Présente lors du rassemblement contre les violences sexistes et sexuelles de Rennes ce 21 novembre, Régine Komokoli témoigne des multiples violences qu'elle a subies. La seule solution qui s'est présentée à elle : la fuite, avec ses trois filles.
" Il y a un an jour pour jour j'ai été obligée de quitter le foyer conjugal avec mes 3 filles, je me suis retrouvée hébergée à l'hôtel par le 115 et ce jour-là j'ai décidé de parler de ma situation, de la violence qu'on vit, des dégâts que ça fait pour soi-même et aussi pour les enfants. C'était pas la première fois. J'en ai vécu tellement. Il fallait que ça s'arrête."Âgée aujourd'hui de 39 ans et maman de trois filles de 13, 10 et 2 ans, Régine Komokoli n'a de colère ni dans la voix ni dans les yeux quand elle témoigne de l'édifiant parcours de violence qu'elle a subi. Ce qu'elle souhaite aujourd'hui, c'est que ce qu'elle en a appris soit utile, aux autres femmes, à ses filles.
Victime de violences en République Centrafricaine, elle fuit son pays d'origine en 2001 et arrive à Paris. Elle y a ses deux premières filles avec un homme qui se révèle violent. Suite à une mesure de mise à l'abri, elle vient alors vivre à Rennes où elle rencontre son nouveau compagnon.
"La première fois qu'il m'a frappée j'étais enceinte de 8 mois, il a été condamné à 2 ans de prison avec sursis. Je suis restée hospitalisée deux mois. Ensuite, je venais d'accoucher, j'avais deux autres enfants, il s'est excusé en disant qu'il allait faire des efforts, se soigner, blablabla, donc je suis retournée vivre avec lui. J'avais pas vraiment le choix, il fallait dormir quelque part, pour les enfants, enfin c'est ce que j'ai cru à ce moment-là ..."
Témoignage fort de Régine, 39 ans, cofondatrice du collectif Kune des femmes de Villejean à #Rennes : « J’ai été confrontée à la violence conjugale. Je suis actuellement en logement provisoire pour fuir les coups du père de ma troisième fille. » #ViolencesConjugales pic.twitter.com/P4EdyAnH7p
— Linda Benotmane (@lbenotmane) November 21, 2020
Mais les violences ne cesseront pas. Jusqu'à ce 21 novembre 2019.
"Ce jour-là mon compagnon ma frappée une énième fois. Je hurlais, il a tout enregistré et quand les gendarmes sont arrivés, ils ont écouté son enregistrement et ils m'ont demandé, avec mes filles, de préparer une valise et de partir. On s'est retrouvées hébergées par le 115 à l'hôtel à Rennes, à République, puis après on nous a envoyées au Rheu dans un foyer. Mes enfants allaient à l'école à Rennes, il fallait faire la route. C'était une double peine."
Cette fois-là, Régine a dû insister pour que sa plainte soit enregistrée, et elle a finalement été classée sans suite. "Je suis citoyenne française, et subir des conditions comme ça c'est ignoble en fait."
Co-fondatrice de Kune (ensemble en esperanto), collectif de femmes du quartier Villejean où elle est hébergée provisoirement, Régine propose un cercle de parole sur les violences subies par les femmes, pour rompre la solitude face à ses situations, apprendre à ne pas avoir honte, à ne pas se sentir responsable.
"J'aimerais bien qu'on arrive à avoir ici comme à Nantes, une maison des femmes où il y ait une prise en charge globale, psychologue, avocat, tout le reste, et un suivi à long terme."
Ce samedi 21 novembre, elle était sur l'esplanade Charles de Gaulle à Rennes pour le rassemblement organisé par le collectif Nous toutes 35 à l'occasion de la journée internationale de lutte contre les violences patriarcales. Et voir un millier de personnes rassemblées pour cette cause lui a fait chaud au coeur.
Les manifestants ont repris le chant du collectif chilien Las Tesis "El violador eres tu", devenu hymne mondial dénonçant les violences faites aux femmes depuis novembre 2019
Régine a fait les démarches d'elle-même pour bénéficier d'un suivi psychologique. Et pour elle, la prochaine étape de sa guérison sera d'arriver à parler de ce sujet avec ses filles. "On en discute très peu. C'est un sujet tabou, c'est très sensible, je pense qu'il faudra à un moment arriver à en parler mais pour cela il faudra que je sois guérie moi-même. Je ne voudrais pas que mes filles vivent la même chose, reproduisent ce que j'ai vécu."