Les orthophonistes risquent d’être très sollicités ces prochaines semaines. Ils interviennent dans les phases de rééducation des malades du Covid-19. A l’hôpital mais aussi dans leur cabinet.
Au CHU de Rennes, environ 60 personnes souffrant du Covid-19 ont été admises en réanimation. Celles qui sont tirées d’affaire ne sont pas pour autant complètement guéries. Il y a souvent derrière une longue phase de rééducation.
Réapprendre à parler et à manger
Une fois extubés, les patients doivent d’abord réapprendre à parler, respirer, manger. C’est là qu’interviennent les orthophonistes.
Audrey Pignot travaille au CHU de Rennes. En plus de ces patients habituels, elle a dû s’occuper de ces malades d’un genre nouveau : « nous faisons des bilans de déglutition, on les conseille pour des postures qui permettent de faciliter la reprise de l’alimentation. Pour certains, cela se passe très bien. Pour d’autres c’est plus compliqué, ceux dont les cordes vocales ont été abimées vont mettre par exemple plus de temps à assimiler les liquides. D’autant que les malades du Covid qui sortent de réanimation souffrent davantage de confusion, de troubles neuropsychologiques. »
Ensuite, les patients sont généralement pris en charge au service de médecine physique et de réadaptation du CHU, ou des orthophonistes mais aussi des kinés et des ergothérapeutes interviennent auprès d’eux.
Les questions des libéraux
Dans les prochaines semaines, ce sont les orthophonistes de ville qui devraient voir arriver eux aussi des victimes du coronavirus.
Comme beaucoup de soignants libéraux, ils ont fermé leur cabinet le 16 mars dernier et la plupart devrait rouvrir le 11 mai. En Bretagne, ils sont 950.
Après avoir bataillé auprès du Ministère de la Santé et des Agences Régionales de Santé, ils ont finalement obtenu un peu de matériel, dans le cadre de la dotation de l’Etat. Ils ont droit à 12 masques chirurgicaux par semaine. Mieux que rien mais insuffisant pour faire face aux besoins.
Car outre d’anciens malades du Covid, les orthophonistes espèrent retrouver leur patientèle habituelle et ne veulent leur faire prendre aucun risque.
« Il faut qu’on réorganise nos cabinets, explique Nicol Boulidard, la présidente de la Fédération des Orthophonistes de France qui regroupe environ 600 adhérents. Fini les salles d’attente, les jeux pour les enfants. On va devoir espacer nos rendez-vous ».
Il leur faudra des visières, des gants, pour se protéger des projections de leurs patients lorsqu’ils sont amenés à travailler près de la bouche. Du matériel qui fait souvent fait défaut.
" Les malades du Covid que nous devrons suivre seront surement très fatigués. Il faudra peut-être aller chez eux. Et puis, il y a les EHPAD ou nous intervenons régulièrement", précise Nicol Boulidard.
Des patients qu’ils devront souvent accompagner pendant plusieurs mois.
Cela dépendra de la capacité d’adaptation du patient à sa nouvelle situation. Tout ça, c’est de l’humain.
Dans ces conditions, difficile pour elle d’avaler le système de télésoin qui a été mis en place le 26 mars dernier pour permettre aux praticiens qui le souhaitaient d’accompagner virtuellement leur patient. "C’est un pis-aller, cela sert juste à maintenir le lien mais cela ne remplace pas la présence des personnes".
Elle, souhaite en tous cas retrouver son cabinet pour renouer au plus vite le contact avec ses patients qu’ils aient été victimes ou non du Covid.