"Ça restera de beaux discours" : les pompiers sceptiques face aux mesures annoncées pour leur sécurité

Une mission du Sénat a préconisé 18 mesures "concrètes et opérationnelles" afin de renforcer la sécurité des pompiers. Depuis dix ans, les violences contre les sapeurs-pompiers ont augmenté de 213%.

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Plus de sensibilisation du public, de protection et de coordination avec la police et la santé: un rapport sénatorial publié mercredi a appelé le gouvernement à se mobiliser pour enrayer la hausse continue des agressions contre les sapeurs-pompiers.

 

Des mesures "concrètes et opérationnelles"

Adopté dans la matinée par la commission des lois du Sénat, le rapport de la mission d'information "sécurité des sapeurs-pompiers" élaboré après six mois de consultations préconise 18 mesures "concrètes et opérationnelles" pour que cessent ces violences "inacceptables". Les préconisations de la commission mettent l'accent sur la prévention mais aussi sur les bonnes actions à entreprendre pour limiter les effets et réparer les dégâts d'une agression une fois qu'elle a eu lieu.

Si elles restent limitées (environ six par jour sur 10.000 interventions), le nombre des violences contre les pompiers a triplé depuis dix ans (+ 213%), selon le ministère de l'Intérieur. Et augmenté de 50% sur les cinq premiers mois de 2019 par rapport à la même période de 2018, note ce rapport porté par les sénateurs Philippe Bas (LR, Manche), Patrick Kanner (PS, Nord), Catherine Troendlé (LR, Haut-Rhin) et Loïc Hervé (UDI, Haute-Savoie).

"Les pouvoirs publics ne peuvent rester sans réaction face à cette évolution", a déclaré à la presse M. Bas en présentant le rapport. Outre une campagne de sensibilisation grand public contre ces violences, le rapport réclame des moyens pour renforcer la sécurité des pompiers (formation, équipement, "référents sécurité" dans les casernes). 
   

Côté pompiers, de la "vive satisfaction" aux "beaux discours

"Nous allons étudier ces propositions avec beaucoup d'intérêt", a déclaré dans l'après-midi le secrétaire d'Etat à l'Intérieur, Laurent Nuñez, interrogé au Sénat par M. Hervé. "Ce sujet est très sérieux (et) mérite beaucoup d'action, et le gouvernement est tout engagé dans cette action", a-t-il ajouté.

La Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), qui chapeaute les quelque 247 000 pompiers du pays, a exprimé dans un communiqué sa "vive satisfaction" à la lecture de ce rapport "en ligne" avec ses "principales préconisations". A commencer par la création, "essentielle" selon elle, d'un numéro d'appel de secours unique, le 112, autour de plateformes départementales d'appel communes regroupant police/gendarmerie, pompiers et Samu.

Cependant, à l'échelle régionale, les syndicats de pompiers restent sceptiques. "Ça ne servira à rien", lâche Cyril Giron, président du syndicat autonome des pompiers (SPP-PATS) du Loir-et-Cher, qui regrette l'insuffisance de ces "mesurettes". Confronté personnellement à la violence sur le terrain, comme une majorité de ses collègue, il estime que les pompiers ont besoin de plus de moyens avant toute chose. "On veut nous mettre un référent sécurité pour faire beau dans les casernes, mais les SDIS sont déjà en manque de personnel !"

Dans le Loiret, le représentant du SPP-PATS, Jérôme Sanfilippo, se veut un peu plus mesuré :"Toutes les propositions sont bien, mais si elles ne sont pas suivies d'actes forts, cela restera de beaux discours." Pendant les interventions, les pompiers sont exposés à toutes sortes de violences verbales et parfois physiques, face auxquelles ils sont bien dépourvus. Ce sont parfois les personnes secourues elles-mêmes qui, dans la panique ou l'impatience, s'en prennent aux pompiers. "Il faudrait qu'on puisse être accompagnés par les forces de l'ordre sur les interventions à risque", note Jérôme Sanfilippo, "mais les forces de l'ordre sont comme nous, noyés sous les appels, le Samu également". A Orléans, les pompiers vont organiser un rassemblement sur la place du Martroi le 20 décembre dans l'après-midi.

 

Les moyens financiers existent

Côté financier, les marges de manoeuvre existent pourtant, souligne le rapport, à l'heure où l'État et les collectivités locales se renvoient la balle sur le financement des centres départementaux d'incendie et de secours (SDIS), au grand dam des pompiers qui dénoncent des moyens insuffisants face à la hausse des sollicitations (4,6 millions d'interventions en 2018, contre 3,5 millions en 1998).

Il suffit pour cela à l'État de réaffecter, comme cela avait été prévu mais non tenu, toutes les économies (30 millions d'euros par an) dégagées depuis 2016 par la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance versée aux pompiers, note-t-il.

 

Une plateforme d'appel unique

Le rapport appelle également le gouvernement à réunir les ministère de la Santé et de l'Intérieur pour clarifier la répartition des missions de secours entre pompiers et services de santé. Et décharger les premiers des missions non urgentes de remplacement d'ambulances ou de médecins, qui les mobilisent de plus en plus, pour qu'ils puissent se concentrer sur le secours d'urgence.

Il promeut pour cela la mise en place de plateformes d'appel d'urgence communes avec le Samu et la police/gendarmerie, pour éviter notamment le scénario dramatique du 4 septembre 2018 à Villeneuve-Saint-Georges (Val-de-Marne). Un pompier avait alors été tué par l'homme qu'il était venu secourir, un déséquilibré connu des services médicaux pour ses antécédents psychiatriques.

Si cet appel avait été reçu sur une plateforme commune, les pompiers auraient pu en être avertis, venir avec des policiers et le drame aurait pu être
évité, ont depuis souligné nombre de responsables pompiers. Le rapport réclame également un renforcement de l'assistance psychologique et juridique des pompiers victimes d'agressions.
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