Remaniement : Jean-Yves le Drian reste au Ministère des Affaires étrangères

Le remaniement a été annoncé ce 6 juillet. Pas de changement pour Jean-Yves Le Drian qui conserve son poste de ministre de l'Europe et des Affaires étrangères. Retour sur le parcours de l'ancien président de la région Bretagne, engagé dans la vie publique depuis plus de 40 ans.

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Depuis 2017, Jean-Yves Le Drian et Emmanuel Macron travaillent côte à côte, l'un dans l'ombre, l'autre dans la lumière. A un moment, il a été pressenti pour succéder à Edouard Philippe, comme premier ministre. Le nouveau gouvernement a été annoncé ce lundi. Il garde finalement son poste de Ministre de l'Europe et des Affaires étrangères. Mais qui est Jean-Yves Le Drian ? 

 

Issu d'un milieu modeste


Fils d'ouvrier morbihannais, Jean-Yves Le Drian est né en 1947 à Lorient dans une baraque en bois datant de l'après-guerre. Puis il a grandi à Lanester avec ses parents et ses deux sœurs. Son père était chef magasinier dans une entreprise de vente de pièces détachées pour l'automobile, sa mère, couturière en usine. "Si la famille n'avait pas beaucoup d'argent, nous étions heureux. A la maison, on cherchait à être moderne. Nous avons même été les premiers dans notre quartier à faire installer le téléphone !" explique sa sœur cadette, Thérèse Thiery, ex-maire de Lanester, dans un entretien accordé aux Echos l'an dernier.

Très jeune, Jean-Yves Le Drian a l'engagement public chevillé au corps. "J'étais héritier d'une tradition familiale de militantisme, de lutte au sein du mouvement ouvrier" raconte-t-il dans une interview télévisée datant des années 70.


Un héritage militant


En 1968 alors qu'éclate la révolte du printemps, Jean-Yves Le Drian est étudiant à Rennes, il devient le porte-parole de l'UNEF, l'union nationale des étudiants de France.

Agrégé d'histoire contemporaine à 24 ans, il enseignera à l'université de Rennes pendant 20 ans. Parallèlement,  il devient conseiller municipal puis adjoint au maire à la ville de Lorient dès 1977. Un mandat qui marque le début de sa carrière politique.

Il adhère au Parti socialiste en 1974.

Il a 30 ans lorsqu'il est élu député socialiste du Morbihan pour la première fois. Nous sommes en 1978, il le sera pendant 21 ans. Très vite, imprégné par une adolescence à Lorient, port militaire, le jeune élu s'intéresse aux questions de défense, ce qui restera son domaine de prédilection. En 1981, il est élu maire de Lorient. Il le restera jusqu'en 1998.

Jean-Yves Le Drian (PS) / Récit : I. Rettig - Montage : H. Notat


La mer, au sommet de l'Etat


1991, Edith Cresson prend la tête du gouvernement sous la présidence Mitterrand. Jean-Yves Le Drian est appelé à Paris pour le poste de secrétaire d'Etat à la mer, avec une urgence à traiter : la réforme de la filière portuaire et avec elle l'épineux statut des dockers. Une période de grèves intenses s'ensuivra qui coûtera au petit-fils de docker breton sa réélection en 1993.


La Bretagne, au coeur


En 2004, il devient le premier président socialiste de la région Bretagne et le restera pendant 10 ans, avant d'être réélu en 2015.

Le journaliste malouin Nicolas Legendre a enquêté sur le plus influent des Bretons dans un livre "Le phénomène Le Drian" publié en 2017. Pour lui, l'un des faits marquants de son premier mandat à la Région, c'est le travail réalisé sur l'image de la Bretagne et la fierté bretonne.

Cela a a été tout son coup de maître politique. Tout ce qui était porté par le monde culturel, associatif, militant...  la droite n'avait jamais pensé à les utiliser. Lui, Jean-Yves Le Drian, très malin, et aussi parce que ça faisait partie de ses convictions, les a repris à son compte et l'a intégré dans son logiciel politique.

Nicolas Legendre, auteur du livre "Le phénomène Le Drian"

Pour lui, l'homme a cédé "aux sirènes du marketing territorial et l'époque étant au marketing, il a fait de la Bretagne une région désirable" rajoute-t-il.

Cet amour pour sa région natale va le suivre tout au long de son parcours. Il est et restera au service de sa région. S'il peut en faire profiter la Bretagne, il le fera. C'est une de ses spécialités. Le breton sait user de son épais carnet d'adresses pour faire avancer des dossiers, comme la LGV par exemple, ou encore le pacte électrique breton. Gaël Le Saout qui a été sa conseillère en communication pendant six ans explique : "On était en 2010, il a senti que la région devait être plus autonome et avoir son propre réseau. Le développement des énergies renouvelables a été fondateur pour la Bretagne".

Un amour viscéral pour Lorient et la Bretagne

Jean-Yves Le Drian chérit Lanester, Lorient, et la Bretagne plus largement. Un amour de sa région sincère qu'il a su utiliser. "C'était opportun politiquement et porteur : il a su utiliser cet amour pour conquérir une part de l'électorat breton " commente Nicolas Legendre.

"Il a l'ADN de la Bretagne qui coule dans son sang" témoigne encore Gaël Le Saout.

Ce n'est pas du folklore, c'est viscéral. C'est difficile à expliquer, c'est quelque chose qui se vit quand on le côtoie.

Même du quai d'Orsay, le ministre suit toujours les dossiers bretons. En période de championnat, même du bout du monde, il garde un œil sur les résultats du FC Lorient !

Après 13 ans à la tête du Conseil régional de Bretagne, Jean-Yves Le Drian va donc passer la main ce vendredi 2 juin. Le nouveau ministre de l'Europe et des Affaires étarngères présentera sa démission à 14h30. Retour sur ses trois mandats à la Présidence de la région Bretagne


Chef de guerre : une plongée dans un autre monde


2011. En même temps que le travail sur la régionalisation, se joue la pré-campagne du candidat Hollande. Jean-Yves Le Drian maîtrise ses questions, il les suit depuis 30 ans.

Le 6 mai 2012, François Hollande, son ami de toujours, est élu président de la République et pense à lui pour le ministère de la défense, dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Un portefeuille qu'il avait déjà refusé deux fois par le passé à Nicolas Sarkozy. Cette fois est la bonne.

Quinze jours seulement après sa prise de fonction, le nouveau ministre se rend en Afghanistan. Sur le tarmac, devant les cercueils des quatre militaires français morts au combat, l'homme prend immédiatement la mesure de sa nouvelle fonction. Un peu plus tard, il racontera son premier sommet de l'OTAN :

Je me suis retrouvé à une grande table, entre Mme Merkel et Mr Cameron, en face de moi, il y avait Mr Obama. Je me suis retourné, et j'ai dit, j'ai du me tromper de salle ! C'est une plongée dans un autre monde.

Sous François Hollande puis sous la présidence d'Emmanuel Macron, Jean-Yves Le Drian est sur tous les fronts. Le Breton vend des dizaines de rafales et de chasseurs bombardiers à travers le monde.. Il est devenu chef de guerre de la sixième armée du monde.

"Au départ, la feuille de route défense, c'était le retrait d'Afghanistan. Mais très vite, il y a eu la la guerre au Mali, les attentats, Daech.... la feuille de route a été beaucoup plus chargée, et pas écrite d'avance » témoigne Gaël Le Saout qui l'a suivi de la région au ministère de la Défense. Mais sa conseillère assure: "Il avait préparé son arrivée, il avait déjà senti que la cyber-sécurité et la cyber-défense allaient être les sujets de la décennie".

Un élan dont il fera, encore, profiter la région Bretagne, avec l'installation du pôle d'excellence à Bruz. C'est une nouvelle armée, "l'armée cyber" qui est mise en place, dans la continuité des missions de la DGA-MI (direction générale de l'armement-mission d'information) déjà implantée dans la capitale bretonne.

Rennes est ainsi devenue une plaque tournante de la cyberdéfense dans l'Hexagone.


L'un des ministres préférés des Français


Jean-Yves Le Drian a globalement toujours eu une bonne image dans le cœur des Français, dans le peloton de tête des ministres préférés. Est-il resté populaire parce qu'il a évolué dans l'ombre ? Sans doute un peu pour le journaliste Nicolas Legendre : "Les postes à la défense aux affaires étrangères, ce ne sont pas les ministères les plus clivants, c'est plus facile de durer plus longtemps sur ces ministères-là".

Il a un sens de l'Etat fort mais s'il n'est pas d'accord, il sait le dire. A plusieurs reprises dans sa carrière, il il a mis sa démission dans la balance. Dernière fois en date, selon les informations du Canard Enchaîné, il aurait menacé de quitter le gouvernement, afin d’éviter la fermeture de la Fonderie de Bretagne, à Caudan. "Un dossier qu'il a suivi comme le lait sur le feu" raconte son ancienne collaboratrice.

Pour autant, son positionnement plutôt central peut agacer. Certains Ledrianophiles sont devenus très critiques. Son ralliement à Emmanuel Macron en 2017 et le fait qu'il quitte le parti socialiste l'année suivante, après 44 années ont été vécues par certains comme une forme de traîtrise.

L'annonce du retrait de Jean-Yves Le Drian du Parti Socialiste n'est pas vraiment une surprise. Cela fait en effet déjà un moment que cet ancien "éléphant" socialiste est de plus en plus "En Marche". Retour sur son engagement politique .

 

Ses qualités


Gaël le Saout l'affirme "C'est d'abord un bosseur. Il travaille ses dossiers, il les connait par cœur. Sa deuxième qualité : c'est l'écoute et l'empathie. Il aime aller au contact". Après des années à parcourir le monde, sa conseillère a toujours été touchée par sa capacité de résistance : "le contact humain le requinque, grâce aux rencontres, il est capable de repartir malgré des heures de vol et de décalage horaire. En somme, il est comme les navigateurs."

C'est peut-être son côté breton, il arrive à dormir 15 minutes et à récupérer afin d'être d'attaque et clairvoyant .


Un menhir


Une résistance aussi au plus haut sommet de l'Etat. "Un homme d'expérience, un vieux routier de la politique qui est en poste de façon continue depuis 2012 – une longévité rare - qui plus est sur des dossiers stratégiques, en lien direct avec le président de la République" analyse de son côté Nicolas Legendre.

L'homme a la réputation d'être un bloc granitique, d'être solide depuis toujours. Il sécurise. Sa collaboratrice Gaël Le Saout l'assure "Les Bretons savent qu'il est toujours là pour eux. Je crois que cette image là, il l'a aussi au niveau national". 

Un observateur de la vie politique analyse : "Jean-Yves Le Drian, ce qu'il aime, c'est avoir les mains dans le cambouis et pas forcément dans la lumière". "Le poste de Premier Ministre est un poste qu'il aurait pu vouloir atteindre dans les années 90 ; aujourd’hui à 72 ans, sa carrière politique est en grande partie derrière lui. Ce qu'il fait actuellement lui convient très bien".
 

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