Quatre jours après l'accident de scooter de deux jeunes grièvement blessés lors d'une interpellation à Bourges, deux policiers municipaux ont été mis examen et placés sous contrôle judiciaire avec l’interdiction d’exercer l’activité de police et de sécurité annonce la procureure de Bourges.
Les policiers municipaux ont reconnu lors de leur garde à vue avoir usé d'un gaz lacrymogène lors de l'interpellation de deux jeunes hommes âgés de 20 et 22 ans. Ces derniers circulaient en scooter lundi 15 avril sans casques et sans plaque d'immatriculation.
Le déroulement de l'interpellation
Il est 23H30 cette nuit-là quand le chemin des deux jeunes en scooter croisent une patrouille de la police municipale de Bourges. Les policiers tentent alors de les intercepter pour un contrôle. Face au refus d'obtempérer, l’équipage de la police municipale parvient à se mettre à la hauteur du scooter. Le passager de l’équipage police municipale sort alors une bombe lacrymogène que lui avait tendu son co-équipier conducteur. Il demande au conducteur de s’arrêter. Il fait usage de la lacrymogène dans la direction du scooter.
L’équipage police municipale, cesse toute poursuite, et le scooter s’engage dans la rue Gaston Berger tandis que la police poursuit sa route, explique la procureure de Bourges dans un communiqué.
A 23h37, un premier appel aux services de secours est effectué par un riverain. À 23h52, les effectifs de la brigade de nuit du commissariat de police nationale de Bourges sont requis pour se rendre au 216 route de Saint-Michel à Bourges pour un accident de la circulation. Sur place des équipes médicales et le SDIS 18 sont présents et prennent en charge le conducteur du scooter âgé de 22 ans qui se trouve dans un état critique. Le passager du scooter, âgé de 20 ans est plus légèrement blessé, en état de choc. Il indique rapidement au premier témoin qu’ils ont été gazés par un équipage de la police municipale.
Les deux jeunes hommes sont connus des services de police
Les analyses toxicologiques du conducteur du scooter mettent en exergue la présence d’un taux de 1,62 g/l d’alcool dans le sang ainsi qu’une conduite sous l’emprise de stupéfiants. Il a été condamné à deux reprises pour des faits d’usage de stupéfiants.
Les constatations médico-légales font état d’un polytraumatisme majeur avec notamment un traumatisme cranio-facial et de multiples fractures. L’ITT est fixée à 120 jours. Pour l'heure, le pronostic vital de la victime est toujours engagé selon Céline Visiedo, procureure de la République.
Le passager du scooter est quant à lui défavorablement connu des services de la police et condamné à plusieurs reprises par la justice notamment pour des faits de refus d’obtempérer, d’usage et de détention de stupéfiants.
Les policiers mis en examen et placés sous contrôle judiciaire avec l’interdiction d’exercer l’activité de police et de sécurité
Il ressort des éléments d’investigation, qu’aucune collision n’a eu lieu entre le véhicule police et le scooter conduit par la victime. L’exploitation de la vidéosurveillance n’a pas permis de visualiser l’accident. Il résulte néanmoins des images du radar de feu situé face de la rue Gaston Berger et d’un pré-rapport d’accidentologie que le scooter s’est engagé dans cette rue après l’utilisation de la bombe lacrymogène, a effectué un demi-tour et semble s’être réengagé route de Saint-Michel jusqu’au 216 route de Saint-Michel où se situe le point de choc. Le scooter a heurté un arbre et un poteau électrique, détaille la procureure de Bourges.
Les policiers placés en garde à vue le mardi 16 avril ont indiqué avoir rapidement cessé la poursuite du scooter conformément aux instructions qui leur sont données.
Les policiers admettent avoir utilisé à tort la bombe lacrymogène, interprétant un geste du passager du scooter comme étant menaçant.
Céline Visiedo, Procureure de Bourges
À ce stade de l’enquête, et afin de pouvoir vérifier l’existence d’un lien de causalité entre l’utilisation de la bombe lacrymogène et la réalisation de l’accident, le parquet de Bourges a présenté les deux policiers à deux magistrats instructeurs ce jeudi après-midi. Ce qui est un fait assez rare qu'une affaire soit suivie par deux magistrats instructeurs, précise la procureure Bourges lors d'une conférence de presse. L’ouverture d’une information a été requise pour des faits de violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique n’ayant pas entraîné d’incapacité totale de travail à l’encontre du policier passager et complicité de violences volontaires pour personne dépositaire de l’autorité publique n’ayant entraîné d’incapacité totale de travail à l’encontre policier conducteur. Leur placement sous contrôle judiciaire a été requis avec interdiction d’exercer toute activité de police et de sécurité et interdiction de détenir une arme.
Les magistrats instructeurs ont mis en examen le passager de l’équipage police des chefs de violence par une personne dépositaire de l’autorité publique suivie de mutilation ou d’infirmité permanente et de violences volontaires aggravées par trois circonstances (personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions, avec usage d’une arme et en réunion) et le conducteur du véhicule des chefs de complicité de violence par une personne dépositaire de l’autorité publique suivie de mutilation ou d’infirmité permanente et de violences volontaires aggravées par trois circonstances (personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions, avec usage d’une arme et en réunion). Ils ont été placés sous contrôle judiciaire avec notamment l’interdiction d’exercer l’activité de police et de sécurité, l’interdiction d’entrer en contact avec le co-auteur et les victimes et l’interdiction de détenir une arme.