Il aura fallu attendre sa mort et la ténacité d’un collectionneur de Saint-Brieuc pour que son œuvre soit dévoilée aux yeux du public. Une rétrospective à la collégiale de Lamballe rend hommage à Marcel Dirou, artiste inconnu.
Il n’a jamais soufflé mot à quiconque de sa passion du dessin. Dans la solitude de son petit appartement de Lamballe, Marcel Dirou n’a cessé de peindre. La nuit. Des milliers de portraits à l’encre, au fusain, à l’huile…Une galerie impressionnante de visages. Aux traits tourmentés. 2500 esquisses et peintures, sans titres, toutes signées.
Le jour, Monsieur Dirou est professeur de Français au lycée Henri-Avril de Lamballe. Cultivé, avenant, il discute facilement avec ses élèves ou ses collègues. Sans jamais créer de lien personnel. Santiags, jean, blouson de cuir, une démarche lente, une voix de stentor, dans un nuage de fumée… "V’là le cow-boy" disent ses collégiens. Un professeur qui aime le cinéma, les romans noirs et la littérature. Un homme d’une discrétion inoubliable qui ne figure sur aucune photo de classe, sur aucun cliché. En retraite à partir de 2002, Marcel Dirou vit entre Carantec et Lamballe. Il meurt en 2009 à 67 ans.
La surprise de la succession
Le commissaire-priseur chargé de la succession découvre alors un appartement minimaliste. Un lit, une table, une chaise… Et à sa grande stupéfaction, un atelier d’artiste. Des dizaines de toiles posées par terre les unes contre les autres. Des centaines de dessins classés soigneusement dans des pochettes Canson. Des tubes de peinture et des boîtes de pastel rangés dans des boîtes de cigarillos. Rien sur les murs. Aucune décoration. La sobriété des lieux n’a d’égal que la profusion artistique à même le sol.
On ne peint pas 2500 oeuvres comme ça, à travers ces tableaux, il y a toute une histoire
Perplexe, Maître Guichard met en vente aux enchères un premier tableau à un prix modeste. Intrigué par la profondeur qui émane de cette toile, impressionné par sa maîtrise technique, un collectionneur d’art de Saint-Brieuc l’acquiert sans hésiter. Il se penche sur le destin de ce peintre inconnu. Découvre sa production prolifique si singulière. Très vite Hervé Le Roch décide de devenir le dépositaire de cette œuvre posthume. Au fil des ventes, il achète 2400 dessins et peintures de Marcel Dirou. Il n’a de cesse depuis de faire connaître cet artiste des Côtes D’Armor qui a choisi la clandestinité de son vivant.
Une exposition présente ses oeuvres jusqu’au 20 octobre à la collégiale de Lamballe.