Portrait. D'un bar à l'autre, il marche de Madrid à Camaret

Parti le 10 mai de Madrid, où il vit depuis 9 ans, Rémi Clémenceau arrivera ce dimanche à Camaret, dans le Finistère, où il a grandi. Un périple de près de 1.800 kms à pied, en solitaire, qu'il a choisi de réaliser de bar en bar. Rencontre, accoudé au comptoir.

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Relier Madrid à Camaret-sur-Mer, dans le Finistère, en passant par les bistrots : c'est le périple, à pied, que Rémi Clémenceau est sur le point de boucler. Quand je le retrouve, ce vendredi après-midi, à Châteaulin, c'est tout naturellement dans un bar qu'il me donne rendez-vous. Le jeune homme est attablé devant un café, en terrasse avec vue sur les toits de la ville. Au loin, l'orage gronde et une averse de grêle autra vite fait de rapatrier tout le monde à l'abri.  

"Le moment ou jamais"

Au premier coup d'oeil, on ne dirait pas qu'il a déjà 1.700 kilomètres dans les jambes. Les traits du visage sont détendus, il a perdu quelques kilos, pris des couleurs et a hâte d'arriver à Camaret, où sa mère a prévu une petite fête pour l'accueillir. Camaret, sur la presqu'île de Crozon, ce sont les souvenirs d'enfance. Châteaulin, les années au lycée. Rémi est en terre connue. Dimanche, il franchira le seuil de la maison familiale. "J'aurais pu arriver avant mais ma mère m'a demandé de ralentir, rigole-t-il. Je suis trop en avance et comme elle a tout organisé..."

Son projet, baptisé "d'un bar à l'autre", est né pendant le premier confinement de 2020. Expatrié depuis neuf ans à Madrid, Rémi ne vit pas bien l'isolement et l'absence de vie sociale. "J'en avais ras-le-bol de regarder le printemps depuis ma fenêtre et d'être en télétravail, confie-t-il. Je me suis dit qu'une fois le confinement terminé, je partirai de Madrid à pied pour aller voir ma famille à la pointe bretonne".

Il met cette idée de côté quand la vie "normale" reprend. Et elle s'impose à lui lorsque, en février dernier, l'entreprise pour laquelle il travaille opère une restructuration et supprime massivement des postes. Dont le sien. "C'était le moment ou jamais de faire cette randonnée, alors j'ai pris mon sac à dos, ma compagne m'a dit 'fais le maintenant' et je suis parti". Le 10 mai, il quitte la capitale espagnole, direction le Finistère.


"Le pain qui saoule"

Marcher pour marcher, pas son truc ! Dans ce voyage, Rémi y met aussi son futur projet professionnel : ouvrir un lieu de restauration rapide, à Madrid, qui n'utilisera que des produits locaux, en circuit court et de saison. La randonnée se transforme en "marche intro-prospective", comme il dit, pour découvrir, sur le terrain et au fil des routes empruntées, ce qu'est vraiment le métier, en allant à la rencontre des bistrotiers.

Des bars, il va en croiser. Des récits de vie, il va en écrire dans ce blog qui lui sert de carnet de voyage et sur son compte Instagram. "J'ai fait la connaissance de gens incroyables, souligne-t-il. Pas plus tard qu'hier, à Châteauneuf-du-Faou, je me suis retrouvé dans ce bar tenu par une vielle dame. Elle m'a raconté que les habitués du comptoir était surnommés "le pain qui saoule". Tout ça parce qu'avant, ce bar faisait aussi boulangerie, les clients achetaient leur pain, puis picolaient et finissaient par repartir en oubliant leur baguette"

 

45 bistrotiers rencontrés 

Dans le bar de Châteaulin, il entame la discussion avec la patronne des lieux qui lui explique avoir eu plusieurs vies avant celle-ci. "On a du mal à remonter la pente avec toutes ces fermetures et maintenant le pass sanitaire" lui dit-elle. Rémi déroule son projet. Elle lui donne quelques conseils. Ce soir, sous sa tente plantée dans un camping tout proche, il publiera cette histoire sur son blog. Une de plus.


C'est de la rencontre humaine que je recherchais avant tout, des anecdotes, du vrai

Rémi Clémenceau



"J'ai rencontré 45 bistrotiers, entre Madrid et ici. J'ai surtout ciblé les bars dans les petites villes et les villages. Je suis tombé sur des endroits dans leur jus depuis quarante ans qui font épicerie, dépôt de pain, qui vendent des articles de pêche, etc. Les bars à concept des grandes villes ne m'intéressaient pas. C'est de la rencontre humaine que je recherchais avant tout, des anecdotes, du vrai"

Ce samedi, il s'arrêtera dans le café-librairie de Landévénnec. Avant de continuer, à pas ralenti (pour faire plaisir à sa mère), jusqu'à Camaret. "J'ai volontairement pris des routes intérieures pour ne pas voir la mer et terminer en apothéose. Chez moi"
 

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