Une dizaine de livreurs à vélo a décidé de se fédérer en association à Rennes, pour se détacher du système des plateformes de livraison de nourriture dont les conditions de travail se précarisent.
"On a vu l'évolution de nos conditions de travail, au fil du temps, avec les plateformes de livraison. C'est difficile de se projeter. On a un cadre qui change tous les 6 mois. Par exemple, depuis l'arrivée de Deliveroo à Rennes en 2016, la rémunération a changé quatre fois. Depuis 2019, on devient clairement perdants, on évalue à -35 % la baisse de nos rémunérations."Hugo est livreur à vélo depuis 2017 et c'est son activité principale. En tant que travailleur indépendant, il constate les changements dans son secteur, de moins en moins à son avantage. "Récemment on a perdu un autre outil, qui régulait les plannings des coursiers et offrait aux livreurs une garantie de travail. Là, n'importe qui peut se connecter entre 8 h et 3 h du matin, on se retrouve en sureffectif."
Les coursiers rennais, une alternative
En juin 2020, Hugo se regroupe avec une dizaine d'autres livreurs, tous des habitués des plateformes "traditionnelles". Ils montent leur association, Les coursiers rennais, pour "favoriser la représentation des indépendants et leur mise en relation avec les acteurs locaux."
Ils démarchent les restaurants, vont s'associer à un groupement de restaurateurs qui proposent déjà le click and collect appelé tonrestoalamaison. A partir du mardi 17 novembre, ils sillonneront les rues de Rennes en vélo, pour assurer les livraisons de nourriture, avec les établissements qui auront décidé de faire appel à eux. Pour le moment, leur service ne fonctionne pas avec une application. "Nous n'avons pas de catalogue avec une liste de restaurants, ce sont eux qui s'engagent à travailler avec nous."
On sent qu'on est attendus, les restaurants ne s'y retrouvent pas à travailler avec les plateformes qui prennent en moyenne une commission de 30 %.
Les coursiers rennais appliqueront, disent-ils, les prix du marché actuel. Avec une moyenne de 10 euros, un coût réparti entre le client et le restaurant. "L'idée c'est de rémunérer honnêtement les livreurs, de payer nos charges et une personne qui sera en charge des répartitions des commandes (le dispatch)", précise Hugo.
"Ceux qui veulent travailler autrement iront vers ce genre de démarche"
Yann Dayer est le patron de la pizzeria Angello. Il va se lancer dans la livraison pour la toute première fois, avec Les coursiers rennais. "On ne voulait pas de plateformes classiques car on savait que le travail des livreurs n'était pas respecté. Ce qui nous a convaincu, c'est l'utilisation du vélo, l'aspect écologique et éthique."
"On sait que c'est un pari", asssume-t-il. "On sait que c'est plus cher. Notre client paiera 7,99 euros, nous 2 euros. Ce prix sera visible à la commande. Sur la durée, cela baissera. Chez nous, le panier minimum devra être de 30 euros." Il souligne : "C'est important pour nous que les clients aient conscience du prix des choses." A Rennes, selon lui, "ceux qui veulent travailler autrement auront recours à ce service."