Les gestes barrières et le confinement ont été synonymes de la fin des cours de danse. A deux ou en solo, les danseurs ne sont pas assurés de pouvoir reprendre, avec le déconfinement, leur activité favorite, lieu d'exercice physique et de sociabilisation.
"Prenez la main de votre partenaire, un pas en arrière. Suivez bien le rythme et tournez." Ces mots ne raisonnent plus dans les salles de danse. Depuis le début de l'épidémie de Covid-19, la danse à deux a fait silence.Les mains qui se tiennent, des contacts rapprochés, de l'exercice physique provoquant très souvent (toujours) de la sueur, impossible ici de respecter les gestes barrières. "Dès l'annonce de la fermeture des bars et restaurants on a décidé de cesser les cours" explique Nazim Yenier le fondateur de la Brest Salsa Academy, une des plus grosses écoles de danse latines du Finistère.
"On prépare la rentrée, au cas où"
Pour le moment, et comme toute la population, les écoles de danse à deux sont dans l'incertitude. "On n'envisage rien et l'attente est assez angoissante. Je suis en contact avec les professeurs de l'école, on réfléchit à la suite, mais c'est encore tôt." confesse Nazim.
Autre danse mais mêmes incertitudes pour l'association Swing du Tonnerre qui tente de préparer sa rentrée 2020/2021. Cette association spécialisée dans le lindy hop et les danses swing (danse à deux pratiquée durant l'entre-deux-guerres sur des airs de jazz) organise déjà son stage d'automne et son stage de fin d'année. "On prépare la rentrée, au cas où. Mais il faut qu'on soit prêt" explique Melik Boukkaz, le président de l'association. "On est aussi dépendants de la reprise des musiciens". La scène de danse swing apprécie, en effet, de danser sur de la musique live et donc avec des groupes de jazz.
"On espère que d'ici septembre le virus sera maîtrisé et qu'on pourra reprendre les cours mais on craint que les gens soient frileux pour un retour dans les salles de danse. D'une part parce qu'ils n'auront peut-être pas envie de s'enfermer avec d'autres danseurs et ensuite parce qu'ils n'auront peut-être pas les moyens financiers à accorder à la danse" explique Nazim Yenier.
La danse, un rôle social aussi
En attendant le retour sur les parquets, il a fallu gérer l'arrêt des cours. Envoi de newsletter, annulation des soirées de fin d'année, et appels à pratiquer seul chez soi ses jeux de jambes, ont été le lot des gérants d'école. Cet arrêt brutal des cours, certains ont eu du mal à l'admettre. "Des danseurs ont envisagé de reprendre la pratique avec des masques. Mais c'est impossible. Notre danse est parfois rapide et cardio, on ne peut pas danser avec un masque qui tomberait tout le temps" admet Melik Boukkaz de Swing du Tonnerre.
La danse à deux est pour certains, bien plus qu'un sport, c'est aussi une activité fortement sociale. "C'est une activité qui fait partie de notre quotidien. Quand on se retrouve pour danser lors de nos soirées hebdomadaires, c'est un peu comme quand on retrouve une petite famille et puis on accueille aussi les nouveaux brestois ou des gens de passage" explique Nazim Yenier de Brest Salsa Academy. Une déclaration que ne contredirait aucune école de danse à deux.
Des cours de substitution à distance
Ceux qui ont la chance de partager leur confinement avec leur partenaire de danse peuvent toujours s'entraîner mais aucune des associations n'a vraiment souhaité mettre en place des cours vidéo à distance parce que "ça serait une incitation à se voir en plus d'une discrimination pour ceux qui n'ont pas leur partenaire à domicile" assume le salsero Nazim Yenier.
Du côté des lindy hoppers on explique que les réseaux sociaux et internet regorgent de vidéos de danseurs professionnels. "On peut s'entraîner avec ce qu'on a déjà vu en cours ou ce qu'on trouve sur internet. En ce qui nous concerne, il ne s'agit pas juste de publier des vidéos, il faut bâtir un programme de cours" explique Melik Boukkaz.
Plutôt entrechats classiques que « side-by-side » qui swinguent
Si le "side-by-side", une figure de "côte-à-côte" pratiqué par les danseurs de lindy hop n'est pas pour sitôt, il est néanmoins des disciplines qui peuvent envisager un retour sur les parquets. C'est le cas de la danse classique.
Christine Derrien dirige son studio de danse classique depuis 1983 à Saint Brieuc et appelle de ses voeux une reprise rapide des cours de danse. "J'espère ouvrir début juin et travailler tout l'été pour rattraper le retard." La professeur de danse a tout prévu.
Cours dédoublé pour limiter le nombre d'élèves, désinfection du matériel, espacement entre les élèves pour les exercices à la barre, elle liste les mesures pour une reprise en toute sécurité. "Je ne reprendrais pas les tout-petits ou les enfants qui font un éveil à la danse car nous sommes, de fait, proches, il y a du contact. En revanche dès l'âge de 8 ans et la possibilité de faire des exercices techniques, nous pourrons reprendre" explique Christine Derrien.
La professeur attend évidemment le feu vert des autorités pour reprendre son activité, mais elle ne désespère pas de pouvoir dispenser ses cours cet été. "Les gens vont peut-être moins partir en vacances et moins longtemps, ils pourront venir aux cours de danse."Je vais aussi demander à ce que les élèves arrivent déjà habillées, qu'elles se lavent les mains avant le cours et qu'il y ait un laps de temps plus grand entre les cours pour que les groupes ne se croisent pas.