Entre omniprésence des enjeux économiques et immortalité de la légende, j'ai assisté à mon premier départ d'une étape Tour de France entre Tours et Saint-Amand Montrond.
Des légendes à portée du regard
Raymond Poulidor. L’éternel second du Tour de France, « Poupou », se retrouve face à moi. Ou plutôt, je me retrouve face à lui. Je n’ai jamais vu ses exploits en direct. Mais la légende du Tour me les a soufflés à l’oreille. Je suis bien trop jeune. La passion du Tour commence pour moi dans les années 2000 : celles d’Armstrong et de l’US Postal. Les dernières révélations ont fait de l’Américain un tricheur (à juste titre). Je préfère garder de lui ces souvenirs, ceux d’un champion : l’arrivée avec Pantani au Ventoux en 2000, la folle montée de Luz-Ardiden en 2003, le duel entre l’américain et Ulrich pendant ses quelques années. Qu’importe qu’il se soit dopé ; il m’a, à sa manière, fait rêver. L’homme qui dépasse ses limites et atteint les sommets de la condition physique humaine devient l’idole du jeune garçon, et force l’admiration de l’adulte.
Une grande ferveur populaire
Depuis ces années 2000, l’été est pour moi, comme il l’est depuis 1903 pour beaucoup de Français, synonyme de Tour de France. Je le regarde et le savoure ainsi chaque année devant la télé, ou quand le tracé m’en donne l’opportunité sur le bord des routes. Il me restait à le découvrir de l’intérieur. C’est chose faite depuis aujourd’hui. En ce vendredi 12 juillet 2013, en tant que stagiaire à France 3 Centre, j’accompagne une équipe de journalistes. Départ d'Orléans direction Tours pour y saisir l’ambiance et la ferveur d’avant départ. Nous ne sommes pas déçus, les Tourangeaux se sont fortement mobilisés. C’est généralement en famille que les habitants viennent s’imprégner de l’atmosphère qui règne le long de la Loire sur l'avenue André Malraux au pied de la bibliothèque municipale. Les différents drapeaux, maillots et casquettes sont arborés fièrement par la foule de plus en plus nombreuse à mesure que la matinée s’écoule. Les plus chanceux ont accès au village départ, où l’on trouve les ingrédients qui donnent toute sa saveur au Tour : anciens coureurs et légendes vivantes, démonstrations festives, stands prônant la richesse du terroir, et aussi… le business.
L'omniprésence des marques
Parce que ce qui se dégage quand même bien de ce village départ, c’est l’opulence, les moyens mis en œuvre par les différents partenaires commerciaux. Quand Cochonou distribue du saucisson à foison, c’est bien pour faire de la communication et pour qu'il y ait à terme un retour sur investissement. Mais sans Cochonou, sans Carrefour, sans Antargaz, sans partenaire financier point de grande boucle, c'est un fait. Sans annonceur, la télévision ne rentrerait pas dans l'arène et sans elle le Tour n'aurait pas le succès populaire qu'on lui connaît.
Les premières voitures de la caravane publicitaire commencent à partir. Les différents marques ne s’y trompent pas : le Tour est en termes de communication et d’affluence l’évènement sportif français le plus important de l’année, et le plus suivi mondialement après les Jeux Olympiques et la Coupe du monde de Football.
La légende du Tour
Je me reprends à rêver : il suffit de s’écarter des masses et des stands pour, en cherchant bien, trouver la légende du Tour. Ici et là des affiches des hommes qui ont marqués l’Histoire de la grande Boucle, et aussi des grands champions en chair et en os : Virenque, Hinault, Thévenet. C’est en cherchant avec l’équipe de télévision que nous tombons sur LE champion : Poulidor, assis à une table ombragée où il signe quelques autographes. Poulidor, champion de l’époque d’avant, celle où le business n’avait pas envahi le Tour. Poulidor, lien entre autrefois et aujourd’hui, entre tradition et modernité, entre prise de risque et rentabilité, entre panache et efficacité. Poulidor, « Poupou », une légende. Et mon regard de se voiler d’admiration devant cet homme qui a tant fait rêvé la France, et dont la mémoire n’est pas effacée, ni même éclaboussée, par le dopage, la modernité ou le sport business. La légende du Tour est éternelle.