Le tribunal administratif de Rennes a donné raison, ce mardi, aux associations One Voice et Crow Life en suspendant les arrêtés préfectoraux qui avaient autorisé la destruction de choucas des tours dans le Morbihan, les Côtes-d'Armor et le Finistère.
1.800, 8.000 et 16.000. Ce sont les nombres de choucas des tours qui avaient été autorisés à la destruction dans les départements du Morbihan, des Côtes-d'Armor et du Finistère, suite à des arrêtés préfectoraux pris en avril.
Les services de l'Etat justifiaient ces nouvelles dérogations à l'interdiction de destruction des espèces protégées par le fait que cet oiseau "sociable" et qui "craint assez peu les humains" cause des dégâts aux récoltes des agriculteurs bretons
"Destructions à l'aveugle inefficaces"
Ce mardi, le tribunal administratif de Rennes a donné raison aux associations One Voice et Crow Life, en interdisant ces abattages jugés "inefficaces". "Les diverses études menées, en Bretagne comme dans d'autres régions européennes, concluent unanimement que les destructions à l'aveugle d'individus de cette espèce sont inefficaces" a indiqué la juge des référés dans son ordonnance.
Elle constate également qu'une "proportion très significative des agriculteurs ayant déclaré des dégâts ne mettent en oeuvre aucune technique alternative visant à limiter le risque de prédation des cultures".
Les services de l'Etat n'apportent ainsi "aucun élément qui permet d'établir avec certitude" que les choucas des tours opèrent "une prédation de grande importance" sur les cultures, en particulier de maïs et de blé. De même, ils ne démontrent pas que les dégâts constatés leur sont exclusivement ou principalement imputables" ajoute encore la jugé des référés.
Les oisillons, victimes collatérales
Dans le Finistère, le préfet avait pourtant assuré que "958 hectares de cultures" avaient été détruites pour la seule année 2021, occasionnant "1,1 million d'euros" de pertes pour les 439 agriculteurs ayant déposé des déclarations en ce sens.
Dans le Morbihan et les Côtes-d'Armor, ces chiffres s'élevaient à 333 et 478 ha, pour près de 400.000 euros de dégâts à chaque fois. 147 déclarations avaient été déposées par des agriculteurs dans le premier département et 352 dans le second.
L'arrêté finistérien reviendrait à détruire "presque 18 % de la population de choucas des tours, sans compter les oisillons qui en seraient les victimes collatérales, recadre la juge. Les membres du couple coopèrent pour la nidification, la femelle étant quasiment intégralement nourrie par le mâle et ne pouvant assurer seule l'élevage des jeunes" souligne-t-elle.
Cette dérogation pourrait "entraîner la disparition d'un très grand nombre d'oisillons de cette espèce protégée, alors même que ces jeunes sont déjà exposés à un fort taux de mortalité" résume la magistrate. "A supposer même que la population soit effectivement sous-évaluée , ce qui n'est au demeurant pas établi, l'arrêté porte une atteinte grave et immédiate à l'espèce protégée qu'est celle des choucas des tours".