Les greffiers manifestent mardi à Paris. La profession s'estime délaissée. Charges de travail alourdies, manque de personnel, rémunérations trop basses, les greffiers en ont assez . Dans leur ligne de mire également : la réforme " justice du XXIe siècle" annoncée par la garde des Sceaux.
Le mouvement, parti d'Agen, dure depuis près d'un mois déjà mais se cantonnait jusqu'ici à des rassemblements sur les marches de dizaines de palais de justice en France ou par le refus d'accomplir des tâches qui ne relèvent pas, selon les greffiers, de leurs attributions. Aujourd'hui, le mouvement prend de l'ampleur avec cette première grève nationale depuis près de 14 ans,
"Tout le monde a trop de travail"
" Certaines de nos collègues ont des centaines d'heures supplémentaires à récupérer. Nous ne les prenons pas parce qu'à notre retour, le travail se sera accumulé. La justice fonctionne grâce à la conscience professionnelle des greffiers. Mais aujourd'hui, on ne peut plus" explique Leïla Nekaa Da-Cunha, greffière en correctionnel à Orléans. ►vidéo: écoutez son témoignage dans le portait réalisé le 9 avril par F.Marcel et P.Do LepaisUn niveau de rémunération insuffisant
Autre pierre d'achoppement, le niveau des salaires. "Il y a une souffrance terrible parce que les salaires sont trop bas", estiment les greffiers. Actuellement, un greffier à l'échelon le plus bas ne gagnera pas plus que 2.315 euros bruts mensuels en fin de carrière. La grille des salaires n'a quasiment pas bougé depuis 2003. Un niveau de rémunération qu'ils rapportent à celui de leurs études: un bac+2 est nécessaire pour le concours de l'Ecole nationale des greffes, mais beaucoup d'aspirants greffiers se présentent aujourd'hui au concours avec un bac+4 ou bac+5.Le ras-le-bol tient également à ce qui est perçu comme une différence de traitement entre personnels de greffe et magistrats. Et pourtant le greffier est à la fois le garant de la procédure judiciaire, mais aussi le visage de la justice pour beaucoup de justiciables, le contact privilégié des avocats et des policiers, sans compter le juge, qui ne peut rien faire ou presque sans lui.
C'est le grand chantier dit de la "Justice du XXIe siècle", une réforme d'ampleur en gestation, qui a mis le feu aux poudres et déclenché cette grogne venue de la base. Cette réforme prévoit la création d'un greffier juridictionnel, aux missions élargies. Il pourrait notamment prononcer un divorce par consentement mutuel, compétence qui relève aujourd'hui du seul juge. Beaucoup de greffiers n'y sont pas opposés mais estiment qu'une revalorisation préalable est nécessaire.