Peut-être avez-vous déjà vu l'une de ses oeuvres sur la route ? Manolane, peintre aérographe bretonne habille des camions, des motos. Une passion dont elle vit désormais, un rêve d'enfant devenu son quotidien.
"J'ai toujours peint. Quand j'étais enfant, c'était au pinceau, je faisais des reproductions de portraits, c'est ce que je préfère."
Manolane est artiste. Aujourd'hui, le pinceau n'est pas loin mais c'est l'aérographe qu'elle utilise. Avec ce pistolet à peinture, elle réalise ses oeuvres, sur des supports peu habituels : des camions, des motos, des casques.
Lorsqu'elle était enfant, son père se rendait au Grand prix camions du Mans. Il rapportait alors des photos. Manolane se souvient : "C'était impressionnant de voir ces camions décorés, c'était de grands formats, je me suis dit que c'est ça que je ferais."
A 18 ans, avec son premier salaire, elle s'offre son premier aérographe. Son premier dessin ? Des guépards, sur une tôle. Elle se familiarise avec l'outil. "L'aérographe, ce n'est pas simple, pour les dégradés par exemple. Il faut aussi gérer la pression de la gâchette : plus on recule le doigt, plus le débit de la peinture est fort. C'est un dosage."
Pour entrer dans le milieu des routiers, Manolane poste un jour une annonce sur internet, propose un premier travail gratuitement. Elle est contactée. Son premier camion, ce sera sur le film "Christine" adapté du livre de Stephen King. "J'ai bossé dessus en plus de mon emploi, sur mes week-ends, mes coupures", se rappelle-t-elle.
Le bouche à oreille se met en place, Manolane commence à se faire un nom. Elle perce en 2016, invitée par le magazine France Route pour une démonstration. A l'époque, elle réalise le portrait de Max Meynier, l'un des animateurs radio préféré des routiers. "J'ai fait ma démo devant un public, dans le froid et le vent. Après ça, tout a changé pour moi."
Depuis, Manolane a fait de sa passion son métier. Elle est la seule femme dans le milieu.
Un mois de travail
Chaque oeuvre obéit à un processus bien rôdé. Elle évoque l'une de ses dernières commandes, inspirée par le groupe Indochine. "Le client voulait le visage de Nicola Sirkis (le chanteur), les noms des musiciens." Avant de se saisir de son aérographe, elle réalise d'abord une maquette, sur ordinateur. "Je fais un assemblage, ce moment c'est parfois aussi long que la peinture elle-même. Je dois choisir des photos, éviter les répétitions, faut que ça aille ensemble."
Une fois la proposition validée, Manolane passe aux choses sérieuses. Elle se déplace souvent, partout en France. Elle doit d'abord préparer le camion, avec une phase de ponçage puis de cachage qui dure deux jours. Elle protège en effet les roues, les rétroviseurs, les vitres...
Vient ensuite une autre étape. "Je projette ma maquette sur le camion, comme ça c'est à l'échelle. Parfois, il y a des surprises selon les moulures des camions et il faut que je réajuste, pour ne pas qu'une poignée de porte se retrouve dans un des portraits." Manolane ne compte pas ses heures. Une fois lancée, elle peint toute la semaine et le week-end. Un mois lui sera nécessaire pour tout achever. A la fin, elle confie que l'émotion est toujours au rendez-vous : "Les clients sont touchés, heureux de voir le résultat car cela correspond à ce qu'ils sont, ce qu'ils aiment."
Le camion Indochine a fait son petit effet, relayé sur les réseaux sociaux par le groupe lui-même
Manolane prépare en ce moment un autre projet, sur un camping-car de 9 mètres de long. "Cela va me changer, les propriétaires veulent des chevaux et des chiens." Elle a surtout hâte que les grands événements reprennent, pour continuer à aller à la rencontre de ceux qui font voyager ses portraits.