Autrefois, chaque champ avait un nom. Avec le remembrement, ces noms ont disparu et ont été remplacés par des numéros. A Saint-Pôtan, près de Dinan, dans les Côtes-d'Armor, une association les a retrouvés.
Le Courtil pour désigner le jardin, les Fresches, pour les terres pauvres, les Genetâts, pour les parcelles où poussaient les genêts… Voici quelques-uns des noms de champs retrouvés par l'association Saint-Pôtan patrimoines.
André Rouxel, son président, explique que "les noms de champs, les noms anciens ont une valeur patrimoniale et les abandonner, c’est perdre un peu d’histoire". Son épouse, Françoise Rouxel, membre de l'association, ajoute que l’objectif de cette collecte était de garder la mémoire.
Les noms des champs évoquaient parfois un usage, une tradition ou étaient liés à la topographie des lieux. Le nom situait aussi le champ par rapport à la ferme.
Mais après le remembrement en Bretagne, ces noms, parfois en gallo ou en breton, sont tombés dans l’oubli et ont été remplacés par des numéros.
Des cadastres anciens... avant le remembrement
André Rouxel rappelle qu’après le remembrement, six ou sept parcelles étaient remplacées par un grand champ, auquel on ne donnait plus de nom, mais un numéro.
Les membres de Saint-Pôtan patrimoines se sont donc appuyés sur les cadastres datant d'avant le remembrement, le cadastre napoléonien, par exemple et celui de 1934.
Les noms ne figuraient pas sur le cadastre, puisque c'est une tradition orale, mais les relevés ont permis de retrouver les parcelles.
Secteur par secteur, les membres de l’association ont donc dressé la liste des noms des anciennes parcelles, en les situant sur la carte.
Ces noms chargés d’histoire et de poésie
Cet inventaire a été possible grâce à quelque 80 personnes, des anciens agriculteurs essentiellement et quelques particuliers. 951 noms de champ ont été collectés, sur 1.000 environ.
On a retrouvé les noms existants qui ont été transmis par voie orale, de génération en génération, de paysan en paysan. Il y a le champ de la petite Jeannette, le champ du Pont aux chats, le champ de la Lande de la dispute, le Courtil des fous....
André RouxelPrésident de l'association Saint-Pôtan patrimoines
D'autres se sont intéressés à ce type de collecte. André Cornec, dans le Finistère, a travaillé sur le nom des champs dans le canton de Briec, au nord de Quimper. Un travail qui a débouché sur une thèse consacrée à la microtoponymie.
Sur les 20.000 noms de champs étudiés, il a recensé 8.300 fois le mot "park" pour nommer une parcelle. "Park" en breton signifie champ clos par un talus. Il y a par exemple Park moan, champ étroit, ou Park hir, champ long ou Park bras, grand champ.
A Saint-Pôtan, il n'y a pas de "park", mais des "clos", c'est le champ, en gallo. C'est par exemple, le Clos d'l'Hôté, le champ près de la maison.
Peut-être un jour, des universitaires se pencheront à nouveau sur ce sujet, espèrent les membres de l'association de Saint-Pôtan.