Pas content ! Eau et Rivières de Bretagne, dénonce des pratiques malhonnêtes dans l'appréciation de la qualité des eaux de baignade : échantillons de prélèvement écartés abusivement lorsque les résultats sont mauvais et plages polluées fermées pour ne pas les comptabiliser dans les statistiques.
Dans le Nord Finistère, Laurent Le Berre, s’étonnait de voir des pollutions sur les plages près de chez lui, l’été, et de ne pas les retrouver dans les rapports officiels de fin de saison. Et puis en étudiant les documents qu’il a pu se procurer auprès de l’ARS (agence régionale de santé) en charge de ces études, ce militant d’Eau et Rivières de Bretagne s’est rendu compte que certains échantillons de prélèvements n’étaient pas pris en compte dans le calcul de la qualité bactériologique des eaux de baignade. Une pratique observée de 2016 à 2019, qui impacte les notations actuelles de qualité des eaux de baignade puisqu'elles sont basées sur les résultats des années précédentes.
L’association s’est penchée sur le cas d’onze plages entre l’Aber Ildut et l’Aber Benoît. Sur la plage de Gwisseler à Landulvez, par exemple, les 5 juin et 3 juillet 2018 de mauvaises analyses ont été réalisées, comme en témoigne ce tableau de relevés bactériologiques (niveau de bactéries fécales dans l’eau de baignade, entérocoque et escherichia coli en UFC, unité formant colonie)
Or dans le relevé de l’ARS, les mauvais résultats ont été remplacés par les échantillons de contrôle réalisés deux jours plus tard.
"La pluie n’est pas un accident de pollution"
Une pratique totalement interdite par la directive européenne sur la qualité de l’eau. S’il est normal d’effectuer des prélèvements de contrôle pour s’assurer d’un retour à la normale après un épisode de pollution, il est en revanche interdit de remplacer les mauvais résultats initiaux par ceux des échantillons de contrôle dans le calcul des moyennes.
En revanche, la directive européenne autorise bien la mise à l’écart d’un certain nombre d’échantillons en cas de pollution à court terme. Sollicitée, l’ARS n’a pas répondu à notre demande d’information. Il est donc difficile de savoir comment les moyennes sont exactement calculées.
D’après l’association Eau et Rivières, certains mauvais résultats écartés par l’ARS étaient liés à des épisodes pluvieux. Le lessivage des sols aurait amené des bactéries fécales aux plages. Et sur ce point encore, les vues divergent. La pluie peut-elle être considérée comme la raison d’une pollution à court terme ? La définition qu’en donne la directive européenne est la suivante : une pollution à court terme est une contamination microbiologique (…), qui a des causes clairement identifiables, qui ne devrait normalement pas affecter la qualité des eaux de baignade pendant plus de soixante-douze heures environ.
"Il y a une mauvaise interprétation de la directive européenne, assure Laurent Le Berre. Un accident de pollution, c’est une tonne à lisier ou des bovins qui viennent faire des bouses sur la plage. La pluie, ce n’est pas un accident de pollution."
La réponse de l'ARS
Dans notre journal télévisé de ce vendredi 16 juillet, la directrice de cabinet de l’ARS, Anne-Briac Bili, répondait que seuls 1.1% des échantillons sont écartés en Pays d’Iroise.
"Possible, répond Laurent Le Berre à Eau et Rivières, on ne peut pas vérifier puisqu’on n’a pas accès aux chiffres. Mais il suffit d’enlever juste quelques très mauvais chiffres pour que la moyenne baisse considérablement et devienne acceptable."
Fermer des plages pour ne pas qu'elles apparaissent dans les statistiques
Autre pratique dénoncée par l’association environnementale, la fermeture préventive de plages pouvant poser problèmes. Elles sortent ainsi du calcul des statistiques.
L'association va déposer un recours devant le tribunal administratif pour contraindre l'ARS à réévaluer la qualité des eaux de baignade. Eau et Rivières de Bretagne demande également que les prélèvements de contrôle soient effectués toute l'année et pas uniquement du 15 juin au 15 septembre, comme c'est le cas actuellement.