Le "dry january", ou janvier sobre, est un défi qui consiste à ne boire aucune goutte d'alcool pendant un mois. Quand bars et restaurants restent fermés, le défi semble être des plus simples pour les consommateurs occasionnels. Pour les personnes souffrants d'alcoolisme, c'est un véritable combat.
L'initiative nous vient tout droit du Royaume-Uni. Le dry january (traduisez "janvier sobre") consiste à ne plus boire d'alcool après la soirée du nouvel an et ce, pendant un mois. Pour aider les personnes motivées par ce défi, Alcohol Change UK a même créé sa propre application pour cette édition 2021. Une fois installée, vous renseignez vos consommations journalières et la plateforme calcule vos économies et personnalise vos objectifs.
Le Dry January est donc devenu en France une véritable campagne de santé. Un défi qui peut s'avérer compliqué : ''c'est plus difficile que d'arrêter de fumer car dans notre pays, le social tourne beaucoup autour de l'alcool. De l'autre côte de la manche, on voit l'alcool d'une façon plus négative" estime François Collomp, médecin addictologue au centre d'alcoologie Paul Cézanne d'Orléans. Selon lui, environ 10% de la population serait concerné par des problèmes d'alcool. A l'heure où bars et restaurants gardent portes closes et où notre sociabilité est impactée par le couvre-feu, venir en aide à ces personnes n'est pas une mince affaire pour association et médecin.
"On a multiplié le nombre de personnes prises en charge par dix"
Daniel Benoit est responsable de l'association Alcool Assistance dans le Cher où il aide les personnes souffrant de problèmes d'alcoolémie. En janvier 2020, il a accompagné 7 personnes dans ce challenge. Parmi elles, une seule a totalement arrêté sa consommation d'alcool, tout en continuant d'être accompagnée lors des groupes de parole. Ce mois-ci, il accompagne pour l'instant cinq personnes prêtes à relever le défi : "on les aide à socialiser, à leur apprendre à faire la fête sans produit".
Ces personnes, il les a deux fois par semaine au téléphone mais avec la crise sanitaire, il n'a pas pu les recevoir en groupe de paroles pendant les périodes de confinement. Il n'a pu organiser ces séances qu'après l'accord de l'Agence Régionale de Santé, et il a pu constater "les dégâts au mois d'avril".
Dans le département, on a accompagné entre 300 et 400 personnes et leurs proches cette année. Je pense qu'on a multiplié le nombre de personnes prises en charge par dix.
Pour le médecin addictologue François Collomp, les personnes souffrant d'alcoolisme ont beaucoup souffert du confinement car elles se retrouvaient isolées : "l'alcool calmait alors les troubles depressifs et les sauts d'humeur. Il y a eu des rechutes, des conséquences psychologiques, des crises d'épilepsie et ça peut parfois même aller jusqu'à l'entrée en hôpital psychiatrique".
Dry January : premier pas vers un arrêt de la consommation ?
Selon l'addictologue, le Dry January permet à certaines personnes de faire "un premier diagnostic" sur leur rapport à l'alcool. "C'est une bonne idée pour les gens qui boivent et qui n'en ont pas conscience. La première phase de l'alcoolisme c'est le déni : on voit au début les bénéfices mais pas les effets indésirables".
Guy Berterau, le responsable de l'association Alcool Assistance dans l'Indre-et-Loire, estime que ce défi montre au consommateur les effets bénéfiques de l'arrêt de la substance : "l'agressivité peut disparaître, ça permet de regagner confiance en soi, de garder le moral, d'améliorer le sommeil et évidemment la condition physique". Malheureusement, aujourd'hui, les associations sont obligées de parler de réduction des risques et non plus d'abstinence totale car cette dernière est "considérée comme une privation des libertés selon l'Agence Régionale de Santé". A contre-coeur, Guy Bertereau organise donc sa sensibilisation ainsi, même si pour lui il faut "ne pas y toucher du tout".