Jean Bobet, grande figure du cyclisme breton, s’est éteint à l'âge de 92 ans. Frère de Louison Bobet, champion du monde en 1954 et trois fois vainqueur du tour de France, il n'aura eu de cesse de protéger et de faire perdurer sa mémoire.
Jean Bobet, que l'écrivain Antoine Blondin surnomma "l'homme au masque de frère", est décédé à l'âge de 92 ans, a annoncé samedi l'Union nationale des cyclistes professionnels (UNCP), dont il fut l'un des fondateurs.
Originaire de Saint-Méen-le-Grand, en Ille-et-Vilaine, Jean - coureur puis journaliste-écrivain - est indissociable de son frère aîné Louison, le premier à gagner trois fois de suite le Tour de France, entre 1953 et 1955.
Une passion commune pour le vélo née dès leur plus jeune âge : "On livrait le pain dans les campagnes environnantes mais en faisant des tournées de 10, 12 km, se souvenait Jean Bobet en 2013. Louison était très adroit pour ça."
"J'ai été un coureur cycliste particulier", estimait Jean Bobet, né en 1930, cinq ans après son frère.
D'abord, j'étais une curiosité que l'on qualifiait d'intellectuel. C'était écrit sur ma figure: je portais des lunettes. Et puis, j'étais le frère de l'autre. C'était écrit partout: Louison Bobet était LE champion."
Jean Bobet
Vainqueur de Paris-Nice en 1955, troisième de Milan-Sanremo la même année, Jean Bobet mena pourtant une carrière des plus honorables, assortie de deux participations au Tour de France (14e en 1955, 15e en 1957) et de trois au Giro, avant de raccrocher en 1959.
Du cyclisme à l'écriture
"Je nourrissais beaucoup plus d'états d'âme que je ne comptais de succès", reconnaissait-il toutefois dans l'un des livres, une douzaine, qu'il écrivit avec élégance (il obtint le Grand prix de la Littérature sportive), finesse et précision.
Après sa carrière, il s'orienta vers le journalisme (L'Équipe, RTL dont il dirigea le service des sports) et fut même pressenti un temps pour diriger le Tour de France. Mais il ne résista pas à l'appel de son frère, qui s'était lancé dans la thalassothérapie.
Frère d'un champion
Après le décès de Louison en 1983, Jean Bobet était devenu le gardien de la mémoire du champion breton, participant à la création d'un musée en hommage aux exploits de son frères.
Aussi vigilant que lorsqu'il éconduisit le philosophe et critique littéraire Roland Barthes, au soir de l'étape du Ventoux du Tour 1955, en lui fermant la porte de la chambre. "Après le travail d'équipier sur la route, je m'attelais à un autre boulot à l'arrivée, celui de chien de garde attaché à la protection rapprochée du champion."
Dans son ouvrage le plus célèbre, "Mythologies", Barthes évoque d'ailleurs le frère de celui qu'il qualifiait de "héros prométhéen": "Le double de Louison en est aussi le négatif; il est la grande victime du Tour. Il doit à son aîné le sacrifice total de sa personne, en frère. Ce coureur souffre d'une grosse infirmité: il pense."