Cela fait 8 ans que le bateau est à l'abandon dans le port du Château, à Brest. Et ce n'est pas n'importe quel bateau puisqu'il est le seul Imoca à avoir gagné le Vendée Globe deux fois. De cette gloire passée, il ne reste aujourd'hui qu'un voilier délabré, qui pourrit sur place.
À l'abandon dans le port du Château, à Brest. Voilà ce qu'est devenu le plus célèbre des bateaux du Vendée Globe, seul Imoca à avoir remporté deux fois ce tour du monde en solitaire, en 2001 et 2005. Une vieille gloire abîmée, à la coque trouée, un bateau délabré que son propriétaire, une société maraîchère polonaise, délaisse depuis huit ans.
Le 60 pieds, qui fendait fièrement la mer autrefois, ressemble désormais plus à une épave qu'à un voilier de course au large. Gildas Morvan, le regard attristé, l'observe depuis le ponton. Le navigateur finistérien a bien tenté de le racheter il y a quelques années. En vain. "J'ai essayé de contacter le propriétaire, dit-il, mais impossible de négocier avec lui. J'ai laissé tomber".
"Je suis écoeurée"
Les larmes d'Anne Liardet face à ce bateau en décrépitude en disent long. "Quel gâchis ! Je suis écoeurée" dit-elle, en se prenant la tête entre les mains. Elle aussi a navigué sur ce bateau qui, à l'époque, s'appelait "Roxy". Avec lui, elle a notamment réalisé la Transat Jacques Vabre en 2005 et la Route du Rhum en 2006.
C'était un super bon bateau, super bien construit. J'aurais volontiers refait le Vendée Globe avec en 2012.
"Les Polonais n'ont jamais voulu le lâcher, se souvient Anne Liardet. Je ne sais pas ce qui se passe avec ce bateau. En plus, il leur coûte de l'argent puisqu'ils paient la place au port".
La navigatrice se penche le long de la coque et fait un état des lieux. "Il y a des endroits où il a pris la flotte, c'est sûr, se désole-t-elle. Il n'est plus navigable. La quille est fichue. Il faudrait qu'un milliardaire le rachète pour le remettre aux normes. Rien que la quille, c'est au moins 250.000 euros. Et puis, il faut tout changer, tout : les voiles, le gréement, l'électronique, etc. Il est en train de partir en sucette !".
"Ça fait pitié"
Ni elle, ni Gildas Morvan ne comprennent le refus de vendre du propriétaire du voilier. La société maraîchère polonaise en avait fait l'acquisition en 2010 pour participer à la Barcelona World Race. Mais le bateau n'avait pas été validé par la direction de course faute de mise en conformité technique.
Ce 60 pieds, avec lequel Michel Desjoyeaux et Vincent Riou ont gagné le Vendée Globe, est, certes, "dépassé en termes de performance, constate Gildas Morvan, mais ça fait pitié de le voir finir comme ça sans que personne ne s'en occupe".