REPORTAGE. "Nos clients vont aller voir ailleurs" : l'inquiétude des mareyeurs après un mois sans pêche dans le golfe de Gacogne

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Le reportage de Yoann Etienne et Nicolas Corbard ©France 3 Bretagne

Pour protéger les dauphins dans le golfe de Gascogne, 450 bateaux français vont devoir rester à quai pendant un mois. Une interruption qui impacte les pêcheurs, mais aussi la filière en aval. À Lorient, les mareyeurs s'inquiètent. La mairie a décidé de mettre symboliquement en berne les drapeaux de l’Hôtel de ville et de la maison de l’agglomération durant cette période.

En Bretagne-sud, l'interruption de la pêche, décidée pour un mois dans le golfe de Gascogne pour protéger les dauphins, met en colère les pêcheurs. Mais elle plonge aussi le monde du mareyage dans un profond désarroi.

"Cette fermeture va se traduire par 8.000 tonnes de produits de la mer en moins et représenter une perte de 60 millions d'euros de chiffre d'affaires pour le mareyage, déjà fragilisé par le Brexit, a prévenu Frédéric Toulliou, président de l'Union du mareyage français (UMF) et de l'association interprofessionnelle France Filière Pêche.

LIRE : Le golfe de Gascogne fermé pendant un mois. "Il n'y a rien de pire pour un pêcheur que de rester à quai"

Sur les étals, des manques sur le merlu, la sole, le bar...  

À Lorient, Eric Guivarch fait partie de ces professionnels très inquiets pour l'activité de mareyage des prochaines semaines, et même au-delà.

"On a encore du poisson pour le début de semaine, puisque les bateaux viennent tous de rentrer avant l'interruption" explique le directeur de l'entreprise Laffray. Mais très rapidement, il va y avoir un coup de frein dans les approvisionnements qui viennent du Golfe de Gascogne. Avec à la clé, des manques pour certaines espèces qui vont se faire plus rares sur les étals".

Et le mareyeur de détailler les espèces concernées : le merlu, la sole, le bar aussi. Et s'il y a moins de poisson, les prix risquent un peu d'augmenter.

"On est l'aval de la filière, on subit"

 Alors que le merlu représente près de 70% de ses apports locaux, le mareyeur estime la baisse de volumes de ce poisson entre 30 et 40 tonnes sur 1 mois, ce qui va impacter l'activité de son entreprise spécialisée dans le filetage et ses 37 salariés.

"Potentiellement, cela représente 15 à 20% de l'activité salariée sur la chaîne qui va être impactée. On est l'aval de la filière, on subit. À terre, on emploie énormément de monde pour que cette pêche soit valorisée, distribuée au plus grand nombre en France à l'étranger. Et maintenant, la question c'est de savoir comment nos clients vont réagir face à la baisse de certains apports."

"Bien sûr, il y a des produits qu'on peut trouver sur le chalutage de grands fonds, il y a la langoustine qui va toujours être présente, souligne Eric Guivarch. On va trouver aussi des approvisionnements sur les ports de la Manche qui restent en pêche normale. Mais il va y avoir un impact."

"On a notamment des clients sur l'exportation. Ils ne vont pas rester sans acheter de poisson, donc ils vont peut-être se détourner de la Bretagne pendant un mois, se demande le mareyeur lorientais. Et comment vont-ils revenir en mars ? C'est ça la grande question. D'autant qu'ils savent que cette histoire va se reproduire l'an prochain puisque l'interdiction sera reconduite en 2025 et 2026. Pour nous, c'est soudain, brutal, radical." 

Le ministre promet des indemnisations 

Pour compenser, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a promis ce 19 janvier des indemnisations variant "entre 80 et 85% du chiffre d’affaires pour tous les bateaux" concernés par l'interdiction.

Il a promis également d'accompagner le reste de la filière avec notamment une aide aux mareyeurs qui ira "jusqu'à 75% de leurs pertes".

Les drapeaux de la ville de Lorient en berne

"Je me bats pour que Lorient reste un grand port de débarquement, le premier de France en valeur, et que la filière des produits de la mer soit pérennisée, souligne Fabrice Loher, le maire de Lorient, dans un communiqué. Je mène cet important combat car cette filière subit une succession de crises sans précédent." Il déclare que "si chacun peut comprendre et partager l'ambition de protection des cétacés, encore faut-il objectiver les données possibles. C'était l'objet des mesures travaillées avec la profession dans le cadre du plan d'actions en contrepartie de l'équipement des navires en caméras et dispositifs d'effarouchement, rappelle l'élu. La pêche aurait ainsi pu rester ouverte".

Le maire de Lorient, qui estime que "c'est ce combat-là qu'il faudra gagner quand le Conseil d'Etat jugera au fond ces mesures", appelle les élus locaux à manifester leur soutien à la filière pêche.

Il a également décidé de mettre symboliquement en berne les drapeaux de l’Hôtel de ville et de la maison de l’Agglomération "et ce, pendant toute la période de fermeture du Golfe de Gascogne, soit jusqu'au 20 février".

(Avec Yoann Etienne)

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