D'un côté, un socialiste qui, malgré l'accord entre son parti et La France insoumise (LFI), entend battre la campagne des législatives face au candidat LFI. De l'autre, des marcheurs en ordre dispersé. Dans la 2e circonscription finistérienne, celle de Brest-Ville, sonne l'heure de la dissidence.
Le rendez-vous est donné à la presse dans les locaux du parti socialiste (PS) de Brest. Le symbole est de taille, au lendemain de la validation par le Conseil national du PS d'un accord avec La France insoumise (LFI). Car, autour de la table, c'est un vent de dissidence qui souffle ce vendredi matin, rue de Portzmoguer, siège de la fédération socialiste finistérienne.
Réza Salami annonce qu'il maintient sa candidature aux législatives dans la circonscription de Brest-Ville, la 2e du Finistère, alors qu'un candidat LFI issu de la Nouvelle union écologique et populaire (NUPES) - à laquelle le PS s'est rallié ce jeudi soir - a d'ores et déjà été désigné. "Le peuple de gauche aura le choix entre la radicalité et une gauche responsable" dit Réza Salami qui ne lâchera pas une once de terrain. Peu importe si le secrétaire fédéral du PS finistérien appelle ceux qui refusent cet accord "à en tirer les conséquences".
"Pas de soumission"
Bien qu'il qualifie sa candidature de socialiste, Réza Salami ne pourra, en toute logique, pas être investi sous l'étiquette PS dans cette 2e circonscription. "J'ai été désigné par le PS du Finistère en février, j'irai jusqu'au bout" indique l'élu brestois en charge de la politique culturelle. Encarté depuis 25 ans dans ce parti, il n'a pas non plus l'intention d'en claquer la porte. "Je suis déterminé, j'ai des convictions, ajoute-t-il. J'ai passé l'âge d'être craintif"
Je ferai campagne pour Réza Salami
François Cuillandre, maire de Brest
Le maire de Brest, venu soutenir la candidature de son adjoint, est sur la même ligne. Et ne compte pas s'en éloigner. "Si certains veulent me mettre dehors parce que je ne respecte pas ce qui est décidé, qu'ils le fassent, tempête François Cuillandre. Je reste militant socialiste et je ferai campagne pour Réza Salami".
Il ne décolère pas depuis la signature de l'accord avec LFI et le partage des circonscriptions. "On donne royalement au PS du Finistère la circonscription de Landerneau, la plus à droite du département, et celle de Richard Ferrand (Châteaulin-Daoulas) où le PS a été laminé. Alors franchement, ne me parlez pas d'accord qui prend en compte la réalité politique locale".
François Cuillandre plaide pour l'union à gauche, "mais pas la soumission. En gros, on nous demande de baisser la tête et de disparaître. Mesurer la vie politique à l'aune des seuls résultats de la présidentielle, c'est un mauvais choix. C'est la garantie d'une défaite" affirme-t-il.
"Les petites carabistouilles de parti"
Dans les rangs de la République en Marche, devenue le parti Renaissance depuis ce jeudi, l'ambiance est tout aussi tempétueuse dans cette 2e circonscription. Marc Coatanéa a décroché l'investiture de la majorité présidentielle, au détriment de l'actuel député marcheur, Jean-Charles Larsonneur, et de Mickaël Cabon, fervent soutien d'Emmanuel Macron depuis 2016. Ces deux-là iront au charbon des législatives, quoiqu'il en coûte !
Les vieilles amitiés qui prennent le pas sur le reste, ça ne m'intéresse pas
Jean-Charles Larsonneur, député sortant Brest-Ville
C'est en lisant le journal que Jean-Charles Larsonneur a découvert qu'il ne serait pas investi par Renaissance. "C'est un choix imposé et sans concertation, constate-t-il. C'était attendu. Mais bon, les petites carabistouilles de parti et les vieilles amitiés qui prennent le pas sur le reste, ça ne m'intéresse pas".
Il se savait sur un siège éjectable au sein de la Macronie depuis son ralliement au groupe parlementaire "Agir ensemble", certes dans la majorité présidentielle, mais tout de même, vu de l'Elysée et du perchoir de l'Assemblée nationale, le pas de côté fut moyennement apprécié.
Et puis, il y a aussi la confiance qui n'a pas pris une ride, entre Richard Ferrand, aux manettes pour distribuer les rôles dans le Finistère, et Marc Coatanéa. Une amitié qui remonte à l'époque où ils bataillaient côte-à-côte au sein du PS.
Jean-Charles Larsonneur entend néanmoins "poursuivre" ce qu'il a entamé il y a cinq ans. "Après tout le travail effectué, le candidat légitime, avec de l'expérience, pour battre LFI, c'est moi".
Le député sortant l'a quand même amer, d'autant qu'il fut l'un des premiers à Brest à marcher derrière Emmanuel Macron. "J'ai toujours été loyal depuis le premier jour, rappelle-t-il. Loyal mais libre aussi parfois quand il s'agissait de défendre mon territoire".
S'il affirme ne pas "être accroché à ce poste comme une bernique à son rocher", Jean-Charles Larsonneur assure qu'il sera bien en lice pour les législatives.
Trois candidats de la même sensibilité dans la 2e circonscription, avec le risque de disperser les voix, les législatives chez les marcheurs brestois ne vont pas ressembler à une promenade de santé.