Alcoolisme : "quand on vit avec quelqu’un qui est dans l’alcool, on est emprisonné dans sa prison"

Depuis 1951, sur le modèle des Alcooliques Anonymes, l’association Al-Anon aide les proches des malades de l’alcool. À Rennes, tous les quinze jours, des enfants, des épouses, des parents de personnes dépendantes se retrouvent pour échanger, discuter. Alors que l'association tient son congrès national en Bretagne ce dimanche 24 mars 2024, nous avons pu assister à une de leurs réunions. Reportage.

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Sur la table de la réunion, Marie-Louise a disposé des madeleines, de la tisane, un peu de douceur…

Elle est membre des Al-Anon depuis 40 ans. Vivre avec une personne alcoolique, elle en connaît toutes les difficultés, toutes les phases.  

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Reportage d'Antoine Calvez, Jean-Michel PIron et Marie Breton ©FTV

"Quand on vit avec quelqu’un qui est dans l’alcool, on est emprisonné dans sa prison. Lui, il ne pense qu’à boire ou à arrêter de boire, et nous, on ne pense qu’à ça, et à comment on va faire pour qu’il arrête."

Pour une personne qui boit, il y en a cinq qui trinquent

 

Les Al-Anon ont été créés aux États-Unis en 1951 par les épouses des deux fondateurs des Alcooliques Anonymes. En échangeant sur leurs difficultés, W. Bill et Bob Smith avaient acquis la certitude que "personne, mieux qu'un malade alcoolique, ne pouvait comprendre un autre malade alcoolique". Partant du même constat, leurs femmes ont organisé leurs premières réunions : "personne mieux qu’un proche d’alcoolique ne peut comprendre un autre proche."

En France, les premiers groupes Al-Anon se sont constitués en 1962. On en compte aujourd’hui 130, dont une dizaine en Bretagne.

J’étais tout le temps ou dans les reproches de ce qui s’était passé avant ou dans la peur de ce qui allait arriver.

Marie-Louise, membre des Al-Anon de Rennes

Pendant des années, Marie-Louise a vécu l’alcoolisme de son mari. " J’étais tout le temps dans les   reproches de ce qui s’était passé avant ou dans la peur de ce qui allait arriver : la voiture, les dépenses qu’il faisait. J’étais vraiment dans la trouille."

 

Une bouteille à la mer

 

Autour de la table, le vendredi soir, chacun peut raconter son histoire, ses peurs, ses souffrances. Qu’il s’agisse de son conjoint, de son père, de sa mère ou d’un enfant, les proches sont confrontés aux mêmes difficultés.

Il y a d’abord les peurs. Celles de voir l’alcool prendre petit à petit toute la place, celles des risques au quotidien. Puis vient souvent la tentation de protéger, de chercher et même de trouver des excuses à cette plongée dans les verres. Une tentation souvent accompagnée d’un sentiment de culpabilité, l’impression d’être responsable de cette descente aux enfers. Arrivent ensuite les tentatives de contrôler, en cachant les bouteilles, en les vidant dans l'évier. Et puis la colère, face aux mensonges, aux promesses d’arrêter jamais tenues. Un engrenage que tous connaissent parfaitement.

Lire : Les Alcooliques anonymes ont 55 ans: "Savoir que l'on n'est plus seul" confie Charles

 

Une bouteille à l’amer  

"Quand on se retrouve en famille, témoigne Monica, fille d’un malade d’alcoolique, on fait toujours en fonction de lui et en fonction de ses réactions : de la peur qu’on peut avoir de la manière dont il pourrait réagir s’il ne fait pas ce qu’il veut comme il le veut, quand il le souhaite. On a peur aussi de comment ça pourrait se passer dehors parfois si on sort, donc, on s’empêche de faire beaucoup de choses."

Ce qui se dit dans la petite salle, entre deux petits gâteaux et deux tasses de café ou de tisane, restera ici. Personne ne juge, tout le monde comprend.

Des réunions pour apaiser et trouver des solutions

 

C’est au cours d’une de ces réunions que Laurine a compris que l’alcoolisme de son enfant était une maladie. "ça a été une libération. Cela m’a permis de me dire, je ne suis pas coupable et de se le dire, ça libère aussi !"

 

Aujourd’hui, Laurine attend les réunions avec impatience. Elle y prend ce dont elle a besoin, des conseils, de l’écoute, y abandonne parfois ses douleurs. "Venir en parler ici, cela fait beaucoup de bien parce que c’est un endroit où on peut pleurer, où on peut parler ouvertement, ça me fait du bien. Je sors d’ici avec de l’espoir, le sourire et davantage apaisée."

Pour trouver une réunion en Bretagne : Al-Anon

(avec Antoine Calvez)

 

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