Le patron d'une boucherie à Lannion a disparu du jour au lendemain. Ses salariés se retrouvent depuis, sans aucune ressources. Un restaurateur qui devait aussi faire affaire avec lui n'a pas vu la transaction aboutir et s'est retrouvé en difficulté.
La boucherie de Lannion, place du Miroir, se retrouve portes closes, depuis le 27 octobre. Les deux salariés ont dû s'y résoudre. Alors qu'il était supposé être parti en congés, leur patron n'est jamais revenu et n'est pas joignable. L'ex-compagne de ce dernier a signalé sa disparition. Arrivé de Montpellier, il avait repris ce commerce depuis un an.
Aurore, employée à la boucherie depuis douze ans, dit se sentir "paumée". Avec son collègue, elle s'est bien rendue compte que quelque chose clochait. "Les fournisseurs ne voulaient plus nous livrer car il ne payait pas. On recevait plusieurs coups de fils depuis avril, mai". Fin octobre, c'est leur salaire qui n'arrivera pas. Impossible pour eux de continuer à faire tourner la boutique, la loi ne les y autorise pas, pour des questions d'assurance. "Et sans trésorerie, ça ne peut pas marcher", dit Aurore.
Elle se retrouve aujourd'hui sans ressources. "On n'a pas le droit au chômage, on n'est pas licenciés, on ne peut pas chercher un autre travail car notre contrat n'est pas rompu. Mon collègue a acheté une maison au mois de juin donc c'est très compliqué", explique-t-elle.
"Il n'avait pas de comptable sur place, il était un peu fouillis mais on n'aurait jamais pu se douter de ce qui allait arriver" ajoute-t-elle. Avec l'autre salarié, ils ont porté plainte début novembre, pour abus de confiance.
Un rachat de crêperie avorté
Wilfrid Corbion, lui aussi en a après cet homme. Il possède la crêperie "Le Toulao" et devait la lui céder. "Il nous a approché en mars dernier, pour racheter le fond de commerce. On avait une promesse écrite même si pas notariée. On devait conclure une vente en septembre", indique-t-il. Mais dès le début Wilfrid se pose des questions. Les démarches se font par le biais d'un avocat et non d'un notaire. "Les échanges étaient pénibles, il nous demandait des choses au dernier moment comme des diagnostics, qu'on aurait pu faire en amont".
Wilfrid déménage car il habite au dessus du restaurant. Il enlève tout le mobilier de son établissement et le ferme fin août. "Le loyer courait toujours, tout ça a occasionné des frais". Les deux partis finissent par signer un compromis le 8 octobre. Alors qu'un rendez-vous pour la signature définitive est prévu le 22, le futur acquéreur ne s'y présentera jamais. Wilfrid explique que deux jours auparavant, il avait pourtant reçu un appel. L'homme se voulait rassurant, "les crédits étaient ok selon lui, il devait juste partir dans le sud régler des affaires".
Depuis, plus rien, "plus de son, plus d'image". "J'ai compris que tout était en train de s'écrouler", lâche Wilfrid. Selon lui, l'avocate du futur acheteur n'était pas au courant de la date de la signature. Il décide de contacter lui-même l'ex-compagne de l'acquéreur, qui lui dira avoir signalé sa disparition car elle non plus n'avait pas de nouvelles.
A peine une semaine après cette déconvenue, Wilfrid a décidé de rouvrir le restaurant, alors qu'il devait s'embarquer sur un tout autre projet. "J'ai préféré réagir plutôt que subir, j'ai tout réemménagé, refait une carte". Il ne sait pas s'il déposera plainte. Il espère surtout que le mis en cause soit puni, qu'il ne récidive pas. Il se demande aussi comment des démarches ont pu être possibles, surtout si cet homme avait déjà des liquidations ou des ennuis financiers à son actif.
A Lannion, des commerçants ont décidé d'exprimer leur solidarité, notamment à l'égard des deux salariés de la boucherie. Des cagnottes ont été lancées, au bar le Flambard, aux Halles ou encore à l'initiative du magasin de jeux vidéo Dynamite games.
Une enquête a été ouverte à la demande du parquet de Saint-Brieuc, confiée au commissariat de Lannion pour déterminer "le contour de la faute, et si elle dépend d'un tribunal correctionnel, commercial ou d'une autre juridiction" indique Daniel Kerdraon, commandant divisionnaire à Lannion. Et de préciser que la situation géographique de cet homme est à ce jour connue des autorités.
Sollicitée, son avocate n'a pour l'instant pas donné suite à nos messages.