Depuis le 17 décembre, tous les habitants de l'agglomération Bourges Plus peuvent consulter sur internet l'exposition solaire de leur toiture, et simuler le prix et le rendement de l'installation de panneaux chez eux. Objectif : investir au niveau local dans les énergies renouvelables.
Laissons entrer le soleil ! C'est ce que souhaite faire l'agglomération Bourges Plus, qui vient de lancer le 17 décembre un cadastre solaire de son territoire, consultable en ligne. Un cadastre avec un objectif : développer l'usage du photovolaïque, soit la production d'électricité par conversion de l'énergie solaire.
Son interface présente une bête vue du ciel, sur laquelle tous les toits sont coloriés en nuances de jaunes. Plus le jaune tire sur le vif, plus l'ensoleillement est fort, et plus il tire sur le marron, moins il devient intéressant de poser un panneau solaire.
Une fois sa maison repérée sur la carte, tout particulier peut enclencher le simulateur et "évaluer l’opportunité économique et environnementale d’installer des panneaux solaires" sur sa toiture, dixit l'agglomération.
Des données de l'IGN et de Météo France
Le cadastre a été développé par la startup In Sun We Trust, une jeune entreprise spécialisée dans la comparaison entre les différents installateurs de panneaux solaires. Son objectif premier était "d'éviter aux clients les arnaques, et de faciliter l'accès à l'énergie solaire pour les Français", explique le responsable du développement de la boîte, Antoine Ebel.
Rapidement, l'idée du cadastre est arrivée, afin de séduire les collectivités et inclure le maximum de Français dans la démarche. Le cadastre est élaboré par la conjonction de deux bases de données :
- l'une vient de l'IGN, et donne les caractéristiques de chaque toiture, comme l'inclinaison, l'orientation et les ombrages qu'elle reçoit par de la végétation ou des bâtiments proches.
- l'autre vient de Météo France, et permet de déterminer la quantité de soleil reçue chaque année sur une région spécifique. Avec une précision telle que In Sun We Trust "est capable de détecter des effets de microclimats", selon Antoine Ebel.
Seules deux cadastres solaires en Centre-Val de Loire
Après une étape de calculs - "plusieurs mois pour chaque collectivité couverte" - le cadastre est mis en ligne sur un site dédié, estampillé avec le logo de la collectivité couverte. En cinq ans d'existence, In Sun We Trust a lié des partenariats avec 80 collectivités françaises, et leurs cadastres couvrent 12 millions d'habitants.
Sur ces deux collectivités, seules deux se trouvent en Centre-Val de Loire. La première à avoir tenté l'expérience est la communauté de communes Touraine-Est Vallées, en Indre-et-Loire, équipée depuis décembre 2019. Avant d'être rejointe par Bourges Plus en cette fin d'année.
"Multiplier par 40" la production d'électricité renouvelable à Bourges
Et l'objectif affiché de l'agglomération berruyère est simple : "multiplier par 40 [la] production en électricité renouvelable" du territoire. Actuellement, seul 0,3% de l'énergie consommée y est produite par du solaire. Pourtant, d'après le Plan Climat Air Energie Territorial de Bourges Plus, le potentiel de production par le solaire photovoltaïque aurait de quoi couvrir un tiers de la consommation du territoire.
Un chiffre qui ne sera pas atteint dans les années à venir, et qui n'est même pas affiché comme un objectif officiel par l'agglomération. Bourges Plus estime en revanche que 40% de sa consommation d'énergie vient des logements.
Le cadastre solaire apparaît alors comme une aide, pour rendre les habitations plus autonomes en énergie, propre de surcroît. Un outil pour encourager mais qui ne se suffit pas encore à lui-même, comme le reconnaît Antoine Ebel d'In Sun We Trust :
C’est fiable pour une étude de préfaisabilité. Mais il ne faut pas se dire : "On m'annonce tant de production, je signe". Ca demande une vérification avec photos et visite technique sur place pour être sûr qu’on passe par à coté de quelque chose, comme un arbre ou un immeuble qui a poussé depuis le dernier passage de l'avion de l'IGN, et qui ajouterait de l'ombre.
2020 est passé par là
S'il est encore bien trop tôt pour évaluer l'efficacité du dispositif à Bourges, Antoine Ebel reconnaît que, en un an, le cadastre de Touraine-Est Vallée a reçu "assez peu de visites". "On est au creux de la vague, notamment à cause du confinement", estime-t-il, préférant concentrer ses "espoirs sur 2021".
Au début de son histoire, In Sun We Trust débauchait les collectivités pour leur proposer un cadastre flambant neuf. "Aujourd'hui, notre réputation nous précède, et ce sont elles qui viennent nous demander." Mais à l'heure actuelle, aucune autre collectivité du Centre-Val de Loire n'a sollicité la startup.
Redonner confiance dans le solaire
"Les gens en ont marre, parce que beaucoup reçoivent au moins un appel de démarchage pour des panneaux solaires chaque semaine." Pour Antoine Ebel, le responsable du développement chez In Sun We Trist, les Français n'ont plus confiance dans l'énergie solaire, entre démarchage abusif et déficit d'image pour des raisons plus ou moins avérées.
Alors le cadastre solaire apparaît comme un bon moyen pour redorer le blason des panneaux solaires. "Quand une collectivité met son logo sur notre cadastre, on espère que ça redonne confiance aux gens."
Et au-delà du simple démarchage, énervant mais peu problématique en soi, le cadastre solaire doit permettre d'éviter les fréquentes arnaques, en passant par In Sun We Trust, qui se décrit comme "un tiers de confiance".
"Certaines sociétés ou plateformes commerciales seront tentées d’utiliser le cadastre solaire pour effectuer des démarchages abusifs", prévient cependant l'agglomération, qui "ne cautionne et ne réalisera aucun démarchage téléphonique concernant la vente d’équipements, leur pose ou bien la souscription à des éventuels prêts financiers".