La cour administrative d'appel de Nantes a quelque peu réévalué l'indemnisation d'un ancien patient de l'hôpital de Quimper (Finistère), qui avait dû subir trois chimiothérapies et une opération suite à un "diagnostic erroné" de cancer.
La cour administrative d'appel de Nantes a quelque peu réévalué l'indemnisation d'un ancien patient de l'hôpital de Quimper (Finistère) qui avait dû subir trois chimiothérapies et une opération suite à un "diagnostic erroné" de cancer.
En première instance, le tribunal administratif de Rennes avait condamné le centre hospitalier de Cornouaille à verser un peu plus de 183.000 € au requérant, et 126.000 € à la Caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM) du Finistère. Le patient avait toutefois fait appel de ce jugement, rendu en juin 2020 : il évaluait ses préjudices à la somme de 815.000 €.
Cet homme divorcé et père d'un enfant réclamait en particulier près de 44.000 € pour ses seuls "frais liés à l'utilisation d'un médicament type Viagra" : il reste atteint de "troubles érectiles" depuis la "faute" des médecins quimpérois.
Ce maçon âgé aujourd'hui de 47 ans avait aussi chiffré sa "perte de gains professionnels futurs" à près de 350.000 € sur la base du salaire de "chef d'équipe" qu'il avait touché en décembre 2010 d'une société de travaux publics suisse à l'occasion d'une mission temporaire au Gabon : depuis, il n'a "pas repris d'activité professionnelle" et il s'est vu reconnaître un "taux d'incapacité supérieur à 80 %" par la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du Finistère.
De "nombreuses complications" par la suite
Ses déboires avaient en fait débuté le 19 juin 2011, quand il s'était présenté aux urgences du centre hospitalier de Quimper en raison d'une "rétention aiguë" d'urine associée à une couleur rouge sang des mêmes urines.
Un neuroscanner avait alors mis en évidence une "tumeur de la vessie" et des "lésions suspectes métastatiques". L'analyse confiée au laboratoire quimpérois O'Micro avait quant à elle conclu à l'existence d'un "carcinome", mais la recherche de métastases osseuses n'avait donné "aucun résultat", relève la cour administrative d'appel de Nantes dans son arrêt.
Le 11 juillet 2011, trois semaines après son hospitalisation initiale aux urgences, il avait alors été décidé par les médecins de réaliser une chimiothérapie. Six mois plus tard, le 30 décembre 2011, la vessie et la prostate lui avaient été retirées. Problème : l'analyse des prélèvements avait "conduit à remettre en cause le diagnostic initial de cancer", notent les juges...
Un service d'anatomo-pathologie "à Paris" avait alors conclu à un pécome vésical "de forme très rare", puisque "cinq cas seulement" ont été rapportés dans la littérature médicale. Reste que le requérant a "connu par la suite de nombreuses complications" qui ont "nécessité de nouvelles hospitalisations" et trois ans d'arrêt de travail.
Une pathologie finalement "bénigne"
Le 6 octobre 2014, soit trois ans après l'admission initiale aux urgences du centre hospitalier de Quimper, le CHU de Nancy (Meurthe-et-Moselle) - où l'intéressé avait déménagé entre-temps - avait finalement révélé que la pathologie était "bénigne" et que les traitements prodigués en Bretagne n'étaient "pas justifiés".
Le patient "a besoin de protections en raison des fuites urinaires et du recours à des auto-sondages intermittents, ces soins étant liés au diagnostic erroné (...) et non à la pathologie initiale", rappelle donc la cour administrative d'appel de Nantes dans un arrêt en date du 18 novembre 2021 qui vient d'être rendu public.
Sa "dysfonction érectile" est également "directement liée" à l'intervention litigieuse, et les médicaments "type Viagra" dont le patient demande le remboursement "présentent un lien de causalité direct et certain avec la faute".
les médicaments "de type viagra" lui seront rembourses
"Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que leur utilisation soit aussi fréquente que le prétend le requérant", considère la juridiction. Ces médicaments lui seront donc remboursés à l'avenir "sur présentation de justificatifs", décide-t-elle.
"Si ce patient soutient qu'il a dû subir inutilement une opération chirurgicale et trois chimiothérapies qui sont susceptibles d'avoir des effets secondaires à plus ou moins long terme, le dommage invoqué n'est pas distinct du déficit fonctionnel permanent dont il a été indemnisé par les premiers juges", considère la cour administrative d'appel de Nantes pour justifier son refus de l'indemniser davantage sur ce point.
Les juges nantais ont néanmoins alloué 4.750 € de plus pour le "préjudice d'agrément" de cet amateur de football qui "ne peut plus pratiquer aucun sport", et ont réévalué quelque peu sa "perte de gains professionnels", son "préjudice esthétique" et son "préjudice sexuel". Le centre hospitalier de Quimper devra enfin payer 1.500 € à son ancien patient pour ses frais de justice en appel.