
"La MSA a un rôle à jouer dans ces crises"
S'agissant de l'incendie d'un centre MSA en Bretagne, le président de la Mutualité, qui n'avait pas réagi, a parlé d'un acte "touchant" et "agressif". Mais pour autant, pour lui, le lien de confiance avec la profession agricole n'est pas rompu: "les organisateurs n'ont pas forcément pensé à la réalité de ce que pensent leurs collègues", a jugé Gérard Pelhâte.
La MSA a un grand rôle à jouer dans ces crises puisque c'est elle qui permet des exonérations ou des reports de cotisations sociales aux exploitants agricoles. Pour 2014, elle dispose d'une enveloppe de 110 millions d'euros. "Quelques centaines de dossiers" de légumiers bretons seront aidés, précise la MSA mais il y a aussi "beaucoup de demandes ailleurs" et notamment dans l'Hérault où les agriculteurs sont touchés par les inondations.
Un suicide tous les deux jours chez les agriculteurs
Un suicide tous les deux jours a lieu chez les agriculteurs, une des populations les plus exposées. Selon les deniers chiffres disponibles, près de 500 suicides ont été enregistrés par l'Institut de veille sanitaire (InVS) entre 2007 et 2009. Des données qui confirment "clairement un excès de mortalité par suicide chez les exploitants agricoles masculins de 20% supérieur à celui de la population générale française", insiste l'InVS.