Stéphane Poupeau, président du syndicat national de la sécurité publique et Yann Galut, maire de Bourges réagissent au lendemain de la mise en examen de deux policiers municipaux à Bourges. Décision prise après que deux jeunes à scooter ont été blessés dont un grièvement lors d'une interpellation lundi soir. Les deux policiers municipaux ont aussi écopé d'une interdiction d’exercer l’activité de police et de sécurité.
"J'ai totale confiance en la Justice pour éclaircir les faits et éventuellement les responsabilités autour de cet accident." En tant que responsable de la police municipale, Yann Galut, le maire de Bourges a réagi ce vendredi après-midi par voix de communiqué : "Les investigations sont en cours. Les auditions, l’exploitation des caméras de vidéosurveillance, les examens toxicologiques devront permettre de déterminer précisément les circonstances de l’accident et s’il y a un lien direct avec le contrôle policier préalable - ce qui ne paraît pas évident à ce stade."
Et il rappelle le contexte : " Bourges a été frappée ces derniers mois comme toutes les villes de France par la multiplication de conduites à risque, de rodéos urbains, de conduites sans permis sous stupéfiant et sous alcool… C’est dangereux, c’est inacceptable et insupportable."
L'usage de la bombe lacrymogène en question
Il est 23H30 lundi 15 avril quand le chemin de deux jeunes en scooter croise une patrouille de la police municipale de Bourges. "Les policiers tentent alors de les intercepter pour un contrôle. Face au refus d'obtempérer, l’équipage de la police municipale parvient à se mettre à la hauteur du scooter. Le passager de l’équipage police municipale sort alors une bombe lacrymogène que lui avait tendue son coéquipier conducteur. Il demande au conducteur de s’arrêter. Il fait usage de la lacrymogène dans la direction du scooter, " a détaillé Céline Visiedo, procureure de la République de Bourges lors d'une conférence de presse ce jeudi 18 avril.
L'équipe municipale cesse la poursuite. Le scooter continue route Saint Michel.
Quelques minutes plus tard, les secours sont appelés. Les deux jeunes avaient eu un accident. Les images du radar de feu situé face à la rue Gaston Berger attestent qu'ils ont percuté un arbre et un poteau électrique route de saint Michel à Bourges.
Le conducteur du scooter âgé de 22 ans se trouve dans un état critique alors que son passager âgé de 20 ans est plus légèrement blessé. Selon les éléments d'investigation, "aucune collision n'a eu lieu entre le véhicule de police et le scooter".
Les policiers placés en garde à vue le soir même, ont indiqué avoir rapidement cessé la poursuite du scooter conformément aux instructions qui leur sont données. Selon la procureure de la République de Bourges "ils ont admis avoir utilisé à tort la bombe lacrymogène, interprétant un geste du passager du scooter comme étant menaçant".
Deux magistrats instructeurs ont été nommés. Une information judiciaire a été ouverte pour des faits de violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique n’ayant pas entraîné d’incapacité totale de travail à l’encontre du policier passager et complicité de violences volontaires pour personne dépositaire de l’autorité publique n’ayant entraîné d’incapacité totale de travail à l’encontre du policier conducteur. Leur placement sous contrôle judiciaire a été requis avec interdiction d’exercer toute activité de police et de sécurité et interdiction de détenir une arme.
Accident grave de scooter à #Bourges lors d'une interpellation : les deux policiers municipaux mis en examen https://t.co/34SjoAoDVj
— France 3 Centre-Val de Loire (@F3Centre) April 19, 2024
Pour Stéphane Poupeau, président du syndicat national de la sécurité publique (SNSP), cette mise en examen n'a rien d'inhabituel "dès lors que les policiers municipaux peuvent utiliser leurs armes uniquement dans le cadre de la légitime défense ou quand il y a atteinte à leur intégrité physique ou à celle d'autrui. Comme là il y a eu usage de bombe lacrymogène, la mise en examen n'est pas étonnante en soi".
Il attend de l'enquête que soient établies les réelles responsabilités et si l'usage de la bombe lacrymogène était légitime ou pas. "Pour le moment, aucun lien n'a pu être établi entre l'usage de la bombe lacrymogène et l'accident surtout que plusieurs minutes se sont écoulées entre les deux. On ne sait pas si les collègues se sont sentis menacés, peut-être ont-ils pensé que les individus étaient armés."
Stéphane Poupeau explique que le syndicat soutient les policiers municipaux. "Mais s'il s'avère que l'usage de l'arme était disproportionné ou illégale, on n'a pas pour habitude de soutenir des policiers qui ont commis des actes illégaux. Donc laissons faire l'enquête et on se prononcera quand toute la lumière aura été faite".
Vous vous rendez compte des vies gâchées ! Ça prend des proportions hallucinantes alors qu'il suffit de s'arrêter.
Stéphane Poupeau, président du syndicat national de la sécurité publique
Le syndicat national de la sécurité publique (SNSP) reste en retrait le temps de l'enquête et attend de savoir ce qui en ressort pour prendre position, mais Stéphane Poupeau tient à rappeler : "Il ne faut pas oublier que s'il n'y avait pas eu de multiples infractions commises par le conducteur de scooter tout cela ne serait pas arrivé. Le conducteur du scooter avait 1,62 grammes d'alcool dans le sang, des produits stupéfiants, conduisait sans casque sans plaque et a refusé d'obtempérer. "
Pour conclure en attendant les résultats de l'enquête, Stéphane Poupeau tient à lancer un appel aux jeunes : "Si vous êtes en infraction, arrêtez-vous ! Rien ne justifie de perdre la vie ou d'être handicapé à vie pour un défaut de casque ou un défaut de plaque. "
Il ajoute : " Un casque c'est 90 euros d'amende, une plaque c'est 135 euros, ça ne vaut pas le coup de mettre sa vie en danger et la vie des autres pour des infractions au code de la route. Vous vous rendez compte des vies gâchées. Entre le conducteur qui est entre la vie et la mort, le passager qui est blessé et deux policiers municipaux qui risquent de perdre leur boulot. Ça prend des proportions hallucinantes alors qu'il suffit de s'arrêter."
Quant au maire de Bourges, il rappelle qu'il a saisi à plusieurs reprises le Préfet du Cher sur ce sujet pour une mobilisation renforcée des forces de sécurité et d’investigation, que les contrôles ont été multipliés et se poursuivront. "Plusieurs motos ont été saisies. De nombreuses infractions de conduite sous stupéfiant ou sous alcool ont été sanctionnées."
Yann Galut renouvelle son appel à la prudence et aux bonnes pratiques sur la route.