Qu'ils soient pensionnaires d'un Ehpad ou détenu en fin de peine, ils ont un point commun : avoir participé pendant plusieurs mois aux parcours culturels proposés par l'Association des Trans Musicales (ATM) pour leur faire découvrir l'univers des musiques actuelles au-delà du festival.

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Par un triste après-midi d'automne, Glwadys, 81 ans, et Albertine, 90 ans, avouent être "contentes de sortir des quatre murs" de leur Ehpad de Combourg (Ille-et-Vilaine) pour assister au concert de MoHican, groupe de hip-hop rennais accompagné par les Trans. Il y a quelques mois, les deux Bretonnes étaient "aux balances de James Eleganz", "au 'showcase' d'Underground System" et tenteront au printemps de jouer d'un instrument. "Elles sont assez fières et en parlent à leurs enfants. Cela les change des CD d'accordéon", s'amuse Nathalie, leur accompagnatrice.
 
Depuis quarante ans, les Trans, qui s'ouvrent ce mercredi à Rennes, sont devenues un acteur culturel à part entière, très impliqué dans le rapprochement entre publics locaux et artistes du monde entier.
 

Famille et personnes socialement fragiles

Christian, 56 ans, achève, lui, sa onzième année de prison et s'est découvert des talents de slameur aux ateliers d'écriture animés en prison par MoHican. Egalement inscrit dans  un "Parcours Trans", il est autorisé à sortir de prison pour manier câbles et micros dans le cadre d'un atelier organisé à l'Ubu, salle de concerts rennaise où l'association des Trans musicales (ATM) mène son travail culturel à l'année. "La poésie chantée, c'est une vraie évasion, je me sens comme un bébé qui vient d'apprendre à parler", confie-t-il. Avec 403 événements à l'année, soit plus que de concerts, le dossier de présentation de l'"action culturelle" des Trans est désormais aussi fourni que l'artistique.

Principales cibles, les scolaires, les familles ou les personnes socialement fragiles comme les mineurs non accompagnés ou les enfants de structures médico-sociales. Leur "parcours" est un mélange de rencontres d'artistes, d'ateliers de création, conférences, concerts, avec parfois l'accueil d'un artiste "en résidence" dans une zone géographique où l'offre culturelle est peu développée.
 

Les publics "aussi importants que les artistes"

"On va de 6 ans à l'Ehpad", résume Béatrice Macé, cofondatrice des Trans. Convaincue que les publics "sont aussi importants que les artistes", elle estime que ces rencontres font partie "des droits culturels des personnes".

Si les artistes sont sur scène et qu'il n'y a pas de public, ça ne s'appelle pas un concert mais des répétitions
Béatruce Macé, cofondatrice des Trans

Une prise de conscience née en 1990 avec la programmation de Kid Frost, "le must" du rap de l'époque venu de Californie. "On pensait intéresser les gamins des quartiers. Pas un seul n'est venu", se souvient-elle. "Les jeunes n'étaient jamais allés à un concert et avaient peur de ne pas savoir comment se comporter. On a compris que les conditions de la proposition artistique étaient aussi importantes que la proposition elle-même", poursuit Béatrice Macé, que ce "bug relationnel" a poussé à organiser pendant un temps les concerts hors du centre-ville.
 

"Enjeu de cohésion sociale"

"On est un acteur social avec un média artistique", plaide Marine Molard, l'une des trois salariées dédiées à l'action culturelle. Sur le plan musical, le festival rennais accompagne également chaque année des artistes locaux. "Les Trans sont précurseures dans la conviction que faire culture commune est un enjeu de cohésion sociale", souligne Benoît Careil, adjoint au maire à la Culture. Pour Vianney Marzin, directeur du Pôle de coopération pour les musiques actuelles en Pays de la Loire, "un festival est souvent la partie émergée de l'iceberg". "Aujourd'hui, les festivals associatifs prennent en compte des enjeux qui dépassent la dimension purement artistique et cherchent à avoir une utilité sociale sur leur territoire", observe-t-il.

Entre 2012 et 2015, les Trans ont planché sur leur utilité sociale dans le cadre d'un collectif de festivals bretons engagés dans le développement durable. "Pour nous, un projet culturel est tout sauf en apesanteur. Il faut apporter une attention au territoire qui nous a vu naître", souligne Béatrice Macé.
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