Le tribunal de commerce de Toulouse a condamné un commerçant à cesser la vente d’e-cigarettes jugeant qu’il faisait une concurrence déloyale à un buraliste. Il a fait appel de cette décision. Les vendeurs orléanais sont inquiets.
La vente de cigarettes électroniques est-elle déloyale ? Oui, selon le tribunal de commerce de Toulouse qui vient de rendre un jugement qui pourrait faire jurisprudence. Le vendeur spécialisé, de la banlieue toulousaine, procéderait à une « concurrence illicite et déloyale ». La vente de ces produits et leur publicité constituant « un acte illicite violant le monopole d'Etat sur la vente du tabac ». Le tribunal de commerce de Toulouse considère que ce produit est un substitut du tabac et relève donc de la Loi Évin qui interdit la publicité. Une première en France.
Concurrence déloyale ou pas ?
A Orléans, les magasins spécialisés réagissent. Christine Abolivier, gérante du Vapostore , voit la cigarette électronique comme une alternative au tabac. Ouverte depuis avril dernier, son enseigne compte déjà de nombreux clients. D’après la gérante, il « n'y a pas de concurrence déloyale mais une réelle complémentarité ». Pour apaiser le dialogue entre buralistes et vapoteurs, il faudrait selon elle « éclaircir le flou juridique qui existe autour de ce produit » et réglementer ce métier ». Les vendeurs de e-cigarettes mettent tous en avant le fait qu’il n’y a « pas de concurrence déloyale ». Selon eux, si les fumeurs choisissent ce produit, c’est pour faire attention à leur santé et répondre à la hausse des prix du tabac.
Le Collectif des acteurs de la cigarette électronique (CACE) a dénoncé, lundi, une décision « scandaleuse », qui « outrepasse les pouvoirs du juge ». La cigarette électronique « constitue un produit de consommation courante et non un produit du tabac. Le tribunal de commerce de Toulouse a, à ce titre, outrepassé ses pouvoirs en appliquant à la cigarette électronique le statut de produit du tabac pour en interdire la publicité et en accorder le monopole aux buralistes », a écrit le CACE dans un communiqué. « Une telle décision remet en cause l'ensemble de la filière de la cigarette électronique et menace les 2.500 emplois créés en France », poursuit le collectif.
La question du monopole de la vente des cigarettes
Pas de concurrence déloyale … un point de vue auquel n’adhère pas les buralistes. Claude Bourgeois, président de la chambre syndicale des buralistes du Loiret approuve la décision du tribunal de Toulouse. Pour lui, pas de doute, il s’agit bien de « concurrence déloyale » et cela « va permettre de faire entendre la voix des buralistes, à l’heure où la concurrence a déjà conduit à la fermeture de nombreux bureaux de tabac dans le département ». Pour lui, « cette catégorie des produits destinés à être fumés même s'ils ne contiennent pas de tabac tombe donc, comme la cigarette classique, sous le coup du monopole de distribution réservé aux buralistes ». Il espère aujourd’hui que ce jugement face jurisprudence.
Plus globalement, le jugement du tribunal de Toulouse pose la question du monopole de la vente des cigarettes. Aujourd'hui le marché des e-cigarettes est estimé à 200 millions d'euros en France. Le nombre de boutiques lui est passé d'une centaine fin 2012 à plus de 600, à peine, un an plus tard.
Le gouvernement français aurait décidé de trancher suite à cette polémique. Il envisagerait de réserver la vente de cigarettes électroniques fortes en nicotine aux pharmacies et de laisser les light en vente partout ailleurs.
>>> Reportage d'Amélie Lepage et Isabelle Racine