VIDÉO. La tour Solidor de Saint-Malo. Un donjon et une pléiade d’histoires à vendre

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La Tour Solidor à Saint-Malo
Le reportage de Séverine Breton et Jean-Michel Piron ©France 3 Bretagne

C’est l’un des emblèmes de Saint-Malo : la tour Solidor ne se visite plus guère depuis des années. Seul le rez-de-chaussée de l’immense donjon accueille parfois des expositions. Frustrés de voir les lourdes portes de bois demeurées closes, les élus malouins ont interpellé l’Etat, propriétaire des lieux. Il serait prêt à vendre, la ville, elle, prête à acheter. Les négociations ont débuté.

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"Elle est belle ! Quand on arrive à Saint-Malo, il y a les remparts bien sûr, mais il y a Solidor. Pour les marins qui rentraient de Terre-Neuve, c’était la première chose qu’ils voyaient, le signe qu’ils étaient arrivés. Solidor, c’est notre histoire" s'enflamme Jacquie, malouine depuis toujours. 

Jusqu'au 4 novembre, la tour Solidor accueille une exposition "La mer autour." Devant son parvis, les grilles sont donc ouvertes et de nombreux visiteurs se pressent pour admirer le bâtiment. "C’est comme ça, dès qu’on les entrebâille, les gens demandent s’ils peuvent entrer, sourit fièrement Christophe Bastide, l’adjoint au maire en charge du patrimoine de la ville de Saint-Malo. C’est pour cela que nous avons envie de l’ouvrir davantage."

Un caillou stratégique

La pointe rocheuse dans l’estuaire de la Rance est l’emplacement idéal pour surveiller tout ce qui se passe sur l’eau. Le site avait déjà été fortifié à l’époque gallo-romaine, puis une tour de guet avait été bâtie. En 1369, le duc Jean IV de Bretagne ordonne la construction d’un donjon. 

La ville de Saint-Malo est alors rebelle à son autorité. "Les Malouins ont un tempérament de feu, ils ont toujours été un peu rebelles, plaisante Christophe Bastide. Solidor doit permettre de surveiller la Rance et de prélever des taxes sur les marchandises transportées." Par les meurtrières et les fenêtres de guet, les hommes du duc voient tout ce qui se passe. 

Sur la tour, Jean IV de Bretagne avait fait graver "Malo au riche duc". Une manière de dire, Saint-Malo est à moi, une façon de s’emparer de la ville et de provoquer ainsi les Malouins. 

Des murs de 2 mètres d’épaisseur

Solidor est composée de trois tours réunies par de petites courtines. "Une construction très savante, très complexe, parfaitement adaptée aux nouvelles armes de l’époque" précise Christophe Bastide. Avec ses 23 mètres et ses murs de 2 mètres d’épaisseur, la tour veut impressionner.  

À partir de la Révolution et jusqu’aux débuts du XIXème siècle, Solidor est transformée en prison. Des prêtres et des religieuses, réfractaires aux idées de 1789, y sont d’abord enfermés. Puis les cellules servent à emprisonner les marins anglais qui ont eu la mauvaise idée d’attaquer les navires malouins, et celle, pire encore, de se faire prendre.  

Sur la porte d’une cellule, ces marins ont laissé des traces de leurs passages. Philippe Sartori, le conservateur des musées de Saint-Malo, fait courir la lampe de son téléphone sur le bois et le passé refait surface. "On voit qu’un certain Taylor, un Marchal ont gravé leurs noms. D’autres ont laissé leurs initiales et puis, là, dit-il en braquant la lumière, un monsieur Hull a été détenu ici en 1810. Au-dessus de son nom, il a dessiné son bateau. On entrevoit les deux mâts, les canons, décrit-il émerveillé, c’est tout l’imaginaire malouin qui est là, c’est magique."

Monument historique depuis 1886

La tour a été classée monument historique en 1886. "Elle a toujours appartenu à l’Etat, explique Christophe Bastide. Elle a parfois été confiée à la mairie. Entre 1970 et 2014, elle a, par exemple, hébergé le musée des cap-horniers, elle abrite en ce moment une exposition sur la mer,  mais elle est la propriété de l’Etat."

Lasse de la voir fermée, la mairie s’est tournée vers l’Etat. Des négociations ont débuté. La ville de Saint-Malo aimerait acheter la tour, mais pas à n’importe quel prix et pas non plus dans n’importe quel état.

Des expertises doivent être réalisées pour estimer l’ampleur des travaux de rénovation à prévoir. "C’est un patrimoine d’une grande valeur historique, déclare Christophe Bastide, mais qui pourrait se révéler très onéreux." Les élus préfèrent prendre le temps de la réflexion mais rassurent : la tour restera un bien public, Solidor restera Solidor.  

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