Brexit : la pêche sous haute tension

Quatre ans après le vote du référendum en faveur du Brexit, les termes de la sortie du Royaume-Uni sont toujours en cours de négociation. La pêche constitue un point de blocage majeur.

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Le Royaume Uni, État côtier indépendant, souhaite réduire aux bateaux européens l’accès de ses eaux.
La Grande Bretagne dispose d’une importante zone maritime, ce qui la place à la troisième place parmi les pays pêcheurs de l’UE. La France, la Belgique et les Pays-Bas capturent jusqu’à 80% de leurs prises dans les eaux britanniques entre 6 et 12 milles nautiques.  Et 2/3 des pêcheurs français exploitent ces dernières.
De quoi électriser les négociations lorsque le Royaume Uni menace d’interdire ces zones aux bateaux européens. 

Brexit : à qui appartient le poisson ?

« La plupart des poissons réalisent des grands cycles de migrations en fonction de leurs phases de vie. Lorsque le poisson est adulte il se nourrit et pond à des endroits différents, explique Clara Ulrich, chercheuse halieute et directrice adjointe à la direction scientifique de l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer). Les conditions hydrographiques : les courants, la profondeur, l’oxygénation de l’eau ou encore l’abondance d’autres organismes marins font que les eaux britanniques sont favorables pour les poissons adultes. »
Les poissons matures pondent le long des côtes britanniques. Ironie du sort, les œufs sont entrainés par les courants vers les Pays-Bas, le Danemark, la Belgique et la France, au Sud de la mer du Nord. Les juvéniles se développeront là-bas avant de revenir dans les eaux saxonnes.

Avec le changement climatique, les eaux britanniques devraient être encore plus riches en poissons. Les conditions physiques et chimiques de l’océan changent, modifiant ainsi la répartition des habitats.

Les espèces traditionnelles des eaux tempérées sont maintenant plus nombreuses au Nord dans les eaux Britanniques que dans les eaux espagnoles ou françaises.

Dans les eaux britanniques le poisson est abondant et les espèces sont nombreuses. On y retrouve toutes les espèces traditionnelles de l’Atlantique Nord.

Des poissons de fond comme la sole, la plie, le cabillaud, l’églefin… Et des pêcheries pélagiques comme le maquereau, le hareng, le chinchard. Puis il y a aussi des crustacés tels que la langoustine, l’araignée, le crabe et le homard. Il y a à peu près tout ce qui fait nos étalages classiques

Privilégier une pêche durable

Sans accord, le Royaume-Uni pourrait fermer ses eaux à l’UE. Où iront les bateaux privés de ces zones de pêche historiques ? Les pêcheurs français s’inquiètent d'une baisse très importante de leur activité. Certains craignent de voir s'effondrer les filières de la pêche suite à une diminution des stocks de poissons débarqués dans les différents ports de l'hexagone. Une fermeture des eaux britanniques pourrait inciter les navires européens à se rabattre en grand nombre sur les côtes françaises. L'histoire pourrait se répéter mais cette fois ci à l'avantage des britanniques.
Dans les années 70, ces derniers ont gardé le souvenir amer de la Guerre de la Morue. L’Islande, consciente de la présence d'immenses stocks de cabillaud dans ses eaux territoriales a chassé par la force les chalutiers britanniques amorçant ainsi le déclin de la pêche au Royaume Uni.

Ce sont des phénomènes qu’on a observé dans le passé et on s’attend à les observer à nouveau.

Clara Ulrich

L’Union Européenne souhaite maintenir les accords de pêche déterminés par la Politique Commune de la Pêche (PCP). Celle-ci répartie, entre autres, annuellement les quotas de captures entre les États membres. Si un État n’est plus soumis aux règles européennes, il est libre de gérer ses propres quotas de pêche comme il l’entend. Pour l’instant, le Royaume-Uni souhaite définir la part des quotas de ses pêcheurs. En cas de « no deal », la Grande-Bretagne souhaite négocier avec l’Union Européenne l’accès à ses eaux territoriales et des droits de pêche spécifiques. C’est le cas aujourd’hui pour la Norvège, l’Islande ou les Féroé.

​​​​​​Le risque est qu’il n’y ait plus d’engagements sur des règles de pêche durables. Et il y a encore moins d’obligations internationales obligeant les états à respecter la réglementation des zones de pêche.

Clara Ulrich

À la recherche d’un compromis

En cas de « no deal » les bateaux européens n’auront plus accès aux eaux britanniques. Mais Bruxelles dispose d’un moyen de pression. L’essentiel des captures britanniques étant revendu sur les marchés français et européens, la menace d'une taxation sur leurs exportations et la vente des produits de la mer devrait provoquer une onde de choc sur la filière de la pêche britannique. Anglais et Européens campent sur leur positon et n’arrivent toujours pas à trouver de compromis. Les négociations entre les deux parties se poursuivent aujourd'hui à la recherche d'un accord gagnant gagnant.

Des négociations toujours en cours

La question de la pêche constitue toujours un obstacle à un accord définitif. « Nous n'y sommes pas encore. Il reste beaucoup de travail devant nous », a affirmé le porte-parole de la Commission à l’AFP. « Et nous n'avons pas encore trouvé de solution sur la pêche », l'un des sujets les plus sensibles, a-t-il reconnu. Au Royaume-Uni, la valeur symbolique de la pêche est beaucoup plus forte que son poids économique. Les pêcheries européennes sont imbriquées depuis très longtemps en Manche et en Mer du Nord. Le Brexit remet en question un équilibre établi depuis près d'un demi-siècle et il n'est pas toujours pas sûr qu'une solution soit trouvée d'ici le 31 décembre 2020.
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