Le golfe de Gascogne fermé pendant 1 mois. "Il n’y a rien de pire pour un pêcheur que de rester à quai"

Ce dimanche 21 janvier, les bateaux de Lorient et des autres ports sont rentrés se mettre à quai pour un mois. Pour protéger les dauphins, le Conseil d’Etat a interdit la pêche dans le golfe de Gascogne jusqu’au 20 février. Les 450 bateaux de la façade Atlantique s’inquiètent de l’impact de la mesure sur une filière déjà fragilisée par le Brexit, la hausse du prix du gasoil...

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"C’est un coup de poignard pour la pêche française", fulmine Olivier Le Nézet, le Président du Comité National des Pêches Maritimes. Sur le quai, il regarde les bateaux effectuer leur dernière débarque avant un mois.

A compter du 22 janvier, le golfe de Gascogne sera interdit aux bateaux de pêche pour protéger les dauphins. L’hiver dernier (2022- 2023), 1 482 carcasses de dauphins ont été retrouvées échouées sur le littoral. Les scientifiques estiment que 10 000 individus périssent au large à cause des filets de pêche dans lesquels ils se font prendre.

Plusieurs organisations non gouvernementales avaient saisi le Conseil d’Etat pour demander des restrictions de pêche. Le 22 décembre, la décision est tombée : les bateaux ne pourront pas fréquenter le golfe de Gascogne et devront rester à quai.

600 000 euros de chiffre d'affaire en moins

Eric Guygniec, est responsable de l'APAK, l’Armement de la Pêche Artisanale de Keroman. 5 de ses six bateaux vont rester à quai pendant 1 mois." Il n’y a rien de pire pour un pêcheur que de rester à quai, s’agace-t-il. Il y avait déjà eu le Covid, le Brexit, la hausse du prix du gasoil… On veut la fin de la pêche ? interroge-t-il.

Il a fait ses comptes, en pleine saison du merlu, "un mois à quai, c’est 20 tonnes de poissons en moins… une perte de pas moins de 600 000 euros."

L’Union du mareyage français a détaillé les volumes qui pourraient être perdus pour la filière : sur les 180 000 tonnes de poissons débarquées chaque année dans les criées françaises, 8 000 tonnes ne seront pas pêchées. Pour la pêche, c’est une perte de chiffre d’affaires de 60 millions d’euros. Avec respectivement 3 000 tonnes et 1 800 tonnes en moins, le merlu et le maquereau devraient enregistrer une réduction de 28 % chacun.

"On a pourtant fait des efforts note Olivier Le Nézet. Depuis les années 90, on a détruit 60% de notre flotte pour qu’elle soit en adéquation avec la ressource… et on en arrive là. "

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Toute la filière impactée 


"Et comment va faire la filière ?, interroge aussi le président du Comité des Pêches. "Il y a les pêcheurs mais aussi les mareyeurs, les transporteurs, les poissonniers ? On va trouver quoi sur les étals ? La Chine c’est 40% de la flotte de pêche mondiale et on sait que leurs bateaux exploitent les fonds marins et les hommes. Les ONG par qui tout cela arrive ne sont ni des défenseurs, ni des protecteurs, ce sont des fossoyeurs de la pêche française."

Les ONG par qui tout cela arrive ne sont ni des défenseurs, ni des protecteurs, ce sont des fossoyeurs de la pêche française

Olivier Le Nézet, Président du Comité National des Pêches Maritimes

La filière pêche française représente 40 000 emplois en France dont 13 000 pêcheurs (pour 4 200 navires dont 3 000 opèrent dans le golfe de Gascogne).

"Les mareyeurs vont aller voir ailleurs. Evidemment ! ", lance Eric Guygniec. "On risque de perdre des marchés. Alors que déjà, 80% du poisson est importé ! Si on ne veut plus de nous, qu’on nous le dise et on arrête tout. "

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Des indemnisations prévues

L’Etat a promis des indemnisations. Mais les chiffres varient. Certains parlent de 70%, d’autres de 85%. "Mais on les aura quand ?,  s’inquiète Eric Guygniec. Dans 6 mois ? Dans un an ? Moi les gars, il va bien falloir qu’ils touchent un salaire à la fin du mois, mais on fait comment quand on n’a pas de trésorerie ? "

Nous les dauphins, on veut les voir devant notre étrave et pas dans nos filets

Eric Guygniec Président de l'Armement de la pêche artisanale de Keroman (Apak)

"Nous les dauphins, on veut les voir devant notre étrave et pas dans nos filets, affirme Eric Guygniec, mais il faut qu’on puisse travailler."

Une décision qui ne va pas dans le bon sens 

Olivier Le Nézet en est d’ailleurs persuadé, cette décision ne va pas dans le bon sens. Pendant un mois, les pêcheurs ne vont pouvoir faire aucune observation sur les dauphins. "Notre objectif, c’est de trouver des solutions pour ne pas les capturer. L’argent qui va être dépensé pour nous indemniser aurait pu servir à trouver des solutions pérennes pour mieux comprendre et mieux protéger les cétacés. D’ailleurs, ajoute-t-il, certains ne sont pas victimes de la pêche mais sans doute du réchauffement climatique."

Ollivier Le Nézet a annoncé que le Comité National des Pêches allait attaquer la décision. 

( avec Nicolas Corbard et Yoann Etienne )

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