"Une provocation pour faire avancer le débat". Des maires mettent en demeure l'Etat d'agir pour la santé et sont convoqués par la justice

Les élus de cinquante-sept communes des Côtes-d'Armor ont pris, ces derniers mois, des arrêtés municipaux pour exiger de l'État qu'il instaure un plan d'urgence d'accès à la santé. En réponse, le préfet du département a saisi, en référé, le Tribunal administratif de Rennes, pour suspendre ces arrêtés municipaux. Le Tribunal se réunit, ce mardi 3 septembre, pour examiner la légalité de la procédure concernant quinze des communes contestataires.

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Dans les Côtes-d'Armor, ce sont au total 57 communes qui ont pris l’arrêté que conteste la préfecture, selon le décompte des services de Guingamp-Paimpol agglomération, qui centralisent les informations sur cette action des maires. "Et 72 dans la France entière", se réjouit l'agglomération de Guingamp. "L’initiative s’est étendue jusque dans les Alpes-de-Haute-Provence."

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"Des hôpitaux publics de plein exercice accessibles H24"

Il y a quatre mois, des maires des Côtes-d'Armor ont signé, les uns après les autres, des arrêtés enjoignant l'État d'agir pour la santé et de doter les hôpitaux publics du département en "personnels et en moyens", sous peine d'une astreinte de 1000 euros par jour et par commune.

Les élus municipaux justifient leur action en précisant, dans le modèle d'arrêté municipal que nous avons pu consulter, qu'ils entendent "répondre aux troubles à l'Ordre public suscités par une offre sanitaire manifestement insuffisante pour garantir l'égalité d'accès aux soins des administrés". En résumé, les maires s'appuient sur leur rôle de police pour demander des moyens, notamment pour garantir "des hôpitaux publics de plein exercice accessibles H24".

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Qui n'est pas étonné quand on nous explique que tout va bien, alors que les services hospitaliers, chez nous, ferment les uns après les autres, et alors que les gens n'ont plus de médecin traitant ?

Sylvain Camus

Maire de Ploulec'h

Demande d'annulation par le préfet

Après la prise de chaque arrêté, le préfet des Côtes-d'Armor avait deux mois pour agir et éventuellement attaquer les arrêtés au tribunal. Au cœur de l’été, les arrêtés de six communes sont parvenus à passer ce délai, sans être attaqués. 

Lors de l'audience au Tribunal administratif, le représentant de l'État a assuré que "si la situation de la santé dans le département est perfectible, il y a une stratégie territoriale pour l'égalité d'accès aux soins". Il a précisé qu'entre 2021 et 2025, plus de 2 000 médecins auront été formés par les universités de Brest et de Rennes.

"Cela permettra d'affecter plus de médecins dans le département, même si tous ne resteront pas", a assuré le fonctionnaire, déclenchant les rires jaunes des élus locaux présents dans la salle. 

Treize autres arrêtés, dont ceux de Plouha, Pontrieux ou encore Coatréven, seront pour leur part examinés par une autre magistrate le 12 septembre 2024. Les deux décisions seront ensuite communiquées, vraisemblablement le lendemain de cette seconde audience

Dignité de la personne humaine

L'une des questions juridiques soulevées par la démarche des maires restent en suspens. En effet, dans leurs arrêtés municipaux, les édiles s'appuient sur un arrêt du Conseil d'État qui indique que "le respect de la dignité de la personne humaine est une des composantes de l'ordre public" (CE, octobre 1995, Commune de Morsang-sur-Orge). Ils estiment ainsi que l'accès difficile aux soins dans certains territoires des Côtes-d'Armor porte atteinte à la dignité de la personne humaine, et donc à l'ordre public.

À l'audience, l'avocat des maires a reconnu que leur initiative "avait un côté provocateur" mais qu'elle avait "le mérite d'initier le débat".

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