Nouvelle séquelle de l'affaire Carlos Ghosn, l'ex-PDG de Renault emporté par un scandale de malversations au Japon: le conseil d'administration du constructeur automobile français a écarté vendredi son dauphin Thierry Bolloré, en le démettant de sa fonction de directeur général.
A l'issue d'une réunion exceptionnelle, "le conseil d'administration a décidé de mettre un terme aux mandats de Directeur général de Renault SA" de Thierry Bolloré "avec effet immédiat", a indiqué le groupe au losange dans un communiqué.
Le conseil a désigné Clotilde Delbos, l'actuelle directrice financière du constructeur, directrice générale pour interim.
Le Quimpérois Thierry Bolloré, 56 ans, cousin de l'homme d'affaire Vincent Bolloré, occupait le poste de directeur général depuis le 24 janvier 2019. "Il était présent à la réunion et s'est exprimé. On lui a reproché des problèmes de management et de performance", a expliqué à l'AFP une source proche du dossier.
Tourner la page de l'ère Ghosn
C'est pour le constructeur une façon de tourner la page de l'ère Carlos Ghosn, son ancien PDG déchu, qui attend son procès au Japon où il a été mis en examenet assigné à résidence pour de multiples malversations présumées. M. Ghosn avait fait de Thierry Bolloré son successeur présomptif. Le sort du directeur général paraissait déjà tranché: "Soit il démissionne, soit il est révoqué", avait affirmé jeudi à l'AFP une source proche du dossier.
Dans un entretien publié jeudi soir par Les Échos, M. Bolloré avait dénoncé "un coup de force inquiétant", estimant qu'on lui reprochait "peut-être" sa nomination comme directeur-général adjoint début 2018 "sur proposition de Carlos Ghosn".
Ce départ intervient alors qu'un renouvellement du management de Nissan, dont Renault détient 43%, a été décidé pour écarter les principaux dirigeants de l'ère Ghosn: un nouveau directeur général, Makoto Uchida, a été nommé mardi. Depuis l'éclatement de l'affaire Ghosn, les relations entre le management français et japonais étaient exécrables, menaçant la survie de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, devenue l'an dernier le premier constructeur automobile mondial en nombre de voitures vendues.
Lors de sa nomination en janvier comme président du groupe, Jean-Dominique Senard avait accepté de travailler avec Thierry Bolloré, confirmé imultanément à la direction exécutive. Si plusieurs sources familières du dossier assurent que la décision de se séparer de M. Bolloré était celle de M. Senard seul, une autre source proche faisait au contraire état de pressions venant de toutes parts, "non seulement l'État, mais aussi les salariés, les managers de Renault, les partenaires japonais".
Ancien cadre de l'équipementier automobile français Faurecia, M. Bolloré, âgé de 56 ans, avait rejoint Renault en 2012, où il a gravi tous les échelons jusqu'à assurer l'intérim à la direction du groupe après l'arrestation de M. Ghosn en novembre 2018.
Les investisseurs ont salué l'éviction de M. Bolloré: le cours de l'action Renault décollait de 4,27% à 52,97 euros à 12H20 à la bourse de Paris, dans un marché en hausse de 1,25%.