Le festival Photoreporter se tient à Saint-Brieuc jusqu'au 5 novembre, une manière de découvrir le monde, de soulever certains tabous en montrant des choses que la société n'a pas envie de voir, comme les règles féminines. Laïa Abril photographe espagnole a choisi de les exposer.
Dans certaines zones du Myanmar, les sous-vêtements des femmes ne sont jamais lavés avec ceux des hommes. Leurs draps sont étendus, cachés derrière les maisons. Au Burkina Faso, les vêtements sèchent sous les lits, accompagnés d'un sentiment de honte. Dans plusieurs autres pays, les filles s'inquiètent de laisser paraître qu'elles ont leurs règles. En Inde, 28 % des étudiantes ne vont pas en classe pendant cette période. À travers le monde, les croyances et les préjugés ont la vie dure lorsqu'il s'agit d'évoquer ce phénomène naturel.
Le mythe des règles
"Le mythe des règles" est le nom de l'exposition proposée par la photographe espagnole Laïa Abril pendant le festival Photoreporter qui se tient à Saint-Brieuc jusqu'au 5 novembre. Ce travail s'inscrit dans son projet intitulé "Histoire de la misogynie" qu'elle a débuté en évoquant d'abord l'avortement.
Les femmes passent en moyenne 3500 jours à avoir leurs règles au cours de leur vie. Bien souvent, ce cycle est connoté de manière négative. Les femmes ne sont pas égales face à elles. Une majorité ignore totalement ce qui lui arrive, l'associent à une maladie. Certaines cultures stigmatisent ce moment, excluant alors la femme de l'espace publique, ou de certaines tâches.
Le contact avec le flux menstruel des femmes rend le vin aigre, fait dépérir les cultures, tue les greffons, assèche les graines dans les potagers, fait tomber les fruits des arbres, trouble la surface des miroirs, émousse le tranchant de l’acier et ternit l’éclat de l’ivoire, tue les abeilles [...] (Pline l'Ancien, "Histoire naturelle")
Comment montrer ce que les gens ne veulent pas voir ? Et ce que l'on ne voit pas d'emblée ? Contactée par mail, Laïa Abril explique : "Essayer de montrer l'invisible est le dénominateur commun dans mon travail. J'essaie de créer des visuels qui vont déclencher l'intérêt à lire le contexte de l'image. Le spectateur digère alors une information qu'il connaissait déjà un peu, pensant qu'elle appartenait au passé. En essayant de lier les causes aux conséquences, je souhaite éveiller les consciences et aiderà la normalisation ou la déstigmatisation de ce sujet."
L'exposition de Laïa Abril se veut une illustration symbolique des croyances, des peurs, des concepts, autour des menstruations. Pour le festival Photoreporter le choix de son travail s'est imposé. Son "fil rouge" disent les organisateurs sans ironie "est un sujet important. Il faut montrer ce genre de thème, même dans nos pays développés, où l'on se croit en avance là-dessus, alors qu'en y regardant de plus près....Cela touche chaque visiteur."