C’est un peu plus qu’une simple querelle de voisinage. Dans les Côtes d’Armor, un habitant de Trégastel veut se construire un garage. Ce qui ne plait pas à sa voisine, en l’occurrence sa sœur, qui compte bien conserver sa vue sur mer. L’affaire de famille vient de passer au tribunal.
Le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté par lequel le maire de Trégastel (Côtes-d'Armor) avait fait savoir à un habitant du chemin de Quo Vadis qu'il ne s'opposait pas à la construction de son garage.
Le juge des référés de cette même juridiction avait à vrai dire déjà suspendu le 2 décembre 2022 cet arrêté, qui avait été contesté en justice par la propre sœur et voisine du bénéficiaire.
Cette dame avait fait valoir au juge des référés qu'elle allait avoir "une vue directe" sur le garage surmonté d'un grenier envisagé par son frère, d'une surface au sol de 40 m². "Eu égard à cette proximité et compte tenu de l'implantation du projet en litige, (...) Mme X. justifie qu'elle aura une vue directe sur la construction et que celle-ci est de nature à affecter les conditions de jouissance et d'occupation de son bien", confirme sur ce point le tribunal administratif de Rennes.
Cette riveraine de la plage de Tourony s'était également inquiétée, au stade de la procédure de référé-suspension, de ce que le projet de son frère allait "supprimer 70 % de sa vue sur mer" sur ce "site exceptionnel". Elle redoutait aussi une perte d'ensoleillement le matin sur une partie de sa propriété.
La commune devra payer des frais de justice
Dans un jugement en date du 13 mars 2023 qui vient d'être rendu public, le tribunal administratif de Rennes pointe d'abord un "vice d'incompétence", sur la forme, dans la décision du maire de Trégastel : elle a en effet été signée par son adjoint à l'urbanisme, qui est officiellement habilité pour "l'étude et le suivi des dossiers d'urbanisme" mais "pas explicitement" pour les décisions de "non-opposition" à déclaration préalable de travaux ou encore pour les permis de construire...
Sur le fond, le tribunal administratif de Rennes rappelle que toute "construction nouvelle" doit être précédée de la délivrance d'un permis de construire, et non pas d'une simple "non-opposition" à déclaration préalable de travaux.
Or, le garage de Philippe X. va être accolé à sa maison par un passage couvert et ouvert aux deux extrémités sud et nord. Ce "simple auvent" fait donc du garage une construction "distincte" de la maison du bénéficiaire.
"Ces bâtiments ne présentent aucun accès intérieur de l'un et l'autre", soulignent les juges rennais. Il ne s'agit donc pas d'une "extension de la construction existante". Fanny X. est donc "fondée à soutenir" que la construction relevait de la demande de permis de construire : le maire a donc commis "une erreur de droit". Les juges ont également estimé qu'il y avait lieu de condamner la commune à lui verser 1.500 € pour ses frais de justice.
Philippe X., lui, va donc devoir revoir ses plans et déposer cette fois-ci une demande de permis de construire. Elle devrait pouvoir aboutir dans la mesure où "aucun des autres moyens invoqués" par sa sœur n'est "de nature, en l'état de l'instruction, à justifier l'annulation de l'arrêté en litige" précise le tribunal administratif de Rennes.
SG/GF et CB (PressPepper)