A Arradon, une vieille maison en pierre construite sur le domaine public maritime est en sursis. Les propriétaires viennent de recevoir une injonction pour la démolir à leurs frais d'ici six mois. Ils réclament une application plus souple de la loi Littoral.
Un paysage de carte postale. Une charmante petite demeurre en pierre avec sa petite tour, construite à la fin du 19ème siècle les pieds dans l’eau, avec une vue imprenable sur le Golfe du Morbihan. La maison de "Pen er men" ne laisse pas indifférent.
" Cette maison a une histoire extraordinaire . Elle a été donnée à mon grand-père, le Général Brosset, compagnon de la Libération, commandant des Forces Françaises Libres. Ma mère, qui a aujourd'hui 86 ans, l'a toujours connue " explique Christophe Triboulet, l'un des petits-enfants qui profite et utilise ce petit havre de paix comme résidence secondaire durant les beaux jours. Mais pour combien de temps encore ?
En effet, la famille a reçu début début juin une injonction pour démolir la propriété familiale. Ils ont même du provisionner 15 000 euros pour les travaux à venir.
En fait, la famille Triboulet est propriétaire des murs mais pas du terrain qui, sur 300 m2, est une emprise sur la mer et donc un élément du domaine public maritime.
Des décennies de tranquillité
Les propriétaires ont tout de même pu profiter d’un siècle de tranquilité grâce aux autorisations d’occupation temporaire (AOT) du domaine public qui étaient tacitement reconduites tous les dix ans. La fameuse loi Littorale de 1986 va tout changer. En 1992, les autorisations sont refusées.
Commence alors un bras de fer juridique qui va durer 20 ans. Du tribunal administratif à la cour européenne des droits de l’homme, Christophe Triboulet n’a jamais obtenu gain de cause. Il ne décolère pas:" L'Etat n'est pas là pour démolir ce qu'ont su préserver nos parents et nos grands-parents."
En 2011, à la veille de l’élection présidentielle, il obtient du chef de l’Etat de l’époque, Nicolas SarKozy, un ultime sursis. L’autorisation d’occupation temporaire est reconduite pour 10 ans.
Un trésor du patrimoine morbihannais
Le 1er janvier 2022 la petite maison de pierre sera donc normalement "rayée de la carte" .
Une maison qui fait pourtant partie intégrante du paysage. D’ailleurs, l’anse sur laquelle se situe la bâtisse a été classée par la direction des affaires culturelles. Autre preuve de l’intérêt patrimonial de la propriété, sa démolition devra recevoir l’aval de l’architecte des Bâtiments de France.
Pour stopper le compte à rebours, Christophe Triboulet va s’en remettre une nouvelle fois au premier personnage de l’Etat, le président de la République. Avec l’aide d’une page Facebook et d’une pétition en ligne qui a déjà réuni 40 000 signatures, il souhaite attirer l’attention d’Emmanuel Macron pour obtenir le droit de préserver la demeure familiale. " Nous ne pouvons pas racheter le terrain qui vaut aujourd'hui une fortune vu la flambée de l'immobilier dans le Morbihan. Nous voulons juste à nouveau obtenir une autorisation d'occupation temporaire "tacite", comme cela était le cas auparavant" explique le propriétaire des lieux.
Dernière option envisageable pour éviter la démolition : le rachat de la maison par les collectivités locales. Elle pourrait être ainsi le site relais qui manque pour l’instant au parc naturel du Golfe du Morbihan.
" La démolition n'est pas envisageable. Pour moi, cette maison restera là ad vitam aeternam. Seuls, la nature et le réchauffement climatique pourront la détruire ! " prévient Christophe Triboulet.