Accusé de violences contre 53 enfants et adolescents, l'abbé Régis Spinoza est jugé à Bourges depuis ce lundi 22 novembre. Le substitut du procureur a requis trois ans de prison, dont deux avec sursis.
Un abbé "gourouesque", "colérique" et "qui ne supporte pas qu'on le contredise". Voilà comment le substitut du procureur Eric Raygasse a décrit, devant le tribunal de Bourges, Régis Spinoza. Ancien directeur de l'école de l'Angélus, située à Presly dans le Cher, il est accusé d'avoir infligé violences et humiliations à une cinquantaine d'élèves. En ce deuxième jour de procès ce mardi 23 novembre, le magistrat a requis trois ans de prison, dont deux avec sursis à l'encontre de l'abbé.
Eric Raygasse a également réclamé dix ans d'interdiction d'exercer une profession en lien avec des mineurs. "Omerta", "secret", "peur" : le magistrat a dépeint l'école comme "un monde en vase clos" et un quotidien marqué par des "faits de violence institutionnalisée" et des privations.
Six mois requis pour deux surveillants
L'ancien directeur, qui s'est présenté en soutane au tribunal, est poursuivi pour des violences avec une ITT de plus de huit jours commises sur un mineur ainsi que pour des violences sans ITT commises sur plusieurs enfants.
Me Ludivine Lamoure, avocate de la défense, a réfuté toute "institutionnalisation" des brimades, pointant des incohérences dans les témoignages, notamment sur l'intensité des violences reprochées.
Le parquet a aussi requis six mois de prison avec sursis à l'encontre des deux autres prévenus, deux surveillants de l'établissement, également accusés de violences commises sur les élèves.
53 victimes identifiées de violences
Au total, selon les enquêteurs, 53 enfants et adolescents ont subi des violences entre mars 2014 et la fermeture de l'Angélus en juin 2017. Selon la multitude de témoignages d'élèves, mais aussi de professeurs et de bénévoles, les brimades, humiliations, coups et corvées étaient nombreux au sein de l'internat, qui accueillait des élèves de la primaire au lycée.
Dès le début du procès lundi, l'abbé âgé de 50 ans, partisan d'un catholicisme qu'il a décrit comme "traditionnel", a reconnu des gifles, données "de manière accidentelle". L'ex-directeur a toutefois réfuté le terme de violence, évoquant plutôt "un acte d'éducation".
Seules deux familles se sont portées parties civiles. Pour l'une d'elles, Me Solange Doumic a fustigé une institution qui s'est crue "au-dessus des lois". "On ne peut pas s'abstraire des lois de la République parce que l'on est chrétien", a insisté l'avocate.
Cette dernière a notamment réclamé 16 000 euros de dommages et intérêts à l'encontre de l'abbé pour l'ex-élève qu'elle défendait.
Dans un autre volet du dossier, l'ex-directeur est soupçonné d'avoir eu recours à du travail dissimulé au sein de l'établissement, notamment pour certains enseignants. Évoquant des bénévoles payés "au black", Me Guillaume Bardon, pour le compte de l'Urssaf, a réclamé à l'abbé plus de 221 000 euros de dommages et intérêts, équivalant à l'évaluation des cotisations non payées.
Le jugement a été mis en délibéré à ce mercredi.